Une crise politique inattendue secoue le Niger, petit pays de l’Afrique sahélienne. Le gouvernement du premier ministre Hama Amadou a été renversé par une motion de censure au parlement le 31 mai 2007. La mouvance présidentielle dispose pourtant de 88 sièges sur 133 depuis les élections du 4 décembre 2004. La défiance, votée à une large majorité, porte sur une affaire de détournement de fonds au ministère de l’éducation en 2005. Ce scandale avait déjà conduit à la destitution de deux ministres, MM. Harouna Hamani et Ary Ibrahim, en juin 2006, puis à leur mise en examen par le Parlement.
Le président du Niger, M. Mamadou Tandja a, le 3 juin, nommé M. Seyni Oumarou, un proche de l’ancien chef du gouvernement, au poste de premier ministre. Il a préféré cette solution à la dissolution de l’assemblée. Le Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS), principale formation de l’opposition, a rejeté cette nomination : « Nous ne sommes pas d’accord avec cette nomination, nous ne pouvons la cautionner, car il [M. Oumarou] est aussi soupçonné d’être mêlé au détournement des fonds destinés à l’éducation », a déclaré M. Sani Iro, un porte-parole du PNDS.
Selon l’indice de développement humain de l’ONU, le Niger est le pays le plus pauvre du monde. L’espérance de vie y est de 44 ans et seuls 14 % des adultes nigériens savent lire et écrire. L’Etat se trouve de facto sous la tutelle des organisations financières internationales et son président, M. Tandja, n’a jamais manifesté l’intention de desserrer cet étau. Cette situation incite à l’émigration, notamment de cadres : « Dans certains domaines, le Niger a perdu tous ses experts, expliquait au Monde diplomatique le Dr Abdoulaye Bagnou, coordinateur du cabinet de l’ancien premier ministre du Niger. Nous ne savons plus comment choisir les équipements. Nous avons des difficultés pour planifier et ne pouvons obtenir les conseils des techniciens nigériens. Et il nous est impossible de recruter du personnel nouveau. La Banque mondiale et le FMI [Fonds monétaire international] contrôlent nos dépenses. »
Paradoxe : avec le renversement surprise de son gouvernement, le Niger, petit pays dont on entend rarement parler sauf pour ses famines récurrentes et son problème avec les Touaregs, donne une exemple de démocratie (à quand remonte le dernier gouvernement renversé par le Parlement en France ?) et de lutte contre la corruption. Evidemment, les calculs politiciens ne sont certainement pas absents de l’attitude de l’opposition. Mais tout de même…