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PALESTINE

Georges Habache

Dimanche 27 janvier 2008, par Pierre Haski

C’est une page d’histoire palestinienne qui s’est tournée samedi, avec la mort, à l’âge de 82 ans, de Georges Habache, le chef du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), longtemps le rival "de gauche" de Yasser Arafat. C’est aussi une page célèbre de l’histoire politique française, avec le scandale qui avait accompagné l’accueil du chef palestinien dans un hôpital parisien en 1992, faisant valser quelques têtes au sommet de l’Etat.

Signe des temps, les "terroristes" d’hier s’étant assagis et ayant été remplacés dans l’échelle des périls par les islamistes, le président palestinien Mahmoud Abbas a décrété trois jours de deuil après la mort de celui qu’il a qualifié de "dirigeant historique de la révolution palestinienne". Habache avait pourtant été un farouche opposant de la reconnaissance d’Israël par Yasser Arafat, dont Abbas était le lieutenant, et il était resté en exil en Jordanie plutôt que de regagner les territoires occupés comme d’autres dirigeants de l’OLP.

Georges Habache, un chrétien palestinien né à l’emplacement actuel de la ville israélienne de Lod, a incarné dès les années 50 une branche plus "radicale" et marxiste du mouvement national palestinien, opposant de toujours au Fatah "nationaliste bourgeois" de Yasser Arafat. Il se fait connaître en lançant, après la victoire israélienne de 1967 et l’occupation des territoires palestiniens, la stratégie des détournements d’avion, notamment du vol d’Air France détourné en 1976 sur Entebbe, en Ouganda, épisode célèbre de la guerre larvée israélo-palestinienne.

En 1992, victime d’une attaque cérébrale, Georges Habache avait été accueilli et soigné en urgence en France, ce qui avait provoqué un tollé. Israël avait protesté contre l’accueil d’un "chef terroriste aussi cruel", et la droite française s’en était prise à Roland Dumas, alors ministre des Affaires étrangères, qui avait organisé l’accueil de Georges Habache sans prévenir François Mitterrand alors en déplacement à l’étranger. Le chef de la diplomatie, un proche de Mitterrand, avait sauvé sa tête, mais avait sacrifié le Secrétaire général du Quai d’Orsay, François Scheer, et plusieurs autres hauts fonctionnaires, tandis que Georgina Dufoix, directrice de la Croix Rouge française qui avait organisé le transfert sanitaire, démissionnait elle-aussi dans la foulée...

Longtemps, les Palestiniens des territoires se partageaient entre cette "gauche" incarnée par Habache, portant le keffieh (écharpe) rouge, et le Fatah de Yasser Arafat, au keffieh à damier noir et blanc. L’éventail politique palestinien très morcelé comptait alors de nombreuses autres "chapelles", comme le FDPLP, lui aussi marxiste et favorable à un Etat binational, ou le FPLP-Commandement Général d’Ahmed Jibril, scission du mouvement de Georges Habache. Des rivalités instrumentalisées par les régimes arabes, qu’il s’agisse des frères ennemis baasistes de Damas et de Bagdad, de l’Egypte ou du Golfe.

Depuis les années 80, toutefois, les véritables rivaux du Fatah sont progressivement devenus les islamistes, du Hamas ou du Jihad islamique, plus actifs sur le terrain de l’action sociale et de l’encadrement de la population, et qui ont choisi de se lancer dans un terrorisme aveugle, avec les attentats suicides dans les bus et les cafés d’Israël, une escalade brutale par rapport à la "génération Habache". Aujourd’hui, le FPLP conserve encore un capital de sympathie dans les territoires occupés, notamment grâce à la personnalité de Habache bien qu’il ne dirige plus effectivement le mouvement depuis 2000. Il fait figure d’aîle gauche d’un front anti-islamiste, même s’il n’a guère les moyens de peser sur la situation.


Voir en ligne : www.france-palestine.org