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PALESTINE

Nouvelle crise entre Hamas et l’Autorité palestinienne

Vendredi 15 février 2008, par Abdallah Al-Achaal

A la lumière du plan d’extermination israélien à Gaza, les Palestiniens peuvent dévaster à tout moment les frontières avec l’Egypte.

Le différend entre le Hamas et l’Autorité palestinienne autour des points de passage vers l’Egypte est l’un des aspects de leur conflit. Il ne s’agit pas d’un conflit de pouvoir, mais d’un différend idéologique. Le Hamas opte pour l’idéologie de la résistance et l’Autorité pour celle des négociations. Le Hamas estime que toute la Palestine est la propriété des Palestiniens, y compris les territoires sur lesquels est instauré l’Etat hébreu. C’est son droit et c’est tout à fait juste. L’Autorité palestinienne, bien qu’elle reconnaisse ce droit, juge que la réalité l’oblige à obtenir ce qui est possible au lieu de courir derrière l’impossible, du moins dans un avenir proche.

L’Autorité palestinienne estime aussi qu’elle doit parler un langage connu par la communauté internationale. Cela afin qu’Israël ne prétende pas qu’il n’y a pas de partenaire palestinien avec lequel il peut négocier. En effet, l’Autorité sait très bien qu’Israël n’acceptera pas une partie qui s’oppose constamment à lui et impose constamment des demandes. Israël veut une partie qui ressent de la gratitude pour la simple raison qu’Olmert a accepté de la rencontrer.

Dans ce contexte, nous n’avons pas besoin de répéter qu’Israël accepte désormais Abou-Mazen depuis qu’il refuse la résistance et qu’il préfère parler de résistance pacifique non armée. Ces différends idéologiques ont eu de fâcheuses répercussions sur la scène palestinienne. Le différend autour des points de passage vers l’Egypte a dévoilé l’acuité de la crise entre le Hamas et l’Autorité palestinienne. Il est venu accroître les souffrances du peuple palestinien, sans oublier ses répercussions dangereuses sur l’Egypte. Le peuple palestinien a le droit de franchir librement les frontières égyptiennes dans les deux sens, selon un accord conclu entre les parties palestinienne et égyptienne. Cependant, la crise des passages vers l’Egypte a dévoilé d’étranges réalités. Tout d’abord, Israël ne veut pas que ce peuple sorte de Gaza afin que son plan d’extermination aboutisse. De plus, le fait que l’Egypte lui permette d’entrer dans ses territoires pour obtenir des biens de consommation élémentaires a irrité Israël, qui a considéré la gestion des passages comme une question sécuritaire.

Les pays arabes et Abou-Mazen ont dénié le droit du peuple palestinien à la résistance. Il était donc tout à fait naturel que l’Egypte et la Jordanie deviennent deux domaines stratégiques et la véritable profondeur de la résistance palestinienne. Il était aussi tout à fait naturel que l’Egypte menace Israël et lui impose un choix : soit qu’Israël montre son sérieux dans les négociations et dans la véritable volonté de parvenir à un règlement, soit que l’Egypte se trouve obligée de soutenir la résistance. Cet acte n’est nullement considéré comme une violation du traité de paix auquel l’Egypte est très sensible tandis qu’Israël n’y accorde aucun intérêt ni ne le considère comme un engagement si celui-ci s’oppose à sa liberté de mouvement.

Abou-Mazen insiste qu’il est la partie légitime qui assume la responsabilité des passages vers l’Egypte et qu’il les gère selon l’accord des passages de 2005. Il insiste aussi sur le fait que le Hamas est une organisation terroriste et une autorité qui conspire contre le régime et qu’il ne faut pas coopérer avec elle. Quand les pays arabes acceptent ces hypothèses, cela signifie que le Hamas est devenu l’ennemi d’Israël et celui d’Abou-Mazen. C’est d’ailleurs l’hypothèse sur laquelle se basent les relations entre Israël et l’Autorité palestinienne. Prétendre que renoncer à l’ancien accord abolit les engagements d’Israël est insensé car Israël se retournera contre l’Autorité palestinienne si jamais il parvient à un accord avec le Hamas ou même s’il se rapproche de lui. Tenir à l’ancien accord signifie empêcher le Hamas et ses membres de bénéficier des passages. Cela car l’accord octroie à l’Autorité le droit de gérer les passages selon les critères d’Israël afin qu’il semble que le passage est géré par l’Autorité seulement. Cependant, l’échéance de cet accord a pris fin en novembre 2007. L’accord a même pris fin pratiquement le 14 juin 2007 lorsque l’Autorité a perdu son pouvoir sur Gaza qui est tombée sous la domination du Hamas. Un vide juridique est alors apparu. Celui-ci a impliqué un nouvel accord qui prendrait en considération trois nouvelles réalités.

La première réalité est qu’Abou-Mazen et Israël adoptent la même position contre le Hamas. Il est donc indispensable que le Hamas et Abou-Mazen adoptent une même position loin d’Israël, car ce dernier demeure toujours le pays occupant bien qu’il se soit retiré de Gaza.

La deuxième réalité est que le Hamas a acquis une légitimité politique dans le régime politique palestinien grâce aux élections législatives. Partant, ce sont les comportements anticonstitutionnels d’Abou-Mazen et ceux d’Israël, ce dernier a maudit les Palestiniens à cause de leur choix démocratique et a emprisonné les ministres et les députés du Hamas, qui ont avorté la première expérience démocratique palestinienne. Mais Abou-Mazen ne peut invoquer une légitimité plus grande que celle du Hamas : en effet, il sait très bien que le différend entre le Hamas et lui-même ne porte pas sur la part de légitimité de chacun d’eux, mais plutôt sur son choix du clan israélien.

La troisième réalité est que le Hamas domine Gaza à travers son conflit avec l’Autorité. Il est vrai que la reconnaissance du Hamas aboutira à davantage de déchirement de la scène palestinienne. Cependant, il est impossible d’octroyer l’exclusivité de la gestion des passages à l’un des deux clans. A ce sujet, l’Autorité représente l’autre face d’Israël bien que ce dernier prétende qu’il n’a aucune relation avec Gaza. D’autre part, la gestion des passages par le Hamas signifie la mise à l’écart de l’Autorité. Ce qui est impossible. C’est la raison pour laquelle le président Moubarak a voulu créer un dialogue entre les deux parties, ou du moins obtenir un accord minimum sur les passages. C’est pourquoi il semble que le refus d’Abou-Mazen du Hamas, de son rôle et de sa position envers les passages ainsi que le retour à l’ancien accord semble illogique et élargit le fossé entre les Palestiniens.

Le plus dangereux est que le passage est désormais bloqué. A la lumière du plan d’extermination israélien à Gaza, les Palestiniens peuvent dévaster à tout moment les frontières avec l’Egypte. Ceci complique la position de l’Egypte avec Israël et le Hamas. C’est la principale raison pour laquelle l’Egypte insiste sur la nécessité de parvenir à un accord acceptable pour les deux parties palestiniennes. Les droits politiques du peuple palestinien peuvent se perdre entre le Hamas et l’Autorité. Ce peuple a le droit de choisir entre la voie de la résistance avec le Hamas et celle du renoncement aux droits sans contrepartie avec Abou-Mazen. Il devra exprimer librement ce choix lors d’un référendum national transparent. Et cette fois-ci, le monde devra, sans équivoque, respecter son choix.

Al Ahram - Semaine du 13 au 19 Février 2008, numéro 701 (Opinion)