Cette dernière incursion a encore plus miné la crédibilité de la stratégie de négociation qui est celle de l’Autorité Palestinienne dirigée par le Fatah, et a accru la désillusion des Palestiniens déjà sceptiques vis-à-vis des pourparlers avec Israël.
La nouvelle attaque, qui a principalement pris pour cible des militants du Hamas, s’est produite un jour après le lancement des discussions israélo-palestiniennes pour un statut final, ce qui représente un signal très clair envoyé à la direction palestinienne selon quoi Israël est déterminé à maintenir ce qu’il nomme son « contrôle de la situation sécuritaire » en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Même avant la visite dans la région de George Bush, le président des Etats-Unis, les médias israéliens avaient rapporté que le gouvernement avait signifié clairement à l’administration américaine qu’il continuerait ses incursions en Cisjordanie contrôlée par le Fatah et dans la bande de Gaza sous contrôle du Hamas.
Ces révélations s’ajoutant aux déclarations de Bush exigeant que « le terrorisme soit déraciné dans Gaza », avaient incité beaucoup de Palestiniens, y compris dans le Fatah, à réclamer la suspension des négociations.
Mais Mahmoud Abbas, le président palestinien, a réussi à obtenir l’appui de la majorité de la direction du Fatah pour reprendre malgré tout les entretiens, avant tout par crainte de s’aliéner l’appui de l’administration américaine et de la communauté internationale.
Termes voilés
Une réunion de la direction de l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) qui s’est terminée tard ce lundi dans Ramallah n’a pas été capable de décider une suspension des entretiens sur le statut final si Israël refusait de stopper son expansion coloniale et ses incursions militaires dans les villes de Cisjordanie et de la bande de Gaza.
Un communiqué publié par le comité central de l’OLP condamne la déclaration israélienne selon laquelle la bande de Gaza était « une entité hostile », exigeant que les négociations avec Israël « soient liées à la suspension de l’expansion coloniale israélienne », mais était loin de vouloir la suspension des négociations avec Israël.
Bien que le communiqué ne constituait pas une surprise, on s’attendait à ce que la position de l’OLP, qui est considérée comme étant la plus haute autorité définissant la stratégie palestinienne pour la paix, ait pour effet d’élargir la division qui existe entre les Palestiniens et de discréditer les négociations en cours.
La férocité des attaques israéliennes et spécialement l’assassinat d’Hussam al-Zahar, le fils du dirigeant du Hamas Mahmoud Zahar, va faire considérer les négociations comme rien de plus qu’une couverture pour un resserrement général du siège imposé à la bande de Gaza par les Israéliens.
Mais les décisions de la session du comité central de l’OLP, selon différents participants contactés par Al Jazeera, ont prouvé que la rivalité entre le Fatah et le Hamas avait éclipsé des propositions d’une stratégie de négociation de la part des Palestiniens pour faire front au refus israélien d’arrêter la construction des colonies et ses « incursions militaires » permanentes.
Dans les discussions, qui parait-il ont été houleuses, ont été critiqués les silences d’Abbas alors que le président des Etats-Unis, au coeur du siège de l’Autorité Palestinienne dans Ramallah, niait les résolutions des Nations Unies, en particulier le droit au retour des réfugiés palestiniens et l’illégalité de l’annexation de Jérusalem-est par Israël.
Le président des USA a implicitement approuvé l’annexation par Israël des principales colonies juives, ce qui reviendrait en réalité à confiner l’état palestinien dans une zone réduite en fragments reliés par des couloirs (dans le meilleur des cas).
Le comité central de l’OLP a indirectement rejeté les déclarations politiques de Bush, mais la reprise des entretiens sans aucune condition provoque la crainte, même dans le mouvement du Fatah, que ces négociations ne servent qu’à encourager des attaques israéliennes.
Représentation alternative
Mais la crainte du Fatah, et c’est également une crainte de l’OLP, c’est que le Hamas, qui a pris le contrôle Gaza en juin passé, puisse parvenir à mettre en place une représentation alternative pour les Palestiniens et cette crainte semble s’être exprimée par des appels à suspendre les négociations avec Israël.
L’OLP, créée en 1964, a précédé la création du Hamas qui n’a jamais rejoint les rangs de l’organisation.
Depuis la prise de pouvoir du Hamas dans Gaza, Abbas a eu recours aux institutions de l’OLP pour contourner le mouvement islamiste qui dispose d’une majorité de sièges au Conseil Législatif Palestinien élu [en janvier 2006].
Le communiqué du comité central de l’OLP a accordé à Abbas une partie de l’appui dont il a besoin en déplorant la conférence palestinienne que le Hamas projette d’organiser à Damas la semaine prochaine, mais en évitant de fermer la porte à une réconciliation avec le mouvement de la résistance islamique.
Mais l’incursion israélienne contre Gaza, moins de 12 heures après la fin du comité central de l’OLP, était un dur retour à la réalité : la direction palestinienne est trop enlisée dans ses rivalitéss internes pour pouvoir se concentrer sur les actions israéliennes.
* Lamis Andoni est écrivain et analyste politique pour Al Jazeera