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ISRAEL

Les partis arabes interdits d’élections

Samedi 17 janvier 2009, par Jonathan Cook

Les trois seuls partis arabes représentés au parlement israélien ont juré hier de combattre une décision de la Commission électorale centrale leur interdisant de participer aux prochaines élections législatives, le mois prochain.

Pour la gauche, cette interdiction est « patriotique »

Dans une manœuvre sans précédent qui montre que la rupture dans les relations judéo-arabes en Israël s’approfondit, tous les principaux partis juifs ont voté lundi en faveur de cette déchéance globale. Différents membres de la commission ont considéré le soutien verbal des partis arabes à la population de Gaza comme un soutien au terrorisme.

La décision vient après l’arrestation d’au moins 600 manifestants arabes depuis le déclanchement de l’offensive sur Gaza et l’interrogatoire par la police secrète de dizaines de dirigeants de la communauté arabe. Les trois partis politiques - l’Assemblée nationale démocratique, la Liste arabe unie et le Mouvement du renouveau - ont 7 sièges de député sur un total de 120 au parlement israélien, la Knesset.

La commission électorale a interdit aux trois partis de présenter des candidats pour les élections du 10 février au motif qu’ils avaient violé une loi de 2002 en refusant de reconnaître Israël en tant qu’Etat juif et en soutenant une organisation terroriste.

Ahmed Tibi, leader du Renouveau, a dénoncé la décision comme « un procès politique mené par un groupe de fascistes et de racistes qui veulent voir la Knesset sans Arabes et qui veulent voir le pays sans Arabes ».

Un recours contre la déchéance sera présenté devant les juges de la Cour suprême cette semaine.

Hassan Jabareen, le directeur du Centre juridique pour les droits des minorités arabes, Adalah qui va défendre les partis arabes, notait que la motion de déchéance avait été introduite par les partis d’extrême droite. Entre autres, le Yisrael Beiteinu, qui mène campagne pour que la minorité arabe de 1,2 million de personnes soit déchue de la citoyenneté.

« Il est absurde que la commission ait soutenu une motion venant de partis racistes de la Knesset pour exclure les partis arabes dont la plate-forme revendique qu’Israël existe dans le cadre d’une démocratie nécessaire qui considére tous ses citoyens comme égaux. »

La commission électorale est composée de représentants de tous les grands partis. Bien qu’elle ait déjà voté auparavant une déchéance des candidats arabes, c’est la première fois que le Parti travailliste de gauche soutient une telle motion et que tous les partis arabes soient touchés par l’interdiction.

Mr Jabareen a accusé les partis de droite d’exploiter les tensions dues à la guerre. Le secrétaire général du Parti travailliste, Eitan Cabel, a appelé son parti à voter pour cette déchéance « patriotique ».

Tous les partis arabes ont sévèrement critiqué l’attaque contre Gaza. Cette semaine, Mr Tibi a qualifié les actions israéliennes de « génocide », pendant qu’Ibrahim SArsour, de la Liste arabe unifiée, disait qu’Israël cherchait à « éliminer la cause palestinienne ».

Dans le passé, des membres arabes de la Knesset avaient également soulevé l’opposition de leurs collègues juifs en se rendant dans les Etats arabes voisins, au risque d’une modification de la loi pour interdire de telles visites.

Après le vote pour l’interdiction, Avigdor Lieberman, leader du Yisrael Beiteinu, a laissé entendre que son parti avaient d’autres objectifs : « La prochaine bataille vise à rendre illégale l’Assemblée nationale démocratique (AND), parce qu’il s’agit d’une organisation terroriste dont l’objectif est de nuire à l’Etat d’Israël. »

Mr Lieberman et d’autres législateurs ont harcelé l’AND pendant des années, surtout parce qu’elle est dirigée par Azmi Bishara, franc partisan de l’égalité des droits pour les citoyens arabes. La police secrète israélienne a obligé Mr Bishara à s’exiler il y a deux ans, l’accusant de trahison après la guerre contre le Liban en 2006.

Aux élections de 2003, quand la commission a interdit l’AND et Mr Tibi de faire campagne, la décision fut cassée par une majorité de juges à la Cour suprême.(*) Mais peu des juges de cette audience siègent encore aujourd’hui.

« Il y a des raisons d’avoir peur. » dit Mr Jabareen. « La Cour suprême est elle aussi sensible à l’atmosphère de guerre actuelle et son autorité a été considérablement réduite au cours de l’année passée. Elle a été contrainte à la défensive devant des allégations venant de la droite selon lesquelles ses décisions servaient la gauche. »

Si l’interdiction était confirmée, une certaine représentation arabe à la Knesset serait probablement maintenue. Le Parti communiste mixte, juif et arabe, est autorisé à siéger et les trois principaux partis juifs ont un ou deux candidats arabes sur leurs listes, bien que pas toujours en positions éligibles.

En attendant, la police israélienne a reconnu avoir arrêté 600 personnes impliquées dans des manifestations contre l’offensive sur Gaza, certains pour des jets de pierres. Selon les avocats d’Adalah, plus de deux cents personnes, la plupart des Arabes, sont toujours en prison.

« Nous parlons d’arrestations en masse » dit Abber Baker, ajoutant qu’Israël se servait du délai de 30 jours qui permet de garder les suspects sans preuve et au-delà duquel il faut déposer un acte d’accusation.

En outre, le Shin Bet, les services secrets pour la sécurité intérieure d’Israël, a interpellé des dizaines de dirigeants arabes pour interrogatoire. Ameer Makhoul, directeur de l’organisation Ittijah qui défend les causes arabes en Israël, a été détenu la semaine dernière. Il a déclaré qu’un responsable de la sécurité qui l’interrogeait l’avait menacé de prison pour les manifestations qu’il avait aidé à organiser en soutien à Gaza.

Mr Makhoul : « L’agent m’a dit que j’étais un rebelle qui menaçait la sécurité de l’Etat en temps de guerre et qu’il serait heureux de me transférer à Gaza ».

Haaretz, quotidien israélien de gauche, a qualifié les interrogatoires « de tactiques d’intimidation pour empêcher une manifestation légitime ».

(*) Mr Tibi fut réélu puis élu vice-président de la Knesset.


Voir en ligne : www.info-palestine.net