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PAKISTAN et AFGHANISTAN

Guerre et attentats

Vendredi 26 septembre 2008, par Pierre ROUSSET

L’attentat au camion piégé (chargé de 600 kg d’explosifs) dont le Marriott Hotel a été la cible à Islamabad, samedi 20 septembre, a fait au moins 53 morts et environ 250 blessés. Il représente, pour le quotidien pakistanais The News, un « 11-Septembre du Pakistan ».

Le Marriott est l’un des deux hôtels les plus prestigieux de la capitale, étant fréquenté par l’élite et les étrangers (dont les militaires étasuniens – deux d’entre eux ayant été tués dans l’explosion). Mais la très grande majorité des victimes de l’explosion sont des employés, chauffeurs et gardes.

L’attentat du Marriott avait-il une cible particulière ? La presse pakistanaise relève que le président Zardari avait prévu de s’y retrouver ce soir là avec des membres du gouvernement (le lieu du diner ayant été changé en dernière minute). The News et Dawn relaient aussi des informations non confirmées selon lesquelles des Marines ou des membres de l’ambassade US utilisaient alors l’hôtel pour des activités indéfinies.

Mais peut-être que l’attentat n’avait aucune cible particulière et que l’aggravation brutale de la situation à la frontière afghane suffit à l’expliquer. Depuis le début de septembre, les forces étatsuniennes opérant en Afghanistan ont multiplié les incursions en territoire pakistanais, dans les « zones tribales » devenues des fiefs de mouvements talibans. Les bombardements aériens et les opérations des forces spéciales de l’OTAN ont fait tant de victimes civiles que même le gouvernement d’Islamabad a dû protester contre les violations de la souveraineté territoriale de leur Etat, commises par les USA au nom du droit de poursuite.

Ces incursions répétées ont soulevé un tollé au Pakistan où nombreux sont ceux qui pensent que l’intervention de l’OTAN dans la région contribue à déstabiliser le pays et que les Etats-Unis sont aujourd’hui une menace plus grande encore pour la paix que les organisations islamistes armées.

L’armée pakistanaise, en coopération avec Washington, a pour sa part engagé une importante offensive dans les provinces frontalières du nord-ouest : les combats auraient déjà fait quelques 800 morts et 300.000 personnes déplacées. Or, dans tous les cas de figures – attentats islamistes, bombardements US ou opérations militaires –, ce sont les populations civiles qui paient le prix de la guerre. Cependant, les médias internationaux s’émeuvent beaucoup moins des victimes innocentes des armées US ou pakistanaises, que de celles des fondamentalistes religieux.

Dans le passé, les services US ne se sont pas privés de nouer des contacts directs avec des éléments pro-Taliban dans les provinces frontalières pakistanaises pour réduire la liberté d’action de leurs homologues afghans. Pourquoi ces négociations discrètes cèdent-elles aujourd’hui le pas à aux raids militaires ?

Pour certains analystes, la Maison Blanche souhaiterait aiguiser la crise pakistanaise et affaiblir le régime pour préparer la liquidation de ses armes nucléaires. Si c’était le cas, Washington mettrait volontairement en danger la fragile unité du pays.

Pour d’autres, comme Tariq Ali [1], l’explication est plus simple, moins machiavélique. L’OTAN se trouve aujourd’hui en Afghanistan dans une impasse. L’escalade militaire est la réponse (impérialiste et classique) de l’administration Bush à cette impasse – mais au risque, à nouveau, de plonger plus profondément encore le Pakistan dans la tourmente régionale.

Toujours est-il qu’une escalade meurtrière est enclenchée avec la multiplication des raids US du côté pakistanais de la frontière afghane, les opérations de grande envergure de l’armée gouvernementale dans les zones tribales et la radicalisation des attentats islamistes jusque dans la capitale. L’ombre de la guerre d’Afghanistan plane sur tout le Pakistan.

ROUSSET Pierre


Voir en ligne : www.europe-solidaire.org