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LIBAN

De Aït ash Shaab... au "Grand Moyen-Orient »

Vendredi 13 octobre 2006, par Marie Nassif-Debs

La nouvelle guerre israélienne contre le Liban (12 juillet-14août 2006) a constitué un tournant dans la politique de guerre adoptée par les Etats-Unis à la suite du 11 septembre 2001 et appelée "politique des guerres préventives" ; cette politique avait pour point de départ l’Afghanistan, suivi par l’Irak et, ensuite, par la Palestine, le Liban et, enfin, le Soudan… Sans oublier les sérieuses menaces proférées contre la Syrie et l’Iran.

Et si les guerres "préventives" des Etats-Unis ont pris pour emblème "la suppression du terrorisme", et si leurs instigateurs ont toujours profité de la présence importante du "lobby" sioniste américain et du sectarisme religieux qui exprime, en réalité, une position ultra-droite, les objectifs réels des nouvelles tendances agressives de l’administration américaine (que certains appellent "la mondialisation militaire") résident dans la volonté de dominer une région, le monde arabe en l’occurrence, d’une grande importance stratégique : elle lie trois des cinq continents ; son sol recèle de richesses naturelles sans précédents (pétrole et gaz) et elle a assez d’eau et beaucoup de soleil qui constituent, comme on dit, les deux sources futures d’énergie… A cela, s’ajoute un atout majeur : cette région est facilement "contrôlable", puisqu’elle contient - selon les théoriciens américains des années soixante du siècle précédent - tous les éléments permettant son implosion en des dizaines de mini-Etats antagonistes, soit à cause des contradictions ethniques et tribales toujours prêtes à s’envenimer ou, encore, des divisions confessionnelles qui continuent à sévir depuis le septième siècle et qui divisent la région en deux "croissants" qui partent de l’Afghanistan pour aboutir en Palestine et au Liban : le "croissant" chiite, qui commence à l’Est de l’Afghanistan, puis traverse l’Iran, le Sud de l’Irak et les régions "alaouites" de la Syrie avant d’aboutir au Liban, et le "croissant" sunnite qui lui fait face presque complètement.

I. Le "Nouveau Moyen Orient"

Cette image, même très schématique, met, cependant, en lumière les éléments essentiels qui ont poussé les Etats-Unis, durant les deux administrations de Georges W. Bush, à revenir au projet mis au point par le ministre des Affaires étrangères durant les années soixante-dix, le Républicain Henry Kissinger. Ce projet s’était basé sur la réorganisation du Moyen Orient en général et des pays arabes en particulier sur la base de nouveaux petits Etats antagonistes, réunis seulement autour de leur protecteur américain et de son bras armé dans la région, Israël. Surtout que ce dernier avait pu, durant les années soixante et soixante-dix du siècle précédent, affaiblir et vaincre les Arabes, profitant pour cela du régime officiel arabe et de ses positions hésitantes quant aux droits du peuple palestinien au retour et à construire un Etat indépendant sur son territoire national.

Il faut dire aussi que le projet du "Grand Moyen Orient"(ou du nouveau Moyen Orient) s’était, d’abord, basé sur la politique du "pas-à-pas" mise au point par Henry Kissinger et ayant déjà fait les preuves de son efficacité dans la division du monde arabe, surtout qu’elle avait poussé le président égyptien Anouar Sadate à signer une paix séparée avec les Israéliens. Ajoutons à cela que les succès acquis ont induit en erreur les Etats-Unis qui, après avoir neutralisé l’Egypte, ont réussi, d’abord, à pousser l’Irak dans une guerre féroce avec l’Iran, puis à diviser les Etats arabes qui entourent Israël (La Jordanie, la Syrie, le Liban et la Palestine) : en effet, à la suite du congrès de Madrid, l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) fut orientée sur une autre voie que nous avions appelée "Gaza-Jéricho : le commencement et la fin" . Des conflits arabo-arabes avaient pris aussi le devant de la scène tandis que les pouvoirs arabes mis en place pratiquaient la répression à outrance contre les peuples qui furent, une fois de plus, rayé de possibilité de participer au combat contre les agressions israéliennes et que le "Front de la résistance nationale libanaise" contre l’occupation israélienne (créé en 1982) se voyait persécuté dans le but de donner à la résistance l’image confessionnelle qui faciliterait, pensait-on, son encerclement. Tout cela se passait alors que le Liban était terrassé par une guerre civile très meurtrière qui a duré plus de quinze ans et durant laquelle les Etats-Unis, même après le départ de l’OLP, en 1982, avaient joué un rôle de premier plan très bien exprimé par Henry Kissinger, dans le dernier volume de ses Mémoires .

Tels sont les mesures préliminaires prises dans le but de réaliser le projet qualifié, dernièrement, par des adjectifs différents, tels : le "grand" Moyen Orient, "élargi" et "nouveau", enfin… Quant à sa carte géopolitique, elle ne diffère pas beaucoup de celle mise au point par Kissinger, surtout que, cette fois aussi, les deux conditions qui ont guidé son traçage étaient les divisions ethniques et confessionnelles.

Cette carte commence par des divisions dans les républiques islamiques de l’ex Union soviétique. Elle répartit, ensuite, l’Irak en trois mini -Etats et deux régions "indépendantes" (le premier pas est déjà fait dans la conception de la nouvelle constitution et dans la mesure "indépendantiste" prise par les Kurdes). L’étape à venir devrait, selon le plan, se faire au Liban, puis en Syrie, en Egypte et au Soudan ; les Etats du Golfe arabique sont menacés eux aussi d’un retaçage de leurs frontières… Tout cela se prépare tandis que les Etats-Unis avaient fini leur "rôle" dans la région des Balkans qu’ils ont divisée et où les nouveaux Etats créés furent placés sous les directives de l’OTAN.

Nous pouvons, donc, dire que les Etats-Unis ont, longtemps même après la chute de l’Union soviétique et la fin de la "bipolarité", usé de leur nouvelle situation afin de conduire leurs alliés européens dans des aventures militaires qui ont profité, économiquement, à Washington et abouti à étendre la présence de ses troupes et de ses bases militaires dans le monde entier, faisant de l’administration américaine, surtout celle des Bush père et fils, la maîtresse incontestée de la Planète devant qui tout et tous se plient, y compris le Conseil de sécurité des Nations Unies. D’ailleurs, ce dernier n’est plus d’aucune efficacité, puisque son nouveau rôle consiste à entériner les diktats et les décisions des Etats-Unis, afin que ceux-ci puissent mieux asseoir leur domination sans conteste sur les postes de prise des décisions, les marchés, les sources d’énergie et toutes les richesses naturelles dont notre Planète recèle.

Tout cela est bien visible dans les résolutions et les décisions prises par le Conseil de sécurité ou, même, les Nations Unies, mais aussi dans les formes que chaque intervention avait prises, les moyens que l’on doit utiliser et le nombre de chaque force de frappe (ou autre) qui doit opérer sur le terrain. Nous voudrions rappeler, à titre d’exemple dans ce domaine, quelques-unes de ces résolutions prises depuis l’an 1993 et concernant les interventions en Somalie, en Bosnie, en Afghanistan, au Liban, en Irak et, il y a quelques jours au Darfour (Soudan) et aux tentatives d’encercler l’Iran (sur ce plan, nous nous référons à la résolution que les Etats-Unis préparent avec les autres grandes puissances et aussi à ce qui a été dit concernant des raids aériens élargis sur des objectifs essentiels n’ayant pas, tous, un caractère militaire) .

Il faut noter, à ce sujet, qu’à l’exception de la guerre en Bosnie, toutes les interventions des Nations Unies ont été élaborées à la suite de campagnes politiques intenses (accompagnées d’autres faits par la CIA et d’autres services de sécurité occidentaux "alliés") ayant pour emblème "la lutte contre l’axe du Mal" représenté, comme dit la nouvelle terminologie, par "le terrorisme islamique" ou, encore, "le fascisme islamique" que Georges W. Bush lia, dernièrement, au "communisme", terme oublié depuis le début des années quatre-vingt-dix .

II. La guerre américano-israélienne contre le Liban

Ces raisons et ces objectifs, essentiels pour les Etats-Unis, surtout la suppression de toutes formes de résistance (armée, notamment) contre le nouveau régime mondial et son homologue sur le plan arabe, le "Grand Moyen Orient", sont à la base de l’agression menée par l’administration de Georges Bush contre le Liban, par l’intermédiaire d’Israël. Nous disons "intermédiaire", parce que le rôle du gouvernement présidé par Ehoud Olmert s’était limité, d’après tout ce qui a été dit et écrit, à mettre les plans exécutifs d’un projet mis au point, il y a plus de trois ans, par les responsables de "la sécurité nationale" américaine, sous la direction de Donald Rumsfield, vice-président des Etats-Unis . D’ailleurs, le gouvernement israélien avait dit ouvertement que c’est l’administration américaine, représentée par la ministre des Affaires étrangères Condoleeza Rice, qui a imposé la poursuite des hostilités, même après les échecs cuisants de l’armée de terre israélienne. De plus, c’est cette même administration qui a fixé le cessez-le-feu, après avoir imposé au Conseil de sécurité son point de vue concernant le contenu et l’exécution de la résolution 1701, puisqu’elle a accepté la poursuite du blocus aérien et maritime du Liban… jusqu’à l’application par le Liban du contenu des paragraphes 11 et 14 concernant le déploiement des forces internationales nouvelles dans les ports et l’Aéroport international de Beyrouth . Et nous pensons que les Etats-Unis continueraient à créer des problèmes au Liban jusqu’à ce que le gouvernement libanais cède à propos de "la nécessité de déployer les forces multinationales sur les frontières avec la Syrie" et aussi de leur participation à la prise des armes du Hezboullah, afin que John Bolton, représentant des Etats-Unis à l’ONU puisse dire : nous avons gagné par la diplomatie ce que nous avions perdu dans le combat… Quant aux causes de l’agression contre le Liban, elles sont nombreuses. Certaines ont rapport avec la situation libanaise intérieure ; d’autres sont liées à ce qui se passe en Palestine et dans certains pays arabes, l’Irak en particulier, ou régionaux, tel l’Iran.

1.Nous pouvons résumer les "causes libanaises" comme suit :

• Détruire la Résistance islamique (et réquisitionner les armes en sa possession) et, surtout, mettre fin à toute action de résistance maintenant et à l’avenir… Sans oublier l’objectif de mettre la main sur les armes des palestiniens vivant au Liban (non seulement à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur des camps).

• "Nettoyer" la région libanaise se trouvant au Sud du Litani de toutes les armes lourdes et à longue portée. Cela doit être accompagné d’un retour à l’Armistice (1949) qui spécifiait la présence, dans cette région, d’un effectif militaire réduit et utilisant des armes légères ; ce qui permettrait à Israël d’opérer des raids et des incursions au Liban sans avoir à se préoccuper de la situation des "colonies" du Nord. Il faut dire que ce que nous trouvons étrange dans tout cela, c’est le fait que certaines parties du regroupement appelé "14 février" aient pu insister sur ce même point…

• En finir avec la revendication concernant la "libanité" des fermes de Chebaa et des hauteurs de Kfarchouba, vu que ces zones ont une importance stratégique et économique vitale pour les Israéliens qui profitent pour asseoir leur occupation de ces terres libanaises de la position ambiguë de la Syrie, d’une part, et des allégations de certains hommes politiques de la "majorité" que ces fermes sont syriennes.

• Soutirer, à nouveau, l’eau des fleuves libanais se trouvant au Sud du Litani, vu que cette eau est vitale pour le développement de l’agriculture israélienne, en particulier les arbres fruitiers. Et nous sommes à même de dire que c’est la compétition entre les produits agricoles libanais et ceux d’Israël sur certains marchés, qui a poussé Israël à brûler de grandes surfaces de terres cultivées, non seulement dans le Sud et la Békaa Ouest, mais aussi dans les régions de la Békaa du centre et du Nord (où a eu lieu le massacre d’Al-Qaa)… De plus, l’aviation israélienne a fait des raids contre les canaux d’irrigation le long du fleuve Litani, détruisant même les canalisations à l’intérieur des champs irrigués, surtout dans la Békaa Ouest. Le but : détruire les récoltes et, aussi, d’interdire aux Libanais, pendant un certain temps, de pouvoir profiter de l’eau du Litani, ce qui renforcerait les "justificatifs" avancés et selon lesquels : Israël soutire l’eau du Liban parce que cette eau n’est pas utilisée et qu’elle se jette …dans la mer .

• Aider certaines forces "alliées" d’Israël dans le milieu politique libanais afin qu’elles puissent poursuivre les changements qu’elles n’ont pas pu faire lors de la guerre de 1982 ; ce qui permettrait le retour du Liban dans le giron américain qu’il avait quitté dans les années soixante du XX° siècle, par suite de plusieurs faits arabes et internationaux, dont les plus importants furent : le rôle joué par Jamal Abdul-Nasser, après la Révolution du 4 juillet 1952, la Résistance palestinienne et, aussi, le changement positif qui s’était opéré dans les relations entre le mouvement nationaliste arabe et le mouvement communiste, tant à cause du rôle joué par le Parti Communiste libanais dans la Résistance contre l’occupation (la création de la "Garde nationale", en 1969, et la participation active à la création des "Forces des partisans", en 1970) que grâce à l’appui de l’Union soviétique à la cause des peuples arabes…

• Pousser le Liban à signer des accords avec Israël au terme de quoi il accepterait de garder une partie des Palestiniens qui vivent sur son territoire… Surtout que le projet américain à ce propos, sur lequel se sont entendus les responsables de la seconde administration de Georges W. Bush, consiste à utiliser la politique de "transfert" de 70 000 familles palestiniennes en Jordanie et en Irak, à raison de 7000 familles par ans et pendant dix ans, tout en mettant au point un nouveau "Plan Marshall" pour effectuer ce "transfert" en toute quiétude .

2. Quant aux causes "régionales" de l’agression, elles se résument comme suit :

• La cause la plus importante est celle liée à la situation en Palestine. En effet, la tentative israélienne de mettre fin à toute résistance armée au Liban, et à celle du Hezboullah en particulier, aurait pu avoir des répercussions "positives" sur la réalisation du plan israélien concernant la liquidation par le feu et le sang de l’Intifada. Surtout que la guerre contre le Liban a attiré à elle toutes les attentions (les médias, en particulier) ; ce qui a facilité au gouvernement israélien toutes ses actions meurtrières contre le peuple palestinien, à Gaza surtout, où des centaines de personnes furent tuées et blessées, des maisons détruites et des personnalités politiques emprisonnées sans que cela soulève des réactions sur le plan international.

• La seconde cause réside dans la guerre menée en Irak où l’escalade au Liban fut accompagnée de la recrudescence des violences dans toutes les régions, mais surtout dans les régions "chiites", prenant de plus en plus l’aspect d’une guerre civile. Sans oublier les pratiques violentes des soldats américains et les arrestations par centaines qu’ils opèrent dans la population civile sous les prétextes les plus futiles.

• A cela s’ajoutent toutes les raisons données par Georges Bush, dans ses discours, et aussi les déclarations des membres de son équipe, sur le fait que la guerre contre le Liban est l’avant-propos d’une autre, plus généralisée, contre ceux qui, dans la région, "aident le terrorisme". Deux Etats furent nommés à plusieurs reprises : l’Iran et la Syrie. Dans cette perspective, l’équipe de Bush et ses supporters au Liban ont argué, pour expliquer l’attaque contre le Liban, de la présence d’un "agenda" mis par l’Iran à partir de son influence sur le Hezboullah afin de déstabiliser la région. Ainsi, ils croyaient atteindre d’une pierre deux coup : Le premier visant la Résistance qui prend, alors, l’image, non d’un mouvement de libération, mais celle d’une troupe mercenaire à la solde d’une puissance régionale ; le second consistant à démontrer que l’Iran est un pays qui appuie le "terrorisme", d’où il serait dangereux de ne pas lui couper toutes les voies lui permettant l’acquisition de la bombe atomique déjà détenue par Israël.

A cette lumière venant de l’intérieur et de l’extérieur, nous pouvons mieux voir que le Liban était pris comme champ d’expérience dans le but de lancer la deuxième phase du projet du "Grand Moyen Orient" afin de faire le pendant à la poursuite de la première qui doit se répandre hors de l’Irak vers l’Arabie Saoudite et l’Iran. Ainsi s’expliquent les paroles de la ministre des Affaires étrangères des Etats-Unis, Condoleeza Rice, qui a dit, répondant à ceux qui lui parlaient des souffrances du peuple libanais et des massacres perpétrés contre les civils, les enfants surtout : Ce sont les douleurs de l’enfantement d’un nouveau Moyen Orient… Une telle position n’a pas besoin d’une longue explication pour en saisir le contenu criminel.

III. Les résultats et les conclusions

L’agression israélienne a échoué dans ses objectifs "libanais" du fait du regroupement du peuple autour de la Résistance, même si des tentatives politiques ont eu lieu dans le sens de rendre cette Résistance responsable de tous les maux causés par Israël. Ces tentatives se sont, surtout résumées dans des "déclarations" faisant de l’agression une "réaction" répondant à des "actions" dont la dernière était l’enlèvement des deux soldats israéliens dans le but de libérer ceux des Libanais restés dans les prisons israéliennes… Bien que de nombreux journaux, américains, aient parlé de la préparation de cette guerre comme une préparation de longue haleine, y compris dans le choix de ses objectifs et son déroulement (fixé à trois semaines). Ce qui a changé la situation, c’est l’échec de l’armée israélienne à appliquer le plan et sa défaite devant quelques centaines de résistants…

Nous ne parlerons pas, ici, des bombardements (qui ont rappelé ce qui s’était passé en Bosnie), ni les bombes interdites, ni même la mort de plus de 1300 personnes, dont 900 femmes et enfants que les avions israéliens avaient poursuivis à l’intérieur des abris, mais aussi dans les ambulances et tous les moyens de transport. Nous nous contenterons de dire que ce prix, lourd, payé par le Liban, a abouti aussi, vu la résistance de son peuple, à déstabiliser la société israélienne qui s’est trouvée, pour la première fois, dans l’œil du cyclone, du fait de la riposte du Hezboullah. De même, cette résistance a mis en échec les plans américains concernant l’ouverture d’un front autre que celui de l’Irak devant le Projet du Moyen Orient nouveau (même si l’action des séparatistes kurdes de déclarer "l’indépendance" de leur région menace de revenir à des hostilités nouvelles dans cette région). Ce front est, bien entendu, le Liban que le projet de Kissinger, adopté par l’équipa de Bush, divisait en quatre cantons, après lui avoir ajouté quelques territoires pris en Syrie et une petite part du Nord de la Palestine occupée. Nous disons, donc, que la guerre américano-israélienne contre le Liban n’a pas pu réaliser ses objectifs. Cependant, cet échec ne constitue pas un obstacle devant les visées des Etats-Unis et d’Israël qui vont chercher par tous les moyens à exécuter leur projet qui date depuis plus de trente ans déjà. Surtout qu’ils profitent d’un appui total et inconditionnel de la part de toutes les grandes puissances occidentales qui sont unanimes quant à l’aide devant être apportée à l’agresseur (Israël) contre la victime (le Liban). Cette aide transparaît dans le contenu de la résolution 1701 qui rend le Hezboullah responsable de tout ce qui s’est passé entre le 12 juillet et le 13 août 2006 et qui, par l’ambiguité de son contenu, a permis à Israël d’avoir recours au blocus et lui permet de mener des "actions défensives" (puisque le paragraphe 1 de la résolution parle de l’arrêt des actions "offensives") que son gouverneur explique par des possibilités de "nouveaux raids contre le Liban" jusqu’à ce que le gouvernement libanais accepte, au dépens de sa souveraineté, le déploiement des forces internationales sur tout son territoire afin qu’elles contrôlent, non seulement les frontières avec la Syrie, mais aussi le reste du Liban, contrairement au mandat qui lui fut accordé. Nous pensons que le futur proche, à la suite de la présentation du rapport du secrétaire général de l’ONU concernant l’application de la résolution 1701 et les fermes de Chebaa, connaîtra le début de nouvelles tentatives visant à porter un coup à la résistance et aussi à toutes les forces anti-américaines. Pour ce faire, les Etats-Unis vont s’appuyer sur deux bases :

• La première, intérieure libanaise, à partir de l’accentuation des pressions sur la Résistance, afin qu’elle rend les armes et qu’elle se replie sur la position "politique".

• La seconde, internationale, à travers les forces internationales présentes au Liban qui seraient "priées" d’exécuter des tâches non stipulées par la résolution 1701 qui pourrait être amendée ou, même, changée, à la suite du rapport de Monsieur Kofi Annane, dans le sens des seuls intérêts israéliens.
Conclusion

Le Liban et la région arabe (et moyen orientale) se trouvent devant des développements nouveaux pouvant, selon la poursuite de l’échec du projet américain ou, au contraire, son succès, opérer des changements qualitatifs pour des dizaines d’années à venir. Il est, donc, nécessaire, sinon obligatoire, pour les forces politiques libanaises qui font face, depuis 1982, au projet américain, de profiter de la période de trêve actuelle afin d’étudier la situation à venir et de mettre au point un plan pouvant lui faire face. Le premier pas sur cette voie consiste à faire une analyse de toute la période précédente, surtout à la suite de la libération de la bande frontalière du Sud, le 25 mai 2000, et cela sur tous les plans : la situation socio-économique et la participation des forces politiques à la solution des problèmes dans ces domaines, l’opposition aux projets visant à reprendre au mouvement populaire les quelques acquis qu’il avait réalisés et, surtout, les visions du changement démocratique et le plan qui permet sa réalisation. Cette révision nécessite une étude sérieuse sur les deux plans politique et socio-économique, appliqués par le gouvernement de Fouad Sanioura, et en premier lieu les élections législatives et tous les projets présentés dans le but de changer la loi électorale en vigueur au Liban et de parvenir à des réformes véritables (pour ne pas dire radicales) au sein du régime politique libanais. Parce que ce que nous demandons, c’est de faire avancer les "ententes" conçues jusqu’à ce jour entre plusieurs forces de l’opposition dans le sens d’un programme commun pouvant profiter de la victoire de la Résistance et de tous les sacrifices du peuple libanais afin de construire la "patrie" libanaise libérée de tous les quotas et les divisions, surtout sur le plan confessionnel ; ces divisions qui, depuis 1975 (pour ne pas dire : depuis la Commune d’Antélias, au milieu du XIX° siècle), ont affaibli le Liban et permis toutes sortes de tutelles sur son peuple.

Ce que nous voulons, c’est un Liban indépendant et souverain de toutes les tutelles, proches ou lointaines. Un Liban arabe, non en paroles seulement. Un Liban pour les masses laborieuses, tant dans les villes que dans les campagnes. Le Liban des droits de l’Homme et où la discrimination est absente, surtout à l’encontre des femmes. Un Liban, enfin, où les jeunes, les intellectuels et les créateurs peuvent produire en toute liberté… C’est ainsi que nous comprenons la Résistance contre Israël et ses protecteurs aux Etats-Unis … C’est ainsi que nous avons appris à résister, tant dans la Résistance nationale qu’islamique. Et si nous utilisons ces qualifications, ce n’est pas pour faire de différence entre les résistances. Pour nous, il n’y a aucune différence entre ceux qui luttent pour la liberté, à quelle tendance idéologique appartiennent-ils.

* Marie Nassif- Debs est membre du Bureau politique du Parti communiste libanais (PCL)