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ÉTATS-UNIS

Plan de sauvetage bancaire : ce que Wall Street espérait gagner

Jeudi 2 octobre 2008, par Pam Martens - Counterpunch

“J’ai beaucoup de types qui ont un doctorat et des gens futés autour de moi qui viennent au bureau ovale et qui disent : ‘M. le Président, voici ce que j’ai en tête’. Et j’écoute attentivement leurs conseils. Mais ayant rassemblé le dispositif (sic), je décide, vous savez, je dis : ‘Voilà ce que nous allons faire’. Et c’est : ‘Oui, Monsieur le Président’. Et ensuite, nous suivons et exécutons cette politique." - Président George W. Bush, 3 octobre 2007

Anxiété à Wall Street avant de savoir si les contribuables américains vont racheter ou non les dettes des spéculateurs...Pauvre Président Bush ! Il a été mis de côté en tant que Décideur. La démarche orgueilleuse du Décideur et son entourage médiatique, de même que les coffres des Etats-Unis, devaient être remis à Henry M. (Hank) Paulson, le Secrétaire au Trésor, qui aurait eu une autorité considérable sur le partage avec ses petits copains de Wall Street d’un nouveau butin accru et sur l’installation d’une nouvelle et vaste démocratie de la subvention, aux dépens du contribuable.

Mais il se pourrait bien que la Maison du Peuple ait écouté le peuple. La Chambre des Représentants a voté lundi pour rejeter la mesure de subvention, par 228 voix contre 205.

Quel beau message orwellien cette proposition aurait envoyé aux enfants de notre nation et aux honnêtes travailleurs : pillez et écroulez un système financier vieux de 200 ans et vous recevrez en récompense 700 milliards de dollars d’argent frais du contribuable à partager entre vos petits copains complices de cet effondrement !

Jusqu’à sa prestation de serment, le 10 juillet 2006, en tant que Secrétaire au Trésor, M. Paulson était le président directeur général de Goldman Sachs. Les instruments exotiques créés par Goldman et colportés dans le monde entier, lorsque M. Paulson était le Décideur de Goldman, ont contribué à cet effondrement. Son ancienne firme a aussi bénéficié de dizaines de milliards de dollars du contribuable déjà distribués par la Réserve Fédérale. D’autres firmes, comme Merrill Kynch et Citigroup/Smith Barney, qui ont cassé les reins de Fannie Mae et de Freddie Mac en leur vendant des milliards de dérivés explosifs, ont également vu leurs anciens directeurs exécutifs nommés à des postes en or dans cette mission de "sauvetage".

Et attendez-vous dans les jours à venir à ce que cette proposition de subvention soit encore plus corrompue. (Cette proposition me rappelle cette couverture de BusinessWeek, du 13 mai 2002, posant cette question à propos de Wall Street : "A quel point [Wall Street] est-il corrompu ?" Ils répondaient à leur propre question avec une photo géante représentant un serpent enlaçant le poteau métallique signalant Wall Street. La proposition de subvention était si vague que lorsque j’ai lu ses 106 pages sur le site internet de CNNMoney, dimanche soir, le 28 septembre 2008, l’écran est devenu blanc à 19h59. Quelques minutes plus tard, je lisais une version différente de cette proposition, qui faisait désormais 110 pages. Heureusement, j’avais imprimé une copie de la première version et je l’ai comparée ligne à ligne pour comprendre ce que préparaient les banquiers-gangsters.

Particulièrement intéressant, en page 6, où, auparavant, le nouveau Bureau de Stabilité Financière [Office of Financial Stability] serait dirigé par un Secrétaire-Adjoint au Trésor nécessitant l’approbation du Sénat, 16 mots supplémentaires avaient été ajoutés à la phrase : "sauf qu’un Secrétaire-Adjoint intérimaire peut remplir cette fonction en attendant la confirmation par le Sénat."

En réalité, tout ce dont ils avaient besoin était d’envoyer continuellement des candidats en conflit avec le Sénat, et des milliards de dollars pouvaient être dépensés avant que le Sénat approuve et confirme un candidat. Un autre changement, en pages 14 et 15, concernait la manière dont le Décideur serait contrôlé : auparavant, il était dit ‘toute action’ prise par le Secrétaire au Trésor peut être examinée. Cela a été changé en ‘la politique’.

Dans la première version, les soupçons de fraude devaient être rapportés à l’Inspecteur Général du Département du Trésor. Cela a été complètement modifié pour créer un poste entièrement nouveau d’ "Inspecteur Général Spécial au Programme de Sauvetage des Actifs à Problème". (Je pense que tout le monde comprend que ce poste aurait été pourvu par un autre petit copain de Wall Street.)

Mais l’aspect le plus fourbe et le plus effrayant de ce plan, comme toujours, se trouvait enfoui aux fins fonds du document, situé là, dans l’espoir que tout le monde serait endormi par le jargon juridique avant d’arriver aussi loin. Dans les deux versions, il y a la Section 128, qui paraît inoffensive. Elle dit simplement : "La Section 203 du Financial Services Regulatory Relief Act of 2006 [la loi de régulation du sauvetage des services financiers de 2006] est amendée, ‘le 1er octobre 2011’ est remplacé par ‘le 1er octobre 2008’."

Quelle aurait été le résultat effectif ? D’avancer la promulgation de cette section de la loi à cette semaine.

Et quel aurait été l’impact de la modification de cette loi ? (Prenez un moment pour intégrer ceci.) Cette merveilleuse proposition bipartite de subvention, négociée aux petites heures du matin par des parlementaires privés de sommeil, était conçue pour arriver avec un Cheval de Troie furtif, incorporé par les avocats de Wall Street. Les banques déjà en difficulté, par manque de capital, auraient pu détenir un capital de "zéro" pour leurs transactions.

Et cela résout un énorme mystère. Tout Wall Street a essayé de comprendre pourquoi des firmes comme Goldman Sachs et Morgan Stanley, qui se sont concentrées sur les fusions, les acquisitions, les souscriptions d’actions et d’obligations pendant plus de 212 ans cumulés à elles deux, ont décidé dans la douleur d’entrer dans le vieux monde de la banque de détail et de se transformer en société de holding bancaire. (C’est comme demander à General Motors de se restructurer du jour au lendemain en fabricant de machines à laver.) A présent, nous savons. Si cette proposition de subvention avait été votée sous sa forme actuelle. Ces firmes auraient eu cette semaine un nouveau meilleur ami à la FED, qui leur aurait permis de détenir zéro réserves pour leurs transactions. Il ne faut pas s’étonner si les actions de ces deux firmes ont été vendues massivement hier, lorsque le Congrès a rejeté ce plan : Goldman a clôturé à moins 12% et Morgan à moins 15%.

Ce Cheval de Troie dans ce plan de subvention résout également un autre mystère. Pourquoi Citigroup, banque corrompue jusqu’à la moelle, criblée de pertes, dirigée à présent par l’ancien patron d’un fond spéculatif, a-t-elle été autorisée lundi par le FDIC [société fédérale de garantie des dépôts bancaires] à acheter 400 milliards des dépôts de la banque Wacovia, donnant à ce tyran mondial désemparé 30% des dépôts bancaires garantis en Amérique ?

Pour une fois, nous pouvons être fiers d’au moins 228 de nos parlementaires. Oui, nous avons besoin d’une action rapide et raisonnée pour éviter un effondrement financier. Mais un plan qui permet à un seul homme d’accéder sans entraves à 700 milliards de dollars du contribuable, de décider quelles firmes survivront, de concentrer potentiellement le pouvoir entre les mains de quelques copains, tout en repoussant le débat de la régulation vitale à l’année prochaine, n’est pas un plan. C’est un crime organisé finement déguisé en législation.

* Pam Martens a travaillé sur Wall Street pendant 21 ans. Elle n’a aucune action ou titres des sociétés mentionnées dans cet article. Elle écrit sur des questions d’intérêt public depuis le New Hampshire.

1° octobre 2008 - Counterpunch - Vous pouvez consulter cet article à :
http://counterpunch.org/martens0930...
Traduit de l’anglais par JFG-QuestionsCritiques