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ARGENTINE

Les salariés redémarrent en coopérative des entreprises faillies

Dimanche 26 avril 2009, par Anil Mundra

En Argentine, le mouvement de reprise d’entreprises par leurs salariés, qui avait vu le jour après l’effondrement économique de 2001, connaît un renouveau depuis quelques mois. De nombreux salariés de firmes en faillite ont choisi de se battre et de sauvegarder leur emploi en relançant l’activité sous forme de coopérative ouvrière. Emblème de ce mouvement, le luxueux Hôtel Bauen de Buenos Aires, occupé par ses employés en 2003 après sa fermeture, est aujourd’hui devenu une entreprise rentable qui emploie 150 personnes.

L’hôtel Bauen ressemble à n’importe quel hôtel de milieu de gamme au centre-ville de Buenos Aires : 20 étages d’acier et de verre, entourés d’une flopée de drapeaux du monde, qui accueillent les touristes dans un hall chic. Il y a un grand piano et un chandelier art-déco.

C’est difficile d’imaginer qu’il y a six ans, cet endroit était le lieu d’une belle pagaille. Et c’est encore plus difficile de croire que l’hôtel Bauen est encore un endroit occupé illégalement, sous le contrôle d’un groupe d’anciens employés.

A Buenos Aires, ce n’est pas rare. Il y a plus que 200 « entreprises reprises » en Argentine, impliquant 12 000 employés qui ont pris le contrôle de leurs entreprise, après que leurs propriétaires aient menacé de fermer boutique.

Les propriétaires les accusent de vol à grande échelle ; les travailleurs déclarent qu’ils ne font qu’exercer leur droit à travailler - garanti par la constitution. Les politiques et la justice s’agitent sur la question, mais personne ne sait comment régler la situation.

Après la prise de contrôle de quelques usines dans les années 1980 et 1990, il y eut une vague importante d’occupations et prises de contrôle à l’occasion des nombreuses faillites pendant la dernière crise économique en Argentine, qui a débuté en 2001. Entre cette année et 2004, il y eut 150 « reprises d’ entreprises » par les travailleurs dans le pays.

Aujourd’hui, avec la crise économique qui gagne l’Argentine, on assiste a une nouvelle vague d’occupations. Personne n’en connaît le nombre exact.

Mais le réseaux de coopératives a pris un nouvel essor et le mouvement s’est renforcé ; les représentants de ces organisations ont précisé qu’il y avait eu plus de prises de contrôle durant les quatre derniers mois que dans les quatre années précédentes.

Ceux qui ont réalisé ces dernières prises de contrôle ont appris de leurs prédécesseurs.

Il y a cinq ans, on ne croyait guère à la survie des entreprises récupérées par leurs employés. Mais la plupart des groupes d’employés qui ont pris le contrôle au début de la décennie sont toujours là. Et alors qu’il leur avait fallu plus d’un an pour reprendre en main l’entreprise et retrouver la productivité, de nombreuse tentatives nouvelles y parviennent maintenant dans les trois mois.

« Nous ne savions pas comment nous allions nous en sortir sans patron, mais nous avons réussi à produire en très peu de temps, et nous croyons vraiment que nous serons capables d’aller de l’avant » déclare Adrien Serrano, qui travaillait depuis 25 ans à la chocolaterie Arrufat, quand le propriétaire a déserté en Janvier. Les 30 employés qui restaient (la moitié du personnel était parti) travaillèrent d’arrache-pied pour fabriquer 10 000 œufs en chocolat à temps pour Pâques, la saison la plus cruciale.

Le propriétaire avait coupé l’électricité et ils ont dû se brancher chez un voisin, ils ont dû faire la plupart du travail à la main. Maintenant, le volume de production d’Arrufat n’est qu’une faible portion de ce qu’il était dans les années précédentes. Mais ils gagnent assez d’argent pour se nourrir, et, plus important encore, ils ont un travail.

« Nous ne sommes pas des usurpateurs » dit Serrano. « Tout ce que nous voulons, c’est travailler ».

Bien sûr, ils ont un côté usurpateur ; c’est exactement ce que les anciens patrons et les autorités judiciaires leur reprochent. En fait, il n’est pas si clair d’établir qui a volé qui, car la plupart des « usurpateurs », comme les travailleurs d’Arrufat, sont en attente de plusieurs mois de salaire impayés lors du dépôt de bilan. Les propriétaires doivent souvent aussi des impôts au gouvernement.