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Haïti

L’urgence de la rupture

Vendredi 25 avril 2008, par Marie Frantz Joachin

Les manifestations qui débutent dans le département du sud le 3 avril 2008 s’apparentent à des émeutes de la faim, accompagnées d’actes de violence et de casses. Très vite elles se propagent à travers plusieurs villes jusqu’à la capitale. Jets de pierres contre des édifices publics et privés, incendies de véhicules privés et de ceux des forces de l’ordre, pillage de dépôts de nourriture, mais aussi saccages de magasins (de divers produits manufacturés), irruption violente dans des ministères, bureaux publics et... tentatives d’investir le palais présidentiel et le parlement.

Plus le mouvement de protestation s’intensifie, plus certains manifestants se montrent menaçants et s’écartent de leurs principales revendications, à savoir la hausse du coût de la vie, pour exiger la démission du chef du gouvernement [1] voire du président [2] et le départ des troupes onusiennes.

Ces observations nous amènent à nous interroger sur les réelles motivations des manifestants. Nous sommes en droit, en effet, de nous demander si les manifestations contre la hausse des prix ne constituent pas un prétexte pour certains secteurs politiques et économiques travaillant à la déstabilisation du gouvernement ? A qui profiterait cette déstabilisation ? S’agit-il d’émeutes de la faim, de révolte sociale ou encore d’une sévère réprobation du modèle de développement adopté par nos dirigeants ?

Flambée des prix, gel des initiatives de l’État haïtien

Depuis plusieurs mois, différents secteurs étatiques et non étatiques agitent la question relative à la cherté de la vie. En peu de temps, les prix des produits de première nécessité ont plus que doublé, suivant ainsi le mouvement de l’inflation qu’on connait actuellement à l’échelle mondiale. La crise financière américaine provoquera cette année un ralentissement de l’économie mondiale qui sera du à une réduction de la croissance, selon les prévisions des économistes rapportées par la presse internationale. Dans les pays en voie de développement, on assistera à une flambée des prix, précisent-ils.

Haïti, n’a pas attendu longtemps. Dès le premier trimestre de l’année, les répercussions de cette crise financière mondiale se font sentir. Au mois de mars, en une semaine, le sac de 120 livres de riz, nourriture de base de la population, passe de 35 à 70 dollars américains. Les prix de la farine, du blé, du lait et des produits laitiers augmentent considérablement.

Le principe qui veut qu’on consomme les produits locaux, est loin d’être une solution dans la mesure où le prix du transport, variant au rythme du renchérissement du carburant [3], est aussi pris en compte dans le prix de vente. Ainsi un « Véritable » [4] coute environ 1,75 $US. Le prix de 5 livres de haricot passe de 140 gourdes (3,8 US$) à 175 (4,70 US $) ou 200 gourdes (5,40 US $) suivant le marché [5].

Ces exemples montrent bien les difficultés auxquelles est confrontée la population haïtienne notamment les couches défavorisées pour se nourrir, [6] d’autant plus que le chômage est estimé à environ 70%, que le salaire minimum n’a jamais été revisité depuis 5 ans [7] et que le secteur informel s’accroit et se substitue au formel.

Dans ce contexte, le mouvement initié par les organisations féministes haïtiennes avec la manifestation du 7 mars 2008, devant le ministère du commerce et dans l’aire du Palais des Ministères, contre la vie chère et pour exiger du gouvernement la mise en œuvre d’une politique de création d’emploi, jouissent de la plus totale légitimité. D’autres secteurs, notamment les jeunes, les écoliers et écolières, les étudiants et étudiantes, relayent par la suite ce mouvement de protestation au début du mois d’avril aux Cayes, à Aquin, Petit Goâve, St Marc et aux Gonaïves pour ne citer que ces villes.

Face à ces manifestations successives contre la hausse du coût de la vie, le chef de l’État adresse le 9 avril un message à la nation, dans lequel il rejette toute mesure de subvention de produits importés pour baisser le cout de la vie. Il préconise en revanche une politique de subvention de la production et de la consommation nationale. A cet effet, il propose de subventionner les engrais et d’organiser la commercialisation du riz local. Il évoque des mesures devant favoriser, selon lui, non seulement l’augmentation de la production de riz, mais, à terme, l’autosuffisance.

Le président souligne dans son discours que la flambée actuelle des prix en Haïti s’inscrit dans un cadre mondial de hausse des prix. Il s’agit d’un point de vue irréfutable. Des peuples de plusieurs pays se mobilisent comme les haïtiens contre cette inflation. A la seule différence, toutefois, que les dirigeants d’autres pays cités en exemple par le dirigeant haïtien recourent à des mesures immédiates pour limiter l’impact de la flambée des cours mondiaux de certains produits de base sur la consommation alimentaire nationale.

Au Maroc (Afrique du Nord), le gouvernement ramène les taxes pesant sur les importations de blé au niveau le plus bas jamais enregistré. En Égypte, le gouvernement accroit considérablement les subventions alimentaires et signe un accord bilatéral avec le Kazakhstan pour la livraison d’un million de tonnes de blé à un prix préférentiel durant 2008. Au Bénin et au Sénégal (Afrique de l’Ouest) les gouvernements prennent plusieurs mesures pour neutraliser la forte progression des prix céréaliers, dont la réglementation des prix et la levée des droits de douane.

En Éthiopie (Afrique de l’Est) le gouvernement interdit l’exportation des principales céréales et l’accumulation de stocks céréaliers, suspend les achats locaux du Programme alimentaire mondial (PAM) destinés aux opérations d’urgence et impose une surtaxe provisoire de dix pour cent sur les importations de produits de luxe afin de financer les programmes de subventions alimentaires, notamment la distribution de blé à prix subventionnés aux ménages urbains disposant de faibles revenus. En Afrique du Sud, il est prévu d’ajuster les montants des aides sociales dont bénéficient les plus pauvres afin d’atténuer l’incidence de l’augmentation des prix alimentaires.

L’Indonésie supprime les droits d’importation sur le riz et le soja, qui s’élevaient respectivement à 5 et 10 pour cent. En République de Corée, à partir de janvier 2008 et pour six mois, les taxes d’importation sont ramenées de 1 à 0,5 pour cent pour le blé de mouture, de 1,5 à 0,5 pour cent pour le maïs, et de 2 pour cent à 0 pour le soja et le maïs fourrager. Inquiet de la montée des prix des produits alimentaires, le Japon annonce l’instauration d’un service spécial chargé de la sécurité alimentaire et prend des mesures d’urgence pour diversifier les achats sur les marchés internationaux.

Plus près de nous, le Brésil envisage de diminuer ou de supprimer la taxe de 10 pour cent frappant les importations de blé en provenance de pays autres que l’Argentine, qui bénéficie déjà d’une exemption. Au Pérou, les taxes à l’importation du blé, du maïs et de toutes les farines, qui variaient de 17 à 25 pour cent, sont abolies. ] [8]

Être ou ne pas être... néolibéral

Ces exemples nous interrogent sur le refus catégorique du chef de l’État haïtien à appliquer une politique de subvention des produits importés pour soulager la misère de la population nécessiteuse, sachant que les pays mentionnés ci-dessus sont tout aussi soumis aux prescrits des institutions financières internationales.

On s’accorde à reconnaître le caractère durable des résultats que pourraient avoir les « propositions » du président si elles étaient mises en œuvre. Cependant, nous sommes très loin d’une réponse immédiate qui correspondrait à la dimension de la colère exprimée par la population lors des récentes manifestations. Pourquoi alors, le gouvernement s’obstine-t-il à proposer des mesures dont l’impact ne peut se mesurer qu’à moyen ou long terme ?

Depuis 20 ans, l’État haïtien, comme le reconnaît le président, applique le plan néolibéral en dérèglementant le commerce et en ouvrant l’économie suivant les prescriptions du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale. Haïti a-t-il un choix ? De toutes les manières, l’aide accordée au pays a été conditionnée par la libéralisation du commerce. Toutefois, l’effet conjugué de ces politiques économiques et des mesures de libéralisation commerciale se révèle catastrophique pour les 80% d’Haïtiens qui vivent de l’agriculture. L’économie du pays se dégrade de manière significative - secteur agricole en chute libre – engendrant une dépendance croissante vis-à-vis des produits importés, notamment les produits de première nécessité.

Nous sommes bien d’accord avec le président quand il souligne que « cette politique, appliquée depuis maintenant 20 ans dans le pays, est à l’origine des problèmes actuels ». [9] Mais nous savons aussi que dans les années 1980, l’intérêt pour la promotion et la protection de la production nationale, notamment le riz de l’Artibonite, était inexistant. Dans ce sens, si le numéro 1 haïtien entend passer de la parole aux actes concernant la subvention d’une production et d’une consommation nationale, comme il se plait à le dire depuis quelques mois, des mesures transitoires consistant à alléger la faim de la population ne sauraient être comparées avec celles prises par les gouvernements civilo-militaires de la fin des années 1980.

Si le refus du président de subventionner des produits de 1ère nécessité est motivé par le respect des consignes des institutions internationales dans l’application de la politique néolibérale, comment s’y prendra-t-il pour subventionner la production nationale ? L’Organisation mondiale du commerce (OMC) n’exige-t-elle pas d’éliminer les subventions aux produits de première nécessité et d’abolir le contrôle des prix ? De quelle marge de manœuvre le chef de l’État dispose-t-il pour la mise en œuvre d’une telle politique ?

Concernant les taxes à l’importation sur les produits pétroliers, dont la réduction empêcherait au gouvernement de réaliser des travaux d’infrastructure et de fournir des services sociaux de base, il y a lieu de se poser des questions : combien de routes ont été construites, à date, avec les fonds du trésor public ? Les travaux d’infrastructure routière ne sont-ils pas majoritairement financés par la coopération internationale ? Les secteurs dits « non productifs » n’ont-ils pas été négligés par des gouvernements successifs depuis plus d’une vingtaine d’années, au cours desquelles le Fond monétaire international (FMI), la Banque mondiale et les États-Unis ont sommé nos dirigeants de réduire drastiquement leurs dépenses en santé et éducation ?

Autrement dit, le scepticisme de certains secteurs quant à une perspective de mise en œuvre réelle d’une politique de production et de consommation nationale subventionnée, est tout à fait fondé d’autant plus que le secteur agricole demeure fragile en raison de sa dépendance des aléas climatiques. De plus, avec le phénomène du changement climatique, le pays risque de connaître des inondations à répétition et de longues périodes de sécheresse, engendrant une baisse de la production agricole et entrainant ainsi un manque de nourriture.

Quelle réponse politique ?

Pour leur part, les sénateurs du groupe des 16 [10] semblent prendre une option politique en renversant le gouvernement. Mais, la réponse politique peut-elle être limitée au limogeage du Premier ministre et de son équipe ?

Les sénateurs emboitent ainsi le pas aux députés qui prétextent, en février 2008, la cherté de la vie pour interpeller le Premier ministre. Lors de cette interpellation, ce dernier annonce un ensemble de mesures visant à soulager la misère de la population, notamment l’ouverture de chantiers à haute intensité de main d’œuvre et la création d’emplois en vue de l’augmentation du pouvoir d’achat des couches les plus défavorisées.

Satisfaits des mesures de saupoudrage présentées par le chef du gouvernement, les députés donnent un vote de confiance au Premier ministre, le confortant dans la mise en œuvre de la politique néolibérale. Toutefois, ce vote de confiance est perçu par certains comme un geste intéressé, susceptible d’entacher davantage l’intégrité de cette institution, éclaboussée par des scandales de prévarication, les uns plus scandaleux que les autres : l’affaire Socabank, dans laquelle le nom de plusieurs parlementaires sont cités comme ayant accepté des pots de vin en vue de voter une résolution exigeant l’annulation de toutes les mesures prises par la Banque de la République d’Haïti (BRH) concernant la Société Caribéenne de Banque S.A. (SOCABANK) [11], l’affaire des pneus, qui est décrite dans un rapport faisant état de sommes faramineuses dépensées dans la location de véhicules et la dilapidation éhontée de pneus de rechange pour des véhicules mis à la disposition des députés et qui occasionne une vive altercation entre eux, l’affaire de drogue dans un navire naufragé à Tiburon (Sud), le bateau appartenant à un parlementaire d’après un juge d’instruction des Cayes.

Ces affaires, dont la liste n’est, bien entendu, pas exhaustive, ne sont que des exemples qui permettent de relever certaines caractéristiques de cette législature. Quand le parlement n’est pas lui-même source de conflit, il passe la majeure partie de son temps à en provoquer ailleurs en convoquant les ministres et directeurs généraux, non pas dans un esprit de contrôle, conformément à sa nature, mais plutôt pour abuser de son pouvoir, comme dans le cas de la destitution, le 31 juillet 2007, d’un ministre de la culture [12]. De plus, les parlementaires, voulant empêcher le vote d’une résolution ou d’un projet de loi pour des motifs politiques ou financiers, ne participent pas à des séances. D’autres passent leur temps à courir les ministères, les directions générales, la primature ou le palais national à la recherche d’opportunités.

En d’autres termes, si la performance du Parlement se mesure par le nombre de séances tenues, le nombre de lois votées, le nombre de traités, d’accords et de conventions ratifiés, ainsi que par la qualité des débats, le parlement haïtien ne saurait s’enorgueillir de son bilan. Il est loin d’accomplir la tâche qui est celle de faire des lois sur des objets d’intérêt public, que lui confère la constitution de 1987. Depuis plus de deux ans, le parlement a voté les lois de finances 2006-2007, 2007-2008, quelques textes de lois sur les prêts publics et sur les programmes de développement, deux lois sur l’indépendance du pouvoir judiciaire et 4 conventions internationales.

Un Parlement dont les intérêts personnels de ses membres gouvernent ses actions, peut-il soudainement changer de posture et défendre les intérêts populaires ? Peut-il s’ériger en caisse de résonance des revendications des masses sur la hausse du cout de la vie ?

Modèle de développement néolibéral a l’épreuve d’une vague de fond
A propos de ces réclamations et des mouvements qu’elles ont générés, s’il est évident que le peuple est tenaillé par la faim et qu’il revendique ses droits sociaux fondamentaux en exigeant à manger et du travail de ses dirigeants, nous ne pouvons pas affirmer que tous les manifestants et manifestantes poursuivent les mêmes objectifs lors des manifestations de début avril. Les casseurs semblent suivre un mot d’ordre de certains secteurs politiques. Les pratiques de lutte utilisées rappellent étonnamment celles que nous avons connues en 2004 après le départ de l’ex président constitutionnel d’Haïti [13].

Malgré ces contingences, l’application des programmes d’ajustement structurel à laquelle s’attelle l’État haïtien au début des années 1980 parait être l’élément fondamental de l’émergence des mouvements de contestation dans tout le pays. La privatisation selon les politiques de la Banque mondiale a conduit à une augmentation de la corruption et des gains privés au détriment des dépenses publiques, à une plus grande concentration de la richesse et du pouvoir, à un chômage plus élevé et à un accès aux services publics plus réduit. Comme le démontre la Coordination nationale de plaidoyer pour les droits des femmes (CONAP) dans sa note du 8 mars 2008, les dépenses en eau consenties par une famille dans les quartiers populaires représentent environ le 1/3 du montant du salaire minimum proposé dans un projet de loi soumis au parlement.

Ce désengagement de l’État se fait notamment au détriment des femmes qui, pour combler le vide entrainé par le retrait de l’État des services sociaux, assument les tâches y afférentes. Ainsi, les femmes, en raison des spécifiques rôles et positions que leur attribue la société, sont plus affectées par ces politiques néolibérales. Les associations féministes et de femmes qui ont commencé la mobilisation à l’occasion de la journée mondiale des femmes pour le respect des droits économiques et sociaux, (8 mars) ont donc de bonnes raisons de l’amplifier en vue de sortir des solutions cosmétiques et du saupoudrage que nous proposent nos dirigeants.

Soulignons au passage que le féminisme en tant que mouvement politique, questionne constamment les relations de pouvoir, de l’État, des institutions internationales, de la culture en relation avec les vécus quotidiens et réalités des femmes. Aujourd’hui, il est impératif pour nous, de proposer et d’impulser un modèle alternatif féministe de développement économique qui prend en compte les femmes dans tout le processus de développement. Cela requiert une rupture avec l’approche de l’intégration des femmes dans le développement s’inscrivant dans un cadre libéral à la faveur d’une approche qui se focalise sur les conditions des femmes en terme d’éducation, d’accès au crédit, aux ressources et à leur contrôle, à la technologie, aux soins de santé, des statuts légal et social, et de la position de la femme (positions économique, sociale, politique, et culturelle), enfin de tous les facteurs qui déterminent les relations de genre.

Plus globalement, c’est l’ensemble du corps social haïtien qui est affecté, à des degrés divers, de l’application des politiques néolibérales, lesquelles ont été à l’origine de nombreuses crises dans le pays. Coincé entre les dictées des bailleurs de fonds internationaux, leurs relais locaux, et les réclamations des acteurs populaires et leurs alliés, l’État se trouve entre l’enclume et le marteau. Et un changement de gouvernement ne peut en aucun cas apporter une solution durable à cette crise qui est d’ordre structurel.

La nouvelle administration haïtienne se verra confrontée à plusieurs défis, notamment la mise en œuvre de mesures de redressement de l’administration publique pour reconstituer l’État et rétablir son autorité. C’est la tâche que s’était donné le gouvernement, qui n’a même pas pu boucler le processus électoral lié à la mise en place institutionnelle.

Aucune disposition n’est prise pour le renouvellement du tiers du Sénat au début de l’année 2008. De même, l’arrêté devant porter création d’une commission interministérielle sur la décentralisation n’est jamais paru. Il s’en suit au niveau national, une absence de vision claire et détaillée du développement et la difficulté pour l’État de bien orienter ses décisions. Au niveau local, la convergence et la cohérence des interventions ne sont pas assurées et l’appui aux collectivités territoriales de base n’est pas structuré.

Or, ces éléments devraient servir de point de départ pour tout programme de développement durable. Car, le découpage territorial, en grande partie déterminé sur une base fantaisiste, est aujourd’hui inadapté aux besoins de développement et à sa gestion. Une situation qui n’est pas sans conséquence sur le choix et la localisation d’équipements, d’infrastructures et de services publics, ainsi que sur la capacité de l’état à financer leur exploitation et leur entretien.

Il est donc impératif pour la nouvelle administration d’agir à court terme afin d’assurer la mise en mouvement de tous les acteurs et toutes les actrices concernés sur des objectifs de développement partagés, tout en préparant l’avenir. Plus précisément, il faudrait la définition d’une démarche et d’une politique de développement qui favorisent l’égalité entre les sexes à toutes les étapes du processus, oblige la déconcentration territoriale, assure un financement annuel aux acteurs locaux du développement, leur permettant dès lors de mettre en valeur leurs potentiels et de lever des contraintes au développement auxquelles ils font face quotidiennement ; fixe des échéanciers de réalisation et des obligations de rendre compte des interventions réalisées.

De telles mesures et dispositions auraient comme impact la création de plusieurs milliers d’emplois annuels directs, répartis dans chacune des unités de base du pays, ce qui participera de la réduction de la pauvreté et de l’atténuation de la migration rurale. Elles faciliteraient la coordination du développement national et local, la stimulation et l’articulation du développement socioéconomique et la protection de l’environnement. Elles favoriseraient l’accroissement de l’autonomie des collectivités territoriales et la structuration de l’action territoriale de l’administration publique, la clarification des compétences ministérielles au regard des collectivités territoriales.

Il s’agit la de quelques pistes qui peuvent être explorées par la nouvelle administration, si elle veut changer de cap, par le parlement s’il veut se rattraper et se donner une raison d’exister en travaillant au un cadre légal et règlementaire en matière de développement, et par les mouvements sociaux dans leur quête d’une Haïti démocratique, juste et équitable.

Notes

[1] Jacques Édouard Alexis

[2] René Preval

[3] A la fin du mois de mars 2008, la gazoline 91 octanes se vend à 213 gourdes contre 193 gourdes 3 mois auparavant, la gazoline 95 octanes 217 gourdes contre 194 gourdes, le gallon de diesel 152 gourdes contre 119 gourdes et le galon de kérosène 151 gourdes contre 132 gourdes (1$ = 37 gourdes). Sources : Radio Métropole et Le Nouvelliste

[4] Vivre alimentaire cultivé en Haïti

[5] Source : Le Nouvelliste

[6] Déjà, en octobre 2006, un rapport de la Plate-forme Haïtienne des Organisations de Défense des Droits Humains (POHDH) tire la sonnette d’alarme : « manger et boire qui sont des besoins primordiaux sont devenus aujourd’hui un luxe pour la plus grande partie de la population, seuls les gens issus des couches aisées peuvent manger à leur faim », lit-on dans ce document. Le sujet est relancé en octobre 2007 par l’agence AlterPresse qui rappelle que « plus de la moitié de la population (actuellement environ 9,6 millions d’habitants) ne peut pas se procurer la ration alimentaire minimale de 225 Kg par année. »

[7] Lors d’une visite au Parc Industriel (site abritant les usines d’assemblages) le 7 février 2003, le président d’alors, Jean Bertrand Bertrand Aristide, annonce officiellement le relèvement du salaire minimum des ouvriers à 70 gourdes par jour contre 36 gourdes auparavant. Source : AlterPresse

[8] Source FAO : Perspectives de récoltes et situation alimentaire

[9] Bien entendu, Preval a lui aussi sa part de responsabilité dans ce naufrage. Sous sa première administration de 1996 a 2001, les démarches de privatisation d’entreprises publiques se multiplient. La minoterie et la cimenterie sont vendues et des milliers d’employés du secteur public sont forces d’accepter une retraite anticipée. Voir notre texte de février 2006 « Vive l’utopie d’une Haïti nouvelle ! », paru sur AlterPresse

[10] 16 sénateurs issus de plusieurs partis, entre autres membres de la coalition gouvernementale, lancent un ultimatum le 9 avril au Premier ministre, l’interpellent le 12 et lui infligent un vote de censure.

[11] Source : Radio Kiskeya

[12] Daniel Elie

[13] Et la, une question cruciale se pose : le mouvement social haïtien est-il condamné à ne pas organiser des actions massives par crainte d’infiltration et de récupération ? Cette interrogation met en relief la nécessité de construire le mouvement social haïtien qui, depuis le coup d’état de 1991, perd sans arrêt des plumes.