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ÉGYPTE

Liberté pour les paysans de Sarando et leur avocat !

Le Comité de défense des paysans de Sarando.dénonce

Mardi 16 janvier 2007

Le tribunal pénal de la Haute Sécurité de l’Etat d’Exception à amanhour va juger, lundi 22 janvier 2007, au procès n°5631 de l’année 005, 19 paysans et 7 paysannes du hameau Sarando, village de arnougi, district de Damanhour, dans le gouvernorat de Behira (Delta u Nil), ainsi que leur avocat Mohamed Abdel Aziz Salama. Les paysans sont accusés d’atteinte à l’ordre et aux biens publics, destruction et incendie de biens privés et de coups et blessures ayant entraîné la mort de Ala’ Nawwar, parent de l’ancien propriétaire. Leur avocat est accusé de les avoir incités à ces exactions.

Les faits remontent à la fin des années soixante-dix, après que l’héritier de l’ancien grand propriétaire terrien, ait obtenu de l’Agence publique de la réforme agraire des documents indiquant son droit à reprendre possession plus de cent feddans (420 ha) de terres des hameaux du district de Damanhour, retirés à sa famille en 1965 par la réforme agraire, et distribués à 450 familles de paysans sans terre. Les paysans avaient été contraints par les descendants de l’ancien propriétaire à leur remettre leurs titres de bénéficiaires de la Réforme agraire contre des baux de fermage et des chèques en blanc.

Après la libération des baux en 1997, la plupart des paysans incapables de payer l’augmentation du bail renoncèrent à leurs parcelles sous la menace de devoir honorer les chèques signés en blanc, et les anciens propriétaires gagnèrent deux procès contre des récalcitrants. Le 28 décembre 2004, les paysans furent convoqués au commissariat de police de Damanhour pour signer des renonciations à leurs baux locatifs. Le 5 janvier 2005, la police envahit brutalement plusieurs maisons du hameau à la recherche de 16 paysans que le propriétaire accusait de tentative de meurtre, et qui d’après leurs déclarations au parquet étaient sommés de renoncer à leurs baux sous la menace d’être accusés de détention illégale d’arme. Certains acceptèrent de signer en blanc, d’autres furent détenus trois mois, d’autres 45 jours supplémentaires.

Pour obliger les paysans du hameau de Sarando à lui céder leurs baux ou leurs certificats de la réforme agraire, le principal héritier, Salah Nawwar, intenta à plusieurs dizaines de paysans cinq procès pour agression physique, destruction de biens, et usage d’armes à feu. Le tribunal innocenta les paysans dans ces procès, grâce à la mobilisation des associations des droits de l’homme et des organisations politiques égyptiennes, qui dénoncèrent la collusion entre les anciens propriétaires, la police et les fonctionnaires de l’Agence de la réforme agraire. L’affaire de Sarando devint emblématique du phénomène croissant, depuis la libération en 1997 des baux agricoles gelés depuis la réforme agraire, de la corruption de l’administration, et de son soutien aux anciens propriétaires pour récupérer les terres précédemment séquestrées et distribuées aux paysans. Suite au jugement innocentant les paysans, des forces de police arrêtèrent à l’aube du 4 mars 2005 sept paysans de Sarando à leurs domiciles.

À 9 heures du matin, plusieurs membres de la famille de l’ancien propriétaire apparurent, conduisant leurs automobiles et accompagnés de tracteurs transportant une centaine d’hommes de main armés. Les hommes de main tirèrent en direction des maisons des paysans tandis que les tracteurs retournaient la terre des exploitations et détruisaient les récoltes. Les paysans de Sarando et leurs familles, ainsi que des paysans des hameaux et villages environnants, engagèrent contre leurs agresseurs une bataille, dans laquelle un des membres de la famille des anciens propriétaires, Ala’ Hassan Nawwar, fut tué, et une cinquantaine de personnes furent blessées. Trois tracteurs et trois automobiles appartenant à la famille Nawwar, furent brûlés ou détruits. À l’appel des propriétaires, les forces de police occupèrent plusieurs jours Sarando et en interdirent l’accès.

Pendant le siège, les hommes adultes présents furent arrêtés et conduits les yeux bandés dans différents lieux d’incarcération, ainsi que vingt-six paysannes, épouses ou parentes de ceux qui avaient pu échapper à la police. Le parquet ordonna que quinze d’entre elles soient détenues quatre jours, pour procéder à leur interrogatoire. Les tortures subies par les paysans et leurs épouses causèrent le décès d’une des paysannes, Nefissa El Murakiby. L’avocat des paysans, Mohamed Abdel Aziz Salama, déposa une plainte contre l’officier de police Mohamed Ammar pour incarcération illégale et torture ayant entraîné la mort. Le parquet de Damanhour recueillit les témoignages des paysans sur leur incarcération, dont il reconnut les différents lieux, sur les tortures et le décès de Nefissa. Pour obliger les paysans à changer leurs déclarations au tribunal, leurs épouses, leurs enfants et leur bétail furent séquestrés jusqu’au procès, où un avocat parent d’un des officiers de police leur indiqua qu’ils devaient accuser leur avocat, Mohamed Abdel Aziz Salama, de les avoir contraints à de fausses déclarations contre la police. L’affaire fut classée par le parquet, du fait des contradictions dans les déclarations successives des paysans. Le principal héritier, Salah Nawwar, accusa neuf des paysans de l’avoir frappé à coups de bâtons, de jets de pierres et de boules de feu :

Abdelrazeq Abdelrazeq Abu Ala’, Mohamed Abdallah Elgizawi, Gamil Abdelmenam Qabil, Nasser Abdelgawad Abuzina, Azmi Abdelgawad Abuzina, Mustafa Abdelhamid Elgerf, Karam Mohamed Hussein Elfiqi, Mohamed Ragab Khalil Abu Taleb, Abdallah Abuzina.

Il accusa Mohamed Abdelaziz Salama, leur avocat, membre du comité des libertés au syndicat des avocats du gouvernorat de Bahira, d’avoir incité les paysans à commettre ces actes. Selon l’accusation, le conflit ne concerneraient que 34 feddans (15,7 ha) séquestrés en 1965 et restitués officiellement en 1973 par l’Agence de réforme agraire à trois héritiers de la famille Nawwar qui accordèrent des baux locatifs aux anciens bénéficiaires. Les loyers impayés s’élevant à 80.000 LE, ces propriétaires auraient permis aux fermiers de payer leur loyer en nature de 1997 à 2004 en cultivant 25 des 34 feddans contestés.

Au début de 2005, les fermiers auraient subitement et sans raison pris la terre de force, détruit la récolte de trèfle, et déposé des plaintes. Sur la base de ce récit, Salah Nawwar accuse 26 paysans et paysannes, ainsi que leur avocat, Mohamed Abdelaziz Salama, d’avoir volontairement provoqué les incidents du 4 mars 2005 ayant entraîné la mort de Ala’ Nawwar et de multiples destructions. Sous la juridiction d’exception de Haute Sécurité de l’Etat, les accusés risquent de lourdes peines de prison. Une déclaration récente du juge chargé du dossier, selon laquelle il serait convaincu de la culpabilité de l’avocat Mohamed Abdelaziz Salama, indique que des instructions à un haut niveau lui auraient été données, pour faire de ce procès un exemple contre les paysans de Sarando, les avocats, les organisations des droits de l’homme et les partis politiques qui les défendent. La solidarité en Égypte s’est développée depuis 2005 et sera visible au procès du 22 janvier 2007. La solidarité internationale doit s’exprimer fortement pour renforcer le soutien aux paysans de Sarando et à leur avocat et obtenir leur acquittement le 22 janvier 2007.