Le rapport s’étale sur 50 pages, et pas une n’est de trop pour reconstruire et analyser les événements cruciaux, le retrait unilatéral de Gaza décidé par Sharon, la sortie de celui-ci de la scène politique et la victoire du Hamas, tous deux événements survenus au cours de ses deux années de travail difficile et frustrant. Evénements qui, comme l’écrit l’envoyé de l’ONU, « ont eu une portée si vaste qu’ils ont eu une influence non seulement sur le conflit israélo-palestinien mais aussi sur toute la problématique dans la région ». Impossible, quasiment, de résumer le rapport mais les points fondamentaux, essentiels, sont les suivants. 1) Le boycott international des Palestiniens, décidé après la victoire du Hamas aux élections, démocratiques et correctes, de janvier 2006, a été « dans la meilleure des hypothèses de courte vue » et a eu « des effets dévastateurs » pour le peuple palestinien. Une position, le boycott, qui « a de fait transformé le Quartette : d’un groupe de quatre qui devait promouvoir la négociation sur la base d’un document partagé (la Feuille de route pour la paix) en un organisme qui n’a fait qu’imposer des sanctions contre le gouvernement librement élu d’un peuple sous occupation, et imposé au dialogue des conditions préalables inatteignables ». 2) Israël s’est enfermé dans « une position de rejet massif » dans la tractation avec les Palestiniens « en insistant sur des conditions préalables qui, il devait le savoir, n’étaient pas soutenables ». 3) Le Quartette, d’organisme négociateur est devenu un « événement secondaire ». 4) L’action palestinienne à fin d’arrêter les violences contre Israël est « dans la meilleure des hypothèses peu efficace, au pire répréhensible ».
Le rapport était adressé à quelques seniors du cercle restreint interne à l’Onu ; mais De Soto fait en tout cas preuve de courage quand, sans mâcher ses mots, il condamne l’influence dominante exercée par les Etats-Unis et « la tendance à l’autocensure qui en découle » à l’intérieur des Nations Unies, quand il s’agit de critiquer Israël. Dans sa reconstruction des événements, l’envoyé de l’Onu révèle qu’après avoir gagné les élections, le Hamas aurait voulu former un gouvernement de coalition avec ses rivaux modérés, Fatah compris. Mais les Etats-Unis dissuadèrent les autres politiciens palestiniens de se joindre à l’initiative. « On nous expliqua, écrit De Soto, que les Usa étaient opposés à brouiller la ligne qui divisait le Hamas de ces forces politiques qui étaient engagées dans la solution de deux Etats-deux peuples ». Le gouvernement de coalition se forma un an après, mais on avait perdu des mois pendant lesquels la situation s’était détériorée.
Mais si l’action très partiale des Etats-Unis était archiconnue, c’est sur le Quartette et sa raison d’être et d’agir que l’ex envoyé, frustré dans tous ses efforts d’initiatives par des lignes directrices qui ne lui permettaient pas de rencontrer l’Autorité palestinienne, et l’empêchaient de parler avec la Syrie, a posé une pierre tombale définitive.
« Des gens raisonnables peuvent ne pas être d’accord avec mon opinion que le Quartette, de fait si ce n’est de droit, est plus un groupe d’amis des Etats-Unis qu’autre chose. Mais on peut facilement le prouver ». Quand les Usa appuyèrent la décision d’Israël de confisquer les taxes douanières des Palestiniens, « on interdit au Quartette de prendre position à ce sujet ». Quant à l’Onu « il y règne une sorte de réflexe conditionné, pour toute situation où l’Onu doit se prononcer, de se demander d’abord comment Israël et les Etats-Unis réagiront plutôt que de réfléchir sur quelle proposition il est plus juste de prendre ».
Le rapport critique aussi les Palestiniens pour leur violence mais affirme que les politiques israéliens ont encouragé l’activisme du front opposé. « Je me demande si les autorités israéliennes se rendent compte que, saison après saison, ils récoltent ce qu’ils ont semé ».
Edition de jeudi 14 juin 2007 de il manifesto
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio