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COLOMBIE

La Paix Romaine

Mardi 8 juillet 2008, par Fidel Castro Ruz

Les faits que j’ai utilisés ont été pris fondamentalement dans les déclarations de l’ambassadeur des Etats-Unis en Colombie, William Brownfield, la presse et la télévision de ce pays, la presse internationale et d’autres sources. Le déploiement des technologies et de ressources économiques utilisées est impressionnant. Pendant que les officiers supérieurs de Colombie faisaient tout leur possible pour faire croire que l’opération de sauvetage d’Ingrid Bétancourt avait été entièrement colombienne, les autorités des Etats-Unis déclaraient que « elle avait été le résultat d’années d’intense coopération militaire entre les armées de Colombie et des Etats- Unis. »

« La vérité est que nous avons réussi à nous harmoniser d’une manière qui a été rarement atteinte aux Etats-Unis, sauf avec nos anciens alliés, principalement de l’OTAN, a dit Bomnfield en se référant aux relations avec les forces de sécurité colombiennes qui ont reçu plus de 4 000 millions de dollars d’assistance militaire depuis l’an 2 000. »

« ...En diverses occasions, le gouvernement des Etats-Unis a dû prendre des décisions au plus haut niveau pour cette opération.

Les satellites espions étasuniens ont aidé à situer les otages pendant une période d’un mois commencée au 31 mai et qui s’est terminée par le sauvetage de mercredi. Les colombiens ont installé des équipes de vidéo surveillance fournies par les Etats-Unis qui peuvent zoomer et prendre des vues panoramiques télécommandées le long des fleuves qui sont l’unique voie de transport dans ces zones de forêt dense, ont indiqué les autorités colombiennes et étasuniennes.

Les avions nord-américains de reconnaissance ont intercepté des conversations des rebelles par radio et téléphone par satellite et ont employé des images qui peuvent traverser le feuillage de la forêt.

Le déserteur recevra une somme considérable, d’environ 100 millions de dollars, que le gouvernement avait offerte comme récompense, a déclaré le commandant en chef de l’armée colombienne. »

Le mercredi 1er juillet, la BBC de Londres a annoncé que César Mauricio Velasquez, secrétaire de presse de la Résidence Nariño informa que les délégués de France et de Suisse avaient eu une réunion avec Alfonso Cano, chef des FARC.

Selon la BBC, ce serait le premier contact que le nouveau chef aurait accepté avec les délégués internationaux après la mort de Manuel Marulanda. La fausse information sur la réunion de deux émissaires européens avec Cano avait été transmise depuis Bogota. Le chef des FARC disparu était né le 12 mai 1932, selon le témoignage de son père. Paysan libéral pauvre, partisan de Gaïtan, il commença sa résistance armée voilà soixante ans. Il fut guérillero avant nous, en réaction devant les tueries de paysans perpétrées par l’oligarchie.

Le Parti Communiste « où il est entré plus tard » comme tous ceux d’Amérique Latine, était sous l’influence du Parti Communiste d’URSS et non pas de celui de Cuba. Ils étaient solidaires avec notre Révolution mais non subordonnés à elle. Ce furent les narco-trafiquants et non les FARC qui répandirent la terreur dans ce pays frère dans leur lutte pour le marché des Etats-Unis, faisant éclater non seulement de puissantes bombes mais aussi des camions chargés de plastique explosif qui détruisirent les installations, blessèrent et tuèrent un nombre inclaculable de personnes.

Jamais le Parti Communiste de Colombie ne voulut conquérir le pouvoir par les armes. La guérilla était un front de résistance non l’instrument fondamental de la conquête du pouvoir révolutionnaire, comme cela est arrivé à Cuba. En 1993, lors de la huitième conférence des FARC, il fut décidé de rompre avec le Parti Communiste. Son chef, Manuel Marulanda, assuma la direction des guérillas de ce Parti qui se sont toujours distinguées par un sectarisme hermétique pour l’admission de combattants et les méthodes musclées et compartimentées de commandement. Marulanda , d’une grande intelligence naturelle et possédant des dons de dirigeant, n’eut pas , par contre, l’opportunité d’étudier lorsqu’il était adolescent. On dit qu’il a pu suivre des cours seulement jusqu’au cinquième degré. Il prévoyait une lutte longue et prolongée, point de vue que je ne partageais pas. Jamais je n’eus la possibilité de discuter avec lui.

Les FARC eurent des forces considérables et dépassèrent les 10 000 combattants. Plusieurs naquirent pendant la guerre elle-même et ne connurent rien d’autre. D’autres organisations de gauche rivalisèrent avec les FARC dans la lutte. Déjà alors le territoire colombien était devenu la plus grande source de production de cocaïne dans le monde. La violence extrême, les prises d’otages, les impôts et les exigences envers les producteurs de drogue se généralisèrent.

Les forces paramilitaires armées par l’oligarchie dont les effectifs se nourrissaient de l’énorme quantité de recrues qui s’engageaient dans les forces armées du pays et étaient démobilisés chaque année sans emploi assuré, créèrent en Colombie une situation si complexe qu’il n’y avait qu’une porte de sortie : la paix véritable quoique lointaine et difficile, comme beaucoup d’autres but de l’humanité. L’option que Cuba a défendue dans ce pays pendant trois décennies. Pendant que les journalistes cubains discutent, dans leur huitième Congrès, sur les nouvelles technologies de l’information, des principes et de l’éthique des communicateurs sociaux, moi, je méditais sur les faits signalés.

J’exprimai avec clarté notre position en faveur de la paix en Colombie mais nous ne sommes pas pour l’intervention militaire étrangère ni pour l’emploi de la force, que les Etats-Unis prétendent imposer à tout prix à ce peuple travailleur et malheureux. J’ai critiqué avec énergie et franchise les méthodes objectivement cruelles de la prise d’otages et de la rétention de prisonniers dans les conditions de la forêt. Mais je ne suggère à personne de déposer les armes car dans les derniers cinquante ans ceux qui le firent n’ont pas survécu à la paix. Si j’ose suggérer quelque chose aux guérilleros des FARC, c’est simplement de déclarer, par n’importe quelle voie, à la Croix Rouge Internationale, leur disposition à libérer les otages et les prisonniers qui sont encore en leur pouvoir, sans aucune condition. Je ne prétends pas être écouté, je crois simplement devoir dire ce que je pense. N’importe quelle autre conduite servirait seulement à donner une prime à la déloyauté et à la trahison.

Jamais je n’appuierai la paix romaine que l’empire prétend imposer en Amérique Latine.

Fidel Castro Ruz 5 juillet 2008