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CUBA

Démorcatie à la cubaine

Mardi 26 février 2008, par Arnold August

Plus de sept mois ont passé depuis le début des élections générales de 2007/08, la dernière étape a été franchie aujourd’hui dans une expression d’unité avec le nouveau Conseil d’État avec la condition formelle que Fidel Castro soit consulté sur les matières majeures telles la défense, la politique étrangère et le développement socio-économique de l’île.

Le 9 juillet 2007, l’ancien Conseil d’État a convoqué des élections générales, ce qui indiquait que la première étape pour des Assemblées municipales se tiendrait le 21 octobre, après que les citoyens aient eu l’opportunité de nommer les candidats de leurs circonscriptions.

La Commission électorale nationale et la Commission nationale de candidature (cette dernière formée par les organisations de masses) furent établies à tous les niveaux.

Après les Élections municipales et la constitution des nouvelles Assemblées municipales élues à la grandeur de l’île, le Conseil d’État a convoqué la deuxième étape électorale qui consistait en les élections nationales et provinciales du 20 janvier 2008.

Un processus de consultation massive a pris place, organisé par les Commissions de candidature et par les organisations de masses elles-mêmes. Au cours de ce processus, 2 millions de citoyens furent consultés afin d’élaborer un bassin initial de 55,000 pré-candidats en vue des élections du 20 janvier.

Les élections se sont tenues le mois dernier dans le contexte des plus récentes tentatives de la part des États-Unis et de leurs alliés, pour créer des divisions et saper la légitimité du processus électoral mais en vain.

Le 20 janvier, le Conseil d’État a appelé l’établissement de la nouvelle législature en date du 24 février 2008 qui, chaque cinq ans, traite seulement de deux points : Nomination et élection à la présidence de l’Assemblée nationale composée du président, du vice-président et du secrétaire. Nomination et élection du Conseil d’État qui comprend le président, le premier vice-président, 5 vice-présidents, le secrétaire et autres membres pour un total de 31 députés.

Comment sont nommés et élus ces députés en vue d’occuper leurs positions ?

Le 28 janvier 2008, j’ai interviewé à La Havane, la Ministre de la justice cubaine laquelle a aussi été nommée pour présider la Commission électorale nationale, Maria Esther Reus. Entre autres choses, elle m’a confirmé que c’est la Commission nationale de candidature qui est responsable du processus de consultation menant à la proposition de tous les postes de la nouvelle législature.

Elle a aussi mentionné que la Commission nationale de candidature avait en fait déjà commencé son travail. Elle a signalé que chaque député nouvellement élu est consulté sur une base individuelle par ses membres.

Le 30 janvier, lors d’une autre entrevue avec la Commission nationales de candidature, sa présidente Amarilys Pérez Santana ainsi que d’autres membres, m’ont décrit et expliqué clairement comment ce processus prend place.

Il est semblable dans son essence à celui des élections générales nationales précédentes (1997-98) que j’ai suivies et décrites. Dans un délai raisonnable avant la rencontre avec les députés, une feuille mentionnant le nom, une courte biographie et une photo de chacun des députés nouvellement élus est remise aux députés.

Dans une lettre de convocation envoyée à chaque député individuellement, figurent les noms et fonctions des députés sortants de la Présidence de l’Assemblée nationale et du Conseil d’État. Une période de temps raisonnable est accordée aux entrevues.

Afin d’accommoder les participants qui demeurent à l’extérieur de La Havane où est située la Commission des Candidatures, les membres de cette même commission se rendent dans les provinces rencontrer les députés. Selon la Commission de candidature, chaque député est rencontré individuellement et est mis au courant des procédures et de ses droits en vue de proposer le député de son choix pour n’importe quelle fonction. On lui remet une feuille blanche et la personne est laissée seule afin qu’elle ait tout le temps nécessaire pour faire sa proposition. Ce bulletin est gardé secret et déposé par la Commission.

J’ai également parlé à plusieurs députés concernant cette procédure ainsi que d’autres sujets. L’un d’eux, Jorge Gómez Barranco, fut interviewé aux quartiers généraux de l’Assemblée nationale le 1er février 2008. Il peut être connu de certains au Québec étant donné qu’il est le fondateur du fameux groupe musical Moncada connu à travers le monde. Ce groupe s’est produit dans plus de 30 pays mais il y a peu de gens qui le connaissent comme député. Il a été élu officiellement selon la politique du pouvoir populaire du peuple cubain consistant à constituer un Parlement composé de personnes des différents secteurs de la société à l’image de la société cubaine.

Conséquemment, les députés élus ont la possibilité de contribuer au développement social, économique, politique et culturel de leur pays. Il a donné une description très vivante et très imagée de son expérience à cette nomination comme seulement un artiste peut le faire. Il a surtout confirmé ce que les Commissions nationales m’avaient dit. Il a émis l’opinion que le travail de l’Assemblée nationale et que les élections à Cuba ne sont pas un spectacle comme aux États-Unis. Il était très fier de dire qu’il est exact que les députés sont seuls lorsqu’ils écrivent leur choix. Il a aussi mentionné qu’il considère avoir bien accompli sa tâche lors de son dernier mandat parce que sur les 31 membres élus du Conseil d’État, 17 de ses propositions correspondaient aux membres élus du Conseil d’État.

Le 3 février, un autre député, Daniel Rufus, un ami à moi, professeur en sciences politiques à l’Université de La Havane m’a dit « Je t’avoue que je me sentais entièrement libre de faire mes choix. » Il a continué en parlant du processus de nomination des instances dirigeantes du Parlement et du système électoral complet : ‘ « Je crois sincèrement que notre système électoral, tout comme le système politique cubain dans sa totalité, peut et doit être amélioré, mais même en tenant compte de toutes les limites qu’il comporte, il demeure authentiquement démocratique et beaucoup plus que n’importe quel autre système politique. » (Je reviendrai plus tard sur ces entrevues et plusieurs autres.)

Une fois que chaque député a été interviewé et que la Commission de candidatures a rassemblé toutes les nominations, cette dernière a pour tâche de classer les présentations, éliminant celles qui ont obtenu le plus petit nombre de propositions pour chaque poste et conservant celles qui ont accumulé le plus de votes. Pendant que c’est essentiellement un calcul objectif basé sur le nombre de nominations, il est évident que la Commission de candidature ait son propre pouvoir.

Lors d’une autre entrevue le 1er février, avec Maria Josefa Ruiz Mederos, députée sortante possédant une longue expérience, j’ai appris que la Commission des candidatures doit aussi tenir compte de différents facteurs (en plus de faire le décompte des propositions) tels que l’âge, le sexe, l’expérience et l’occupation des candidats. Les noms proposés pour chacun des postes au Conseil d’État sont alors lus par la Commission de candidature à L’Assemblée nationale. Chaque député a le droit de se prononcer en faveur ou contre n’importe quelle nomination proposée. Lors d’un vote à main levée, tous ceux qui reçoivent au moins 50% des votes sont considérés comme étant nommés. Une fois cela terminé, la session est ajournée et un scrutin de vote secret a lieu. Les élections et les résultats deviennent la responsabilité de la Commission électorale nationale et son président, le Ministère de la Justice. Je n’ai pas pu assister à cette session de l’Assemblée nationale à La Havane.

J’ai cependant eu une pensée pour Fidel Castro, pour sa monumentale et unique contribution continuelle non seulement pour la Révolution cubaine mais aussi pour le mouvement révolutionnaire en Amérique latine de même qu’autour du monde. Mes pensés et émotions m’ont rappelé ma présence dans la salle à La Havane lors de la constitution de l’Assemblée nationale du 24 février 1998 comme dernière étape des élections 1997-98, il y a exactement 10 ans aujourd’hui.

Dans mon livre, à cette époque, concernant le discours que Fidel Castro avait fait après avoir été nommé et élu comme président du Conseil d’État, j’avais écrit : « Le 24 février 1998, il a dit dans son discours à l’Assemblée nationale que l’impérialisme avait inventé une image de Cuba personnifiée à son propre nom alors que dans les faits, la direction collégiale est fournie par le Conseil d’État. Ce dernier consulte régulièrement les citoyens plus que les Commissions nationale de candidature. Le 24 février 1998, Fidel Castro a parlé durant sept heures trente-cinq minutes, sans arrêt, debout, sans aucune note, traitant de toute la gamme des questions nationales et internationales. Voilà un homme complètement dédié à la cause de l’indépendance et de l’émancipation sociale de la même manière que lorsqu’il s’est joint à d’autres lors de la lutte révolutionnaire des années 50… » Dix ans jour pour jour, c’est toujours vrai. Il sera jusqu’à son dernier souffle, un exemple qui inspire la Révolution cubaine à continuer de se développer et s’améliorer selon ses propres critères.

Arnold August écrit et travaille à développer la solidarité avec le peuple cubain depuis plusieurs années.