Entendu comme « mouvement de mouvements » de tous les continents formulant une nouvelle solidarité Nord / Sud, il s’est construit dans les années 1990 contre la mondialisation néolibérale, lorsqu’il a fallu identifier et nommer la stabilisation d’une nouvelle phase historique du développement du capitalisme caractérisée par la domination de la finance, la marchandisation de toutes les activités humaines et l’internationalisation des forces du capital.
Une phase en réalité bien antérieure. On peut commencer à l’identifier à partir de la fin des années 1970 et l’incarner à travers l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher au Royaume-Uni en 1979 et de Ronald Reagan aux Etats-Unis en 1981. Elle s’est ensuite accélérée avec la chute du mur de Berlin en 1989 et celle de l’URSS en 1991, lorsque le capitalisme s’est retrouvé face à lui-même et à sa prétention destructrice.
En même temps qu’il la nommait, le mouvement altermondialiste a contesté cette mondialisation néolibérale. Des organisations comme Attac France, puis les autres Attac (une cinquantaine aujourd’hui dans le monde), se sont constituées à partir de 1998 pour porter cette dénonciation publiquement et faire des propositions pour « un autre monde ». De son côté, l’emblématique mobilisation internationale de Seattle en 1999 (où se sont retrouvés syndicats, ONG, associations, mouvements sociaux, etc.) à l’occasion de la Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a posé un acte, d’une certaine manière, fondateur. Pour la première fois, des associations et des organisations du monde entier, conscientes des méfaits causés par les prétentions des maîtres du monde, empêchèrent le bon déroulement d’une réunion d’une institution du capitalisme mondial.
Le début des années 2000 sera donc marqué par une nouvelle forme de contestation internationale du capitalisme visant ses institutions et ses espaces de visibilité planétaires (FMI, Banque mondiale, OMC, OCDE, Davos, G8, etc.). La réaction de l’ordre dominant saura être violente. La réunion du G8 à Gênes en juillet 2001 (précédée par celle du Conseil européen à Göteborg en juin) et ses violences policières contre les militants altermondialistes indiquera une stratégie de criminalisation du mouvement.
Malgré cette offensive, cette période a facilité la construction de réseaux au niveau continental et mondial, et la production d’un patrimoine de connaissances commun sur la mondialisation. Elle a réuni des milliers d’organisations jusque là atomisées par deux décennies de rouleau compresseur néolibéral. Dans ce contexte, les Forums sociaux (le premier s’est tenu en 2001 à Porto Alegre au Brésil) se sont enracinés dans le paysage public aux niveaux international, continental et national.
Ce sont dans ces espaces ouverts d’échange et de travail, où se regroupent associations, syndicats, mouvements sociaux, mouvements de jeunes, de femmes, de paysans, etc., qu’ont commencé à être élaborées des contre-propositions et des alternatives au capitalisme néolibéral, ainsi que de nouvelles formes d’organisation des luttes et des mobilisations.
C’est ici aussi que nombre de grandes revendications thématiques ont combiné, de manière inédite, le social et l’environnemental (suppression des paradis fiscaux, abolition de la dette des pays les plus pauvres, mesures sur la préservation et la distribution de l’eau, lutte contre les OGM, taxes internationales, réforme de l’ONU, démocratie participative, etc.).
Avec son accélération sécuritaire et guerrière (notamment à partir du 11 septembre 2001), la mondialisation néolibérale a poussé le mouvement altermondialiste à prendre également en charge ces thématiques de manière de plus en plus centrale (c’est ainsi qu’il organisera, dans un très grand nombre de pays, les grandes manifestations contre la guerre en 2003 lors de l’invasion de l’Irak par les armées des Etats-Unis et de leurs alliés).
L’apport crucial de ce « mini-cycle » (1998-2003) est que le mouvement altermondialiste, s’appuyant sur une dynamique d’amplification du rejet du néolibéralisme, a imposé des thèmes politiques dans l’agenda mondial, auprès des opinions publiques et des gouvernements. Ces thèmes et revendications ont poussé, temporairement, les institutions financières internationales et le libéralisme sur la défensive entre 1999 et 2004-2005. Ainsi, le mouvement altermondialiste a créé une faille dans l’hégémonie culturelle du libéralisme et dans le triomphalisme du capitalisme mondial.
La production et la circulation internationales d’idées et de propositions du mouvement des mouvements a armé tous les acteurs (syndicats, ONG, mouvements politiques et sociaux, associations citoyennes, etc.) d’un nouveau logiciel critique du capitalisme néolibéral adapté à toutes ses dimensions. Pour ne prendre que le cas de l’Europe, ce dernier a permis aux uns et aux autres d’enraciner, à partir de 2003, leurs luttes sur leurs terrains directs (réformes des retraites en France et dans d’autres pays européens en 2003, traité constitutionnel européen en 2005, etc.).
De son côté, le développement d’une critique réformiste issue des rangs des élites intellectuelles et économiques internationales (l’économiste Joseph Stiglitz ou le financier Georges Soros) témoigne, au-delà du mouvement lui-même et de ses réalisations propres, de l’avancée de ses idées et de ses préoccupations. Mais il convient également d’admettre que, dans le même temps, critiques systémiques et revendications ont été absorbées par les élites mondiales et les gouvernements. Du moins, dans leur communication auprès des opinions publiques (déclarations d’intention, dialogues citoyens, commerce équitable et « bio », responsabilité sociale et éthique des entreprises, etc.) et dans leurs stratégies de mise en place des politiques néolibérales (développement des accords commerciaux bilatéraux ou multilatéraux en lieu et place des grand-messes de l’OMC).
Voici, à titre d’illustration, la dernière communication du Forum de Davos 2008 disponible sur la Toile sur la plateforme de sociabilisation You Tube. Dans un clip très dynamique et interactif, le Forum de Davos annonce son objectif : « Rendre le monde meilleur » (How to Make the World a Better place ?).
A travers une succession d’interventions intergénérationnelles et internationales - célébrant la diversité - , il nous est dit que les penseurs et les dirigeants mondiaux vont traiter, pendant le Forum de Davos, la question de la lutte contre la pauvreté mondiale, du changement climatique, de savoir comment gérer la pénurie énergétique, aborder la question des technologies de l’information, de l’éducation, de la citoyenneté globale, du sida, des désastres humanitaires, du développement économique et de la gouvernance mondiale.
Le clip compte sur chaque individu pour changer le monde : « Tu peux faire entendre ta voix en envoyant une question à Davos. Les meilleures seront présentées aux penseurs et leaders de Davos qui te répondront. »
Voici la question soumise à l’internaute : « si les pays, les entreprises, ou les gens pouvaient faire quelque chose pour rendre le monde meilleur en 2008, quelle serait-elle selon vous ? »
Dans ce mécanisme de digestion de la contestation, le rôle des médias (qui, tour à tour, ont encensé - souvent avec sa collaboration - ce mouvement dans ces expressions les plus « soft » - style de vie, humanisme, sous-culture, etc. - avant le banaliser et le décrédibiliser) a également été significatif.
Parallèlement à ces phénomènes, un débat s’est enclenché au sein de l’altermondialisme en 2005 [1] .C’est à partir de ce moment que la question de son objet, de ses finalités et ses différents potentiels se pose de manière récurrente alors que, conjugué à la réorientation stratégique des élites et des gouvernements, un effet palier commence à se faire sentir (répétition de la formule des Forums, banalisation, manque de matérialisation dans le réel, absence de prolongement politique des mobilisations sociales, etc.).
Alors que le visage de la mondialisation s’est considérablement modifié ces dix dernières années, ce débat s’avère, plus que jamais, crucial.
L’évolution de la mondialisation impose un élargissement des objectifs du « mouvement des mouvements ».
Nous avons déjà changé d’époque. La dernière décennie n’a pas modifié le rapport de forces dans le sens d’un affaiblissement du système capitaliste mondial, mais dans celui d’une modification des conditions dans lesquelles évolue aujourd’hui le mouvement des mouvements.
La mondialisation n’a plus, en effet, le même visage qu’en 1998.
Dans une dynamique contradictoire, la mondialisation néolibérale :
s’est accentuée. Elle est marquée par la continuation et l’approfondissement des politiques de marchandisation, de précarisation du travail et de fragilisation des individus et de leur reproduction socio-économique, de développement des accords de libre-échange (Accords de partenariat économique en Europe avec les pays du Sud), de concentration des richesses, de développement des inégalités, de destruction de l’environnement, etc. L’Union européenne (UE) est, à notre échelle continentale, cet agent zélé de la mondialisation néolibérale.
a suscité la naissance de nouveaux « compétiteurs mondiaux » concurrents de l’hégémonie étatsunienne. Cette concurrence s’exerce sur le même terrain économique et financier. Ces nouvelles puissances venant du Sud, comme la Chine, l’Inde ou le Brésil (auxquelles il convient d’ajouter la Russie) sont de ferventes promotrices du système capitaliste mondial a renforcé son ordre impérial (Irak, Afghanistan, Palestine, etc.). s’est dotée d’une capacité d’absorption de la contestation, aux niveaux global, continental et national.
continue de s’appuyer sur la diffusion d’un style de vie et d’un modèle de consommation individualiste qui a pour fonction d’anesthésier la construction d’espaces politiques collectifs. C’est une arme très forte du système capitaliste aujourd’hui. Cela s’est aussi développé ces dernières années, avec l’utilisation des technologies de l’information.
a produit un mouvement de rejet sur toute la planète qui a reconfiguré les luttes nationales et internationales.
a produit, dans le cadre de processus d’in
tégration régionale, des territoires concrets de remise en cause : l’Amérique latine avec l’Alternative bolivarienne pour les Amériques (Alba), la Banque du Sud, etc.
semble entrer dans une phase de crise financière, énergétique et économique aiguë dont l’issue est, à cette heure, incertaine.
Pour des stratégies élargies…
Cette évolution générale a sensiblement diminué la visibilité et l’espace propres du mouvement altermondialiste , en même temps qu’elle lui offre aujourd’hui de nouveaux défis stratégiques et de nouveaux points d’appui… à condition qu’il modifie ses méthodes d’action et qu’il investisse de nouveaux champs de bataille, en particulier celui de la reconstruction et du renouvellement du champ de l’action politique dans le cadre de la mondialisation néolibérale.
Celle-ci a produit un rejet et une conscience collective qui vont s’enraciner dans le long terme. Il faut tout faire pour renforcer et consolider cette vocation de long terme de l’altermondialisme et des forums sociaux. Ces derniers doivent rester ces espaces d’échange, de construction, de mutualisation, d’élaboration, de nouvelles alliances, etc.
Mais la question posée par le post-altermondialisme est : comment, une fois le consensus atteint sur l’élaboration de la critique et des revendications communes, renforcer les expériences réellement existantes de remise ne cause du néolibéralisme et permettre la mutation ou l’éclosion d’acteurs capables de peser directement sur la transformation des sociétés ?
La réponse n’induit pas une mutation globale et linéaire du mouvement des mouvements, mais l’intégration, pour ses composantes les plus actives, de nouveaux sujets de préoccupation et la construction de nouveaux espaces d’expérimentation.
Là où le néolibéralisme est atteint, c’est là où de nouvelles articulations sont nées entre le mouvement social et le champ politique. Pas de mouvement par le haut, ou de mouvement par le bas, mais l’articulation et la pénétration de tous les espaces du pouvoir : économique, social, politique pour dessiner les contours de la reconstruction d’une véritable opposition démocratique face aux forces du capital.
Ce point d’analyse est capital, mais reste souvent sous traité ou évacué au sein du mouvement altermondialiste au nom du principe d’autonomie du mouvement social ou de la « société civile » par rapport à la sphère politique et à l’institution [2].
Pourtant, l’observation historique récente impose un constat. Là où le néolibéralisme est atteint, c’est là où l’Etat et les institutions politiques ont été réinvestis par le mouvement populaire pour les transformer dans une dynamique post-néolibérale, comme le dirait Emir Sader. Là où ils ont été identifiés comme un champ de bataille permanent avec les intérêts dominants par les forces populaires et sociales. Là où ils ne servent pas seulement à appliquer un programme politique, mais à refondre les nations et à construire de nouvelles hégémonies alternatives. Là où, enfin, les gouvernements ont misé « sur un modèle de développement plus tourné vers leurs marchés intérieurs en recherchant l’alliance avec les classes moyennes et une stabilisation de leurs classes ouvrières » pour reprendre les propos de Gus Massiah dans son texte « Evolution globale et altermondialisme »
... qui incluent la question politique
L’urgence consistant à intégrer la question de la conquête de territoires politiques concrets est d’autant plus vitale que le néolibéralisme, lui, formule aujourd’hui son véritable projet politique pour toutes les sociétés du monde.
Dix ans après l’apparition de l’altermondialisme comme nouvelle reconfiguration d’un internationalisme après la chute du mur de Berlin, le capitalisme affirme aujourd’hui la nécessité de limiter la démocratie comme modèle d’organisation de la société. Friedrich Von Hayek, père fondateur du néolibéralisme, ne présentait- il pas son modèle de « démocratie limitée » comme modèle optimal ? Toute une littérature savante commence à trouver son relai médiatique sur ce thème. C’est le signe d’un changement d’époque et de radicalisation du capitalisme financier. Selon cette théorie, il y aurait trop de démocratie. Les peuples seraient, par nature, conservateurs, ignorants et seulement capables de mettre au pouvoir, lorsqu’il s’agit de gouvernements de rupture, des populistes autoritaires, etc. La démocratie serait, in fine, un danger pour la société.
Il s’agit du retour d’une vieille utopie conservatrice et réactionnaire dont l’objectif est de valoriser l’organisation du dépérissement du politique comme instrument de domination de l’économique.
De ce point de vue, l’existence de gouvernements de rupture en Amérique latine est insupportable. Au-delà de ses gouvernements et de ses personnalités phares, l’Amérique latine est, en effet, le seul endroit où se sont développées de nouvelles articulations entre un mouvement social revendicatif et un champ politique en reconstruction.
Alors que les élites se sont autonomisées des peuples, qu’elles ont fait sécession, elles souhaitent aujourd’hui leur enlever les ultimes armes qu’ils leur restent : leur souveraineté et leur vocation à gouverner.
C’est ici que la notion de post-altermondialisme intervient. Elle n’indique pas la fin de l’altermondialisme, mais sa continuation par l’intégration de nouveaux sujets. Pas de post-altermondialisme sans mouvement altermondialiste. Il s’agit moins de faire table rase du passé et de déclarer obsolètes l’ensemble de ses outils (comme les Forums), que de créer de nouveaux espaces propres à travailler la question de l’articulation entre mouvements sociaux, forces politiques et actions de gouvernement (les Forums, par nature, ne peuvent remplir cette fonction, et plusieurs acteurs qui participent à ce mouvement ne peuvent, pour des raisons structurelles et historiques, assumer cette orientation).
Il faut aussi penser, dans ce cadre, de nouvelles articulations entre ces nouveaux espaces et celui des Forums.
Cela constitue même une urgence, tant les projets politiques alternatifs du 20è siècle (communisme soviétique et social-démocratie) et les forces politiques qui les ont portés - qui occupent encore le champ politique institutionnel dans nos pays - connaissent un dépérissement mécanique et historique.
Il existe, d’un certain point de vue, une similitude entre notre moment historique et l’histoire du mouvement socialiste au 19è siècle [3]
Après s’être constitué en espace intellectuel et philosophique commun, après avoir permis d’agglomérer des ressources et des forces disponibles à qui il a donné des valeurs et une identité collectives dans la première partie du siècle, le socialisme, à partir des années 1850, a produit une multitude d’écoles, de chapelles, de penseurs, d’organisations, etc. Tous ces acteurs avaient pour point commun la critique et le rejet du libéralisme et la remise en cause du régime de propriété, mais ils pouvaient diverger sur les options prioritaires de lutte (primauté de la lutte politique ou syndicale par exemple), les projets de société, etc. Certains faisaient de l’industrie leur priorité, d’autres l’agriculture, d’autres encore prônaient la régénérescence du la religion ou, au contraire, l’anarchie, etc.
Cette phase historique du socialisme (1850-1870) a, en fait, incarné son passage du "social" (critique du système, élaboration et diffusion d’idées) au "politique" (la conquête du pouvoir devient l’objectif de sa réalisation à partir de 1870-1875) lorsque le courant marxiste est devenu, au sein du mouvement socialiste international qui regroupait toutes ces sensibilités, hégémonique après de fortes luttes d’influence.
L’altermondialisme, espace international premier, se pose aujourd’hui la question de savoir s’il doit - et si oui comment - gagner des espaces politiques concrets :
influence sur le champ politique ?
intégration au champ politique ?
ou renouvellement du champ politique ?
C’est cette nouvelle phase de son histoire que l’on désignera comme un post-altermondialisme dans laquelle vont agir une partie de ses composantes les plus actives. Du point de vue des processus, l’histoire du mouvement socialiste montre que le champ de la mobilisation sociale, lorsqu’il atteint l’apogée de sa capacité d’agglutination, redéploie une partie de lui même et des forces qu’il a produites sur la voie du politique. Cette mutation ne signifie pas l’abandon du terrain social, mais la reformulation dynamique de la relation social/politique comme nécessité pour remporter des succès face à la radicalisation des forces du capital et des élites qui relaient leurs intérêts.
C’est dans ce cadre qu’il faut soumettre une nouvelle proposition : la promotion de nouvelles convergences, au niveau international, entre mouvements sociaux disponibles, forces politiques cherchant leur dépassement et gouvernements progressistes. Cela doit se faire à partir deux principes : l’autonomie des acteurs et l’exclusion de tout suivisme. Mais cette autonomie n’empêche pas la construction d’une relation de travail et d’enrichissement mutuel basée sur une articulation dynamique.
Le processus des Forums sociaux, en tant que tel, n’a pas été conçu pour remplir cette fonction. La sienne – espace d’échanges entre une diversité d’organisations et de mouvements et d’élaboration d’alternatives – reste cruciale dans le long terme. Mais une ramification dans le cycle qui s’ouvre aujourd’hui est tout aussi fondamentale. Tel est le sens de la démarche post-altermondialiste : la réalisation des propositions portées par ce mouvement et le renouvellement du politique, y compris du champ politique.
Notes
[1] Le Forum social mondial 2005 de Porto Alegre a été marqué par la proposition du Manifeste de Porto Alegre et de ses « Douze propositions pour un autre monde possible »
[2] Comme en témoigne une tribune parue le 21 janvier 2008 dans L’Humanité, « L’altermondialisme, un processus de long terme porteur d’alternatives » illustre cette situation
[3] Cette partie est reprise de l’article « Pourquoi s’intéresser à la révolution bolivarienne ? » paru dans le numéro 43 d’Utopie critique..