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Israël - Syrie

En finir avec la guerre des six jours

Lundi 11 juin 2007, par Francine Lalonde

La guerre des Six jours n’a duré que du 5 au 11 juin 1967, mais ses conséquences n’ont pas fini de nous inquiéter. La Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est « conquis » mais non reconnus par les Nations unies sont peuplés de Palestiniens vivant depuis 40 ans sous occupation.

4,4 millions de réfugiés palestiniens vivent misérablement en camp dans les pays arabes voisins, menaçant leur équilibre économique et politique. Dans la bande de Gaza, la très dense population s’appauvrit, victime d’un blocus maritime et terrestre qui limite ses déplacements et son commerce. En Cisjordanie et à Jérusalem-Est, 440 000 colons israéliens illégaux bénéficient de routes réservées alors que les Palestiniens, dont plus de 60 % vivent avec moins de 2 $ par jour, peuvent à peine circuler à cause des centaines de check-point et du tracé du mur. Inutile de dire qu’ils sont en colère.

La volonté de fer des Israéliens de compter d’abord sur leurs propres moyens a fait de l’armée et son armement la pièce maîtresse de leur survie. Cette volonté a produit une société où le souvenir vivace de la Shoah alimente à la fois la peur de disparaître et l’assurance d’avoir raison.

Mais le poids de l’occupation se fait aussi sentir sur la société israélienne. Avram Burgh, président de la Knesset, disait en 2002 : « L’occupation corrompt et peut-être plus précisément, elle nous a déjà corrompus... » Outre le coût de l’équipement militaire et de la récente guerre au Liban, la société israélienne dynamique, généreuse, progressiste des débuts se durcit, s’appauvrit et même perd des jeunes qui veulent un avenir autre que le conflit et la peur constants.

Tout force la communauté internationale à s’impliquer fortement et à rendre possible le règlement du conflit : les considérations humanitaires, parce que les souffrances engendrées par ce conflit sont intolérables ; les considérations légales, parce que nous devons veiller au respect du droit international ; et les considérations sécuritaires, parce que ce conflit cristallise toutes les colères.

Le signal envoyé dans les Accords de La Mecque par les pays arabes réunis pour aider les Palestiniens à se donner un gouvernement d’unité nationale doit être entendu. C’est une offre claire et précise des pays arabes d’échanger enfin les territoires occupés contre la paix, avec des textes qui ouvrent la voie à la négociation.

Les Accords de La Mecque, qui se veulent une sortie de crise après la tension générée par la victoire du Hamas aux élections démocratiques de janvier 2006, se traduisent par un gouvernement formé de députés du Hamas, du Fatah et de quatre autres partis et permettent au président Mahmoud Abbas de répéter son adhésion aux exigences internationales de non-violence, de reconnaissance des accords passés sous Oslo et de reconnaissance d’Israël. Il pouvait donc attendre le refinancement direct de l’Autorité palestinienne, le transfert par Israël des taxes payées sur les produits palestiniens qui constituaient la moitié du budget de l’Autorité, et le redémarrage des négociations.

Rien de cela ne s’est produit.

Les violences interpalestiniennes ont fait oublier tout le chemin parcouru. Personne ne peut s’en réjouir, parce que si elles étaient le début d’une implosion de la société palestinienne réunie autour de son projet de pays, elles ne seraient pas une garantie de paix pour les Israéliens, très loin de là. Elles ne seraient pas non plus une garantie de paix pour la communauté internationale, parce que les nombreux militants en colère devenus libres sur le marché de la violence ne pourraient qu’alimenter le terrorisme international.

Il faut revoir la stratégie de la communauté internationale qui a, comme Israël, posé des pré-conditions à la négociation, laissant à tout groupe hostile la capacité d’arrêter celle-ci. Si Tony Blair avait eu une telle stratégie, le monde n’aurait pas vu Ian Paisley et Gerry Adams collaborer pour faire fonctionner le parlement de l’Irlande du Nord. Comme Tony Blair ne s’est pas laissé arrêter par des violences rejetées par Gerry Adams, il y eu des négociations, lentes et parfois ardues, et finalement un succès qu’il faut saluer.

Pour le Bloc québécois il n’y aura pas de résolution du conflit sans la création d’un État palestinien viable et le respect du droit d’Israël d’exister à l’intérieur de frontières sûres et reconnues. C’est cette position de principe qui guide nos interventions depuis 2001.

Mettre fin à l’occupation

Pour cela, il faudra que prenne fin l’occupation militaire des territoires palestiniens et que les colonies israéliennes dans les territoires soient démantelées. De plus, les deux parties devront conclure un accord librement négocié, incluant les questions épineuses que sont le sort des réfugiés et le statut de Jérusalem.

Avec le désordre qui s’est installé dans la bande de Gaza après le retrait israélien en 2005, on a vu que les solutions unilatérales sont mauvaises. Et on a vu aussi à que la destruction des institutions et des infrastructures de l’Autorité palestinienne porte un germe de chaos et de violence qui complique tant le retrait israélien que la reprise des négociations de paix. Et 40 ans d’occupation démontrent que, laissées à elles-mêmes, les deux parties au conflit ne parviendront pas à s’entendre.

À brève échéance, il est urgent de renforcer les institutions palestiniennes. C’est un préalable à la reprise du processus de paix et au retrait israélien. Il faut donc revenir à cet Accord de La Mecque, car il est porteur d’espoir. L’alternative, c’est le chaos.

La semaine dernière, la Norvège a rétabli le financement à l’Autorité palestinienne et les relations diplomatiques. D’intenses discussions ont lieu en Europe en ce sens.

Mais le gouvernement Harper fait le contraire, maintient la ligne dure, continue de critiquer et n’offre aucun soutien. L’an dernier, il a été le seul gouvernement à déclarer que la guerre qu’Israël a livré au Liban était mesurée. Plus tard, lors des élections palestiniennes, il a été le premier gouvernement au monde à couper les vivres à l’autorité palestinienne.

En prenant sans nuance position pour un camp et contre l’autre, il s’empêtre dans la dynamique des accusations mutuelles, il se rend inapte à proposer une solution. Un engagement financier substantiel devra être pris pour reconstruire la Palestine, dont les infrastructures ont été systématiquement détruites. Le désespoir et la violence ne cesseront pas sans progrès dans les conditions de vie des Palestiniens.

Ensuite, il faudra créer des conditions qui rendront possible le retrait israélien, en proposant par exemple l’envoi d’une force internationale d’interposition qui offrirait des garanties de sécurité, tant aux Israéliens qu’aux Palestiniens. Une conférence internationale devrait être convoquée rapidement.

Finalement, il sera possible de reprendre le processus de paix et d’insister très fort auprès des deux partis pour qu’elles passent par-dessus leur méfiance et réalisent que rien n’est aussi important que la paix. Mettons-nous à la tâche pour recréer rapidement des conditions favorables. Le temps n’est plus aux palabres mais à l’action.

Francine Lalonde est députée au Parlement fédéral du Canada. Elle représente le Bloc Québécois.