Et voilà que les USA et l’Union européenne bougent enfin à propos des événements de Gaza. Ils soutiennent le président Abou Mazen dans ses décisions de dissoudre le gouvernement d’Union nationale et de provoquer de nouvelles élections législatives.
Je mets de côté ici la question de « l’état d’urgence » qu’il a décrété car pour qu’il existe réellement, faudrait-il encore et d’abord qu’il y ait un Etat. L’urgence en l’espèce c’est d’abord d’avoir un Etat palestinien. On en est loin...
Je reviens donc aux soutiens américano-européens adressés rapidement hier soir au président palestinien.
Ils se félicitent donc qu’il soit mis fin au gouvernement d’Union nationale résultant de l’Accord de La Mecque. Pourquoi ce soulagement ? Cet accord incluait pourtant et de manière formelle les trois conditions posées par le Quartette, en particulier le fait que le Hamas reconnaisse Israël et les résolutions internationales pertinentes.
Les Européens se sont officiellement réjouis de cet accord ainsi que de la mise en place de ce type de gouvernement qu’ils réclamaient à cor et à cri. A cela est venu s’ajouter le Plan de paix arabe, suite à la réunion de Riyad, dont tout le monde s’est félicité. Mais les occidentaux et Israël n’ont pas levé pour autant les sanctions ni reconnu le gouvernement d’Union en son entier. Ils ont reconnu (incroyable mais vrai) certains de ses membres dont la présence au gouvernement avait d’ailleurs été fortement suggérée par les USA.
Accord de La Mecque et Plan de paix arabe, tout était en place pour, non seulement lever les sanctions et reconnaître le gouvernement, mais aussi pour entamer enfin un processus de discussion politique débouchant sur un accord global de paix. Tout était prêt pour avancer vers la paix. Tout était prêt sauf si on ne veut pas la paix ! Et pas plus l’Occident qu’Israël ne veut la paix.
Il faut avoir cela absolument présent en tête, toujours, sinon on ne comprend rien à ce qui se passe au Proche-Orient. Je répète : ils ne veulent pas la paix. Ce n’est pas un présupposé, c’est un fait que je viens de démontrer rapidement à propos des derniers événements mais c’est surtout un fait historique.
Cela fait 40 ans que l’occupation israélienne dure et s’accroît en même temps que des résolutions votées par le Conseil de sécurité n’ont jamais été appliquées. Cela fait 40 ans, et rien ne peut arrêter la guerre et l’expansion israélienne ? On se moque de qui ? A quoi sert le chapitre VII de la Charte des Nations unies dont on se sert partout (récemment encore au Liban), sauf à l’encontre d’Israël qui bénéficie d’une totale impunité. De qui se moque-t-on quand on sait que le territoire dont il est question n’est pas plus grand que la région Bretagne. Et la « communauté internationale » ne pourrait pas y imposer la paix ?
Le soutien occidental ostensible affiché en faveur du président Abou Mazen suite à ses décisions d’hier soir est à inscrire dans cette vérité première.
Pourquoi ? Pour deux raisons : la première c’est que la fin du gouvernement d’Union signe cruellement la fin de l’union du peuple palestinien dont les événements de Gaza ont été un moteur voulu et, deuxièmement parce que, à supposer que le Fatah remporte les élections, il n’en restera pas moins que le Hamas vivra, dégagé par contre de toute responsabilité. Conclusion : il pourra reprendre le type d’actions dont il est coutumier.
Et que diront alors Occidentaux et les Israéliens ? On ne peut pas négocier dans pareilles conditions ! Retour à la case départ. En plus grave, cette fois.
C’est pourquoi je ne m’inscris absolument pas dans ce concert de louanges à l’endroit des décisions prises hier soir. Elles sont dangereuses. Très dangereuses pour le peuple palestinien et plus généralement.
Les louanges déversées ne sont que « baiser de Judas ».
Qui ne le voit ne veut pas le voir.
Cela démontre aussi un autre point : l’Union européenne est complètement assujettie aux USA et à Israël. Elle n’a aucune politique propre (aux deux sens du terme). Elle est du côté de ceux qui ne veulent pas la paix. Le Conseil des Affaires générales et Relations extérieures qui doit se tenir la semaine prochaine abordera-t-il seulement cette question ? Quand on est aux ordres de Washington on attend la voix du maître.
Il faut que monte cette idée simple : si les Occidentaux et Israël voulaient la paix sur la base du droit international, il y a longtemps que cela serait fait. Ils ne veulent pas la paix. Et les écouter ou répondre à leurs « suggestions » n’est qu’aveuglement.
Il faut aussi, dès lors, que monte cette seconde idée simple : l’Union européenne - et la France - doivent jouer un rôle politique au Proche-Orient qui aide à la paix et qui la permette.
40 ans ça suffit ! A nous de prendre à bras le corps le droit et la justice, la paix et la morale ! Le conflit du Proche-Orient c’est le Vietnam de notre époque. Nous, les peuples, avons contraint à la paix au Vietnam. Nous devons contraindre à la paix au Proche-Orient. Nos sommes tous des Palestiniens !
Jean-Claude Lefort Député du Val-de-Marne Le 15 juin 2007