« L’escalade en Irak ? sens interdit », proclamaient plusieurs banderoles, tandis que des milliers de manifestants entonnaient le slogan « ramenez les troupes maintenant ! » Une vingtaine de milliers de premiers manifestants étaient déjà rassemblés à la mi-journée sur la grande esplanade au pied du Capitole, le bâtiment abritant le Congrès, pour entendre notamment des parlementaires et l’actrice Jane Fonda, l’égérie de la mobilisation contre la guerre du Vietnam il y a 35 ans, tentait de relancer un mouvement pacifiste qui avait semblé à bout de souffle ces dernier mois.
Pour la première fois, les slogans étaient moins adressés au président George W. Bush, « qui se fiche vraiment de ce que pensent les Américains », mais au Congrès, « qui a le pouvoir de mettre fin à cette guerre », avait expliqué à l’AFP un porte-parole de l’association, Hany Khalil, à la veille de la manifestation.
Pour Len Singer, 74 ans, qui a parcouru quelque 300 kilomètres pour se rendre à Washington, il était important de manifester dès le début de la nouvelle majorité démocrate, élue en novembre au terme d’une campagne largement dominée par la guerre en Irak.
« Si les démocrates gaspillent cette occasion, ils ne saisiront jamais l’occasion de couper les fonds de la guerre, ni de destituer (le vice-président Dick) Cheney et (le président George W.) Bush », a-t-il insisté. Les manifestants s’efforçaient de faire signer une pétition appelant le Congrès à "voter le retrait immédiat de toutes les forces américaines en Irak", « voter contre toute enveloppe budgétaire finançant la moindre action militaire en Irak, à l’exception du retrait en sécurité de tous nos militaires », « voter une aide à la reconstruction de l’Irak sous le contrôle irakien », et « voter pour la réorientation de l’argent des contribuables pour les programmes sociaux » aux Etats-Unis.
Cette manifestation intervient alors que le Sénat pourrait voter dans une dizaine de jours une ou plusieurs résolutions non contraignantes dénonçant la nouvelle stratégie annoncée par le président Bush le 10 janvier, passant par le déploiement de 21 500 militaires supplémentaires.
« Des résolutions non contraignantes, c’est bien, mais ça ne suffit pas », a lancé Medea Benjamin, fondatrice de l’organisation CodePink : Women for Peace (les femmes pour la paix).
L’état-major démocrate a cependant exclu de couper les fonds de la guerre, de peur d’aggraver encore les dangers qu’affrontent les militaires sur le terrain.
En revanche, plusieurs candidats démocrates à l’investiture démocrate pour la présidentielle ont annoncé des initiatives pour forcer l’administration à plafonner les effectifs militaires en Irak à leur niveau du début de l’année, en exigeant l’autorisation explicite du Congrès pour tout déploiement supplémentaire.
Mais pour l’instant, seule une résolution non contraignante semble avoir des chances d’être adoptée, en tous cas par le Sénat, vu l’étroitesse de la majorité démocrate.
Un nombre croissant d’élus républicains, y compris des caciques, ont exprimé leur défiance envers la conduite de la guerre, mais aucun n’a encore proposé de texte contraignant pour forcer la fin de la guerre.
La mobilisation, sous un froid soleil, semblait en passe de devenir la plus réussie depuis la dernière manifestation de force des antiguerre en septembre 2005. Le collectif United for peace and justice (Unis pour la paix et la justice) avait déjà rassemblé alors de 100.000 à 300.000 personnes à Washington en septembre 2005.