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4e édition du Forum des Peuples

du 6 au 9 juillet 2005 à Fana, Mali

Mercredi 13 avril 2005, par Pierre BEAUDET

Partie intégrante du Forum Social Africain et du Forum Social Mondial, le Forum des Peuples se donne la spécificité de se réunir chaque année en contrepoint au sommet de G8. La prochaine édition se tiendra du 6 au 9 juillet 2005 à Fana, au Mali.

I. Introduction

Partie intégrante du Forum Social Africain et du Forum Social Mondial, le Forum des Peuples se donne la spécificité de se réunir chaque année en contrepoint au sommet de G8. C’est dans cette logique que la première édition du forum des peuples dénommée le Forum « Kananaskis, village des peuples » s’est tenue du 25 au 28 juin 2002 simultanément au sommet de G8 à Kananaskis (Canada) ; la deuxième édition dénommée le Forum des peuples « Consensus des Peuples face au consensus du G8 » du 31 mai au 03 juin 2003 en contrepoint au sommet de G8 à Evian, (France) et la 3éme édition Forum des Peuples « De Siby à Kita, les peuples refusent la résignation » qui s’est tenue à Kita du 06 au 10 juin 2004 était le contre sommet à celui du G8 tenu à Sea - land en Georgie,(USA).

Le Forum des Peuples par son caractère particulier de promouvoir la mobilisation sociale au niveau local vise entre autres objectifs de contribuer au renforcement du contre pouvoir citoyen, à la construction des alternatives des peuples africains et celle d’un véritable partenariat entre les gouvernements africains et leurs peuples.

Les trois éditions du Forum des Peuples ont respectivement mobilisé près de 400 personnes (dont 250 paysans et paysannes) déléguées à la 1ère édition, 600 participants à la 2ème édition (dont 400 paysans et paysannes) et la 3ème édition a mobilisé plus de 700 participants. Pour la plupart, des délégués venus de l’intérieur du Mali, d’Afrique et d’ailleurs ont contribué à enrichir le cadre de débats paysans. L’états des lieux et des propositions d’alternatives ont été faits sur des questions telles que la dette, la souveraineté alimentaire, le PPTE/CSLP, le commerce non équitable, le NEPAD, la démocratie, la destruction des agricultures paysannes africaines, etc.

Le Forum des Peuples est une opportunité d’information critique et de sensibilisation de la population africaine et malienne sur les mécanismes politiques et économiques internationaux qui contraignent les politiques nationales de développement des pays du Sud.

Les efforts de sensibilisation et de mobilisation des populations maliennes et africaines au niveau des Foras ambitionnent de créer un vaste mouvement citoyen pour amener les gouvernants africains à promouvoir les intérêts vitaux des populations dans leurs politiques et dans les lieux de décisions internationales.

Le Forum des Peuples représente historiquement la première rencontre citoyenne des peuples d’Afrique en contrepoint au sommet de G8.

La 4ème édition du Forum des Peuples qui est la suite logique de notre expression démocratique et citoyenne sera organisée dans la commune de Fana région de Koulikoro à 120 kilomètres (par la route) de Bamako du 6 au 9 Juillet 2005 en contrepoint au Sommet de G8 à Gleneagles, Ecosse.

II. Contexte et Justification :

Les politiques d’appauvrissement et de régression sociale sont impulsées par les organisations internationales, notamment le G8, ce dernier « joue, de fait, le rôle de directoire du monde, sans aucune légitimité. Il n’a jamais été mandaté par les peuples, mais oriente pourtant la marche du monde. » Cette année, le G8 va se réunir à Gleneagles en Ecosse sous la présidence britannique du 6 au 8 juillet 2005, et s’apprête à impulser de nouvelles mesures d’oppression des peuples.

En choisissant comme site le milieu rural, plus proche de la majorité des populations de nos pays, le Forum des peuples a voulu signifier qu’il faut partir de cette réalité. On peut aujourd’hui démontrer avec fiabilité que 70% des personnes les plus pauvres de la planète vivent en zone rurale et sont tributaires de l’agriculture. La majorité des populations de l’Afrique de l’Ouest comme de l’Afrique toute entière est formée des populations rurales paysans. Il est donc normal de les mettre au centre de notre réflexion et de notre action.

2.1 Contexte de l’action :

2.1.1 Un tour dans le village planétaire :

La mondialisation néo-libérale est devenue synonyme de délabrement social, économique, environnemental, culturel et politique des peuples. Elle engendre des crises économiques, sociales, écologiques et la guerre. La mondialisation dans sa logique de domination et d’expropriation des peuples fait des ravages à travers le monde. Le rapport mondial sur le développement humain 2003 du PNUD illustre fortement cette situation :

  • plus de 10 millions d’enfant, soit 30 000 par jour, meurent de maladies qui auraient pu être évitées ;
  • plus de 500 000 femmes décèdent durant leur grossesse ou en couches ;
  • 42 millions de personnes vivent avec le VIH/sida, dont 39 dans les pays en développement ;
  • 115 millions (dans les PED) d’enfants ne fréquentent pas l’école primaire, 876 millions d’adultes sont analphabètes ;
  • plus d’un milliard (dans les PED) de personnes c’est-à-dire un individu sur cinq n’a pas accès à l’eau potable ;
  • 2,4 milliards sont privés d’installations sanitaires améliorées ;
  • plus de 2 milliards de personnes disposent de moins de 2 dollars par jour ;
  • plus de 300 millions d’africains vivent avec 0,64$/jour ;
  • 141 enfants africains sur 1000 meurent avant 5 ans ;
  • l’espérance de vie aujourd’hui en Afrique est tombée à 48,9 malgré le niveau technologique du monde qui vit à l’âge de la cybernétique.

Le Bureau international du travail dans un volumineux rapport sur la dimension sociale de la mondialisation publié en février 2004, dénombre 188 millions de chômeurs dans le monde.

Les peuples du Sud payent un lourd tribu, ils vivent dans une pauvreté grandissante, sous-tendue par la diminution des prix des matières premières, la concurrence des surplus agricoles, les sous-traitances et les zones franches, l’importance du service de la dette, les exigences des investissements étrangers, les taux usuraires des placements à court terme (capitaux hirondelles), l’évasion des capitaux locaux vers des lieux de plus forte rentabilité, etc. Ces fléaux sont caractérisés par la sous - alimentation, le manque d’eau potable, les dysfonctionnements des systèmes éducatifs, la santé très précaire des femmes, des enfants et autres cibles vulnérables dans les villes et campagnes. A cette liste, il convient d’ajouter les conflits et guerres, qui, à côté de la pandémie du VIH-SIDA et du paludisme ou mourir tout simplement. Ce lot de malheurs est essentiellement dû aux politiques hasardeuses qui ont entraîné l’Afrique dans un cycle infernal d’endettement avec des plans d’ajustement structurel, reconduits sous le nom des stratégies de réduction de la pauvreté, qui empêchent nos Etats de répondre aux besoins de première nécessité des populations.

2.1.2 La dette au delà des mobilisations

La problématique de la dette peut-être résumée à l’équation 1-6=4. Cela voudrait dire que, pour une dette contractée dans les années 80, les pays du tiers monde ont remboursé six fois le montant initial et se retrouve vingt années plus tard quatre fois endettés. Le fardeau de la dette des pays du tiers monde est lourd sur les épaules des peuples qui vivent désormais sous le seuil fatidique de la pauvreté absolue. Cette dette est odieuse, immorale et illégale. Selon la CNUCED, l’Afrique verse davantage d’argent à ses créanciers qu’elle n’en reçoit (entre 1970 et 2002, l’Afrique a reçu 540 milliards de dollars environ en prêt et en a remboursé 550 milliards de dollars au titre du capital et des intérêts) et elle préconise l’annulation de la dette de l’Afrique pour qu’elle sorte de la pauvreté. Selon la Banque mondiale, la dette extérieure de l’Afrique au Sud du Sahara a été multipliée par plus de 3% entre 1980 et 2001. Elle est ainsi passée de 60 à 210 milliards de dollars au moment où ce Sous -continent a déboursé en termes de service de la dette 240 milliards de dollars (comprenant le remboursement d’une partie du principal et des intérêts). C’est dire donc que l’Afrique subsaharienne a remboursé 4 fois sa dette de 1980 mais se trouve toujours trois fois plus endettée. Pire, chaque année, elle paie en service de la dette quatre fois l’addition des budgets sociaux de la santé et de l’éducation réunies.

Adoptée en 1996, l’initiative PPTE « est un cadre d’action qui vise à résoudre les problèmes d’endettement extérieur des pays pauvres très endettés ». Le cadre a été renforcé en 1999 en vue de fournir un allègement plus rapide et plus profond à un plus grand nombre de pays. Le Nicaragua est devenu en février 2004 le dixième pays à atteindre le point d’achèvement dans l’initiative PPTE (Pays pauvres très endettés) après l’Ouganda, la Bolivie, le Mozambique, la Tanzanie, la Mauritanie, le Burkina Faso, le Mali, le Bénin et le Guyana. (Bulletin N°12 CADTM France, mars 2004) ! L’initiative est considérée comme un mécanisme de désendettement en vue d’apporter une assistance exceptionnelle aux pays très endettés afin de les aider à réduire le poids de leur dette extérieure à un niveau soutenable. Elu PPTE en septembre 1998, l’encours de la dette du Mali, de 1684,3 milliards de FCFA en 1998 a atteint 1746,1 milliards de FCFA en 2002 et 1765,9 milliards de FCFA en 2003. En 2006, il doit atteindre 1763,6 milliards de FCFA (prévision).

Le service de la dette, de 43,5 milliards de FCFA en 1998, il atteint 78 milliards de FCFA en 2002 et doit atteindre 90,69 milliards de FCFA en 2005. Ainsi, un constant s’impose, l’accroissement du service de la dette plus de 50%. Ce constat relève un paradoxe pour nous les mouvements sociaux, comment expliquer l’augmentation de l’encours de la dette et l’accroissement de son service malgré l’allégement de 675 millions en 2003 au titre de l’initiative PPTE ?

La promesse de 40% d’allègement du stock de la dette extérieure du Mali faite par le Gouvernement français en septembre 2002 ainsi que la décision de réduction des 70 millions de dollars (moins de la moitié du total 169 millions de dollars en valeur actuelle) consentis par le Club de Paris en mars 2003 et l’annulation de 37 milliards de dette en mars 2004 du Mali à l’égard du Japon dans le cadre de l’initiative PPTE ne sont pas suffisantes au regard des souffrances de la population dues au fardeau de la dette. Selon une enquête réalisée au cours de l’année 2001 par la Direction Nationale de la Statistique et de l’Informatique (DNSI), il ressort que la pauvreté des conditions de vie touche près de deux tiers de la population totale du Mali (64%) soit 6,5 millions de personnes. Cette pauvreté touche près de trois quart de la population rurale soit (74%). Trois adultes sur quatre sont analphabètes et moins de la moitié des enfants d’âge scolaire fréquentent l’école. La mortalité dans l’enfance dépasse de 30% la moyenne subsaharienne et l’espérance de vie à la naissance est inférieure de près de 20 ans à l’indicateur mondial. (Questions de population au Mali, Véronique Hertrich et Seydou Keïta, 2003). La proportion de la population malienne n’ayant pas accès à l’eau potable avoisine 40 %.

La décision unilatérale de la Grande Bretagne sous la pression des alter - mondialistes "d’annuler la part lui revenant de la dette des pays les plus pauvres du monde « en cours de réforme » !" au niveau de la Banque mondiale et à la Banque africaine de développement (BAD) est salutaire. Cette décision prise par la Grande Bretagne, à quelques jours de la prochaine réunion des ministres des Finances du G7, en marge des traditionnelles assemblées annuelles du Fonds monétaire et de la Banque mondiale à Washington, va faire tache d’huile ; mais elle demeure insuffisant face à la gravité de la situation sociale et économique des pays appauvris du Sud.

2.1.3 Commerce international

En contraignant les pays en voie de développement à consacrer la plus grande partie de leur surface agricole aux cultures d’exportation et en les obligeant à ouvrir leur marché aux produits industriels subventionnés du Nord, la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International et l’Organisation Mondiale du Commerce ont mis en péril l’économie des pays du Sud. Les agricultures paysannes des pays du Sud dont le Mali, éprouvent d’énormes difficultés à produire pour nourrir leurs peuples.

Dans les pays du Sahel, en soumettant l’agriculture aux prix mondiaux (artificiellement bas), ces institutions ont condamné des centaines de millions de paysans à la misère et à l’exode, mais sans espoir de travail. Comment peut-on accepter qu’un pays comme le Mali, capable de fournir du riz à toute la sous - région importe des milliers de tonnes de brisure de riz que les Asiatiques ne veulent pas manger ? Ou encore : comment traiter le problème de la dette en dehors des politiques agricoles de nos pays ? Prenons l’exemple du Burkina : en 2002, la chute des cours du coton a entraîné pour le gouvernement burkinabé une perte de recette de l’ordre de 40 milliards de F CFA. Et donc l’Etat burkinabé s’est endetté de 40 milliards de F CFA supplémentaires auprès de la Banque Mondiale.(Oudet Maurice, 2003).

2.1.4 Les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM)

L’O.G.M est un organisme vivant dont on a modifié le patrimoine génétique en y insérant un ou plusieurs gènes d’un autre organisme vivant (ACORD Sahel, Mali, 2004). L’introduction des OGM en Afrique suscite beaucoup d’inquiétudes et d’interrogations de la part des organisations de la société civile.

Les assises du Forum des Peuples de Kita ont abouti aux constats suivants :

  • Présence effective de produits de consommation à base d’O.G.M sur les marchés africains.
  • Des pays à l’image de l’Afrique du Sud et du Kenya produisent des semences d’O.G.M. Le Burkina Faso a récemment opté pour du coton transgénique. Le Mali se prépare et le Bénin est au stade du moratoire.
  • Les prétendus avantages, à savoir l’amélioration quantitative et qualitative des productions, ne sont pas convaincants.
  • Au contraire, avec les O.G.M, l’humanité s’expose à des dangers au plan sanitaire, social, économique et environnemental.
  • L’usage des O.G.M bouleverse l’agriculture africaine et portera atteinte à la souveraineté alimentaire.
  • Les gouvernements violent le protocole de Carthagène dont ils sont signataires et ne consultent pas les peuples avant d’opter pour les O.G.M
  • Les populations sont maintenues dans l’ignorance et souffrent d’un manque crucial d’information. Les paysans, surtout, sont les plus concernés.

Ainsi, la déclaration du Forum de Kita exigeait le rejet des O.G.M. Et quelques jours plus tard (21 - 22 juin 2004), le gouvernement américain a organisé à Ouagadougou (Burkina Faso) une conférence internationale sur les avantages présumés de la biotechnologie et des O.G.M. Elle était adressée à une quinzaine de pays africains avec, à leur tête, quatre chefs d’Etat (Bénin, Burkina, Mali, Niger).

Les quatre chefs d’Etats africains qui ont pris part à la Conférence de Ouagadougou se disent « favorables aux O.G.M s’ils ne sont pas dangereux pour la santé et l’environnement ».

Au-delà du manque d’éthique en matière de politique économique et de coopération entre les pays industrialisés et les nôtres, la problématique des O.G.M. défie la volonté et la capacité des élites africaines à composer avec leurs peuples et à les servir au lieu de servir leurs propres intérêts. Les O.G.M. ne constituent pas une réponse honnête à la faim et à la pauvreté en Afrique, mais un moyen supplémentaire et particulièrement odieux de nous déposséder de notre patrimoine semencier au profit d’une poignée de multinationales.

L’importation des O.G.M n’est qu’une dangereuse fuite en avant dans des contextes socio-économiques où les véritables maux de l’agriculture sont l’extraversion économique, les inégalités dans la répartition des efforts d’encadrement et de financement, l’ingérence des institutions de Breton WOODS dans les décisions nationales, les subventions agricoles des pays riches, la tendance des prix agricoles à la baisse, la mauvaise gestion et la corruption.

Des gouvernants éclairés se doivent par-dessus tout de tirer le maximum d’enseignements de cet ensemble de goulots d’étranglement au lieu de se plier à la volonté d’hégémonie des Etats-Unis tout en jouant le jeu des grands groupes. (Manifeste Coalition nationale contre les OGM et pour la sauvegarde du patrimoine génétique du Mali, Juillet 2004)

2.1.5 Paysannat au Mali et en Afrique

L’agriculture africaine a été restructurée par la colonisation et l’économie de traite, la monoculture de rente. Cela s’est traduit par la baisse du pouvoir d’achat des populations et la détérioration des termes de l’échange, l’importation massive de technologie (intrants, machines). La dépendance structurelle est ainsi créée. La conséquence a été la baisse tendancielle des cours mondiaux des produits agricoles au profit des pays du Nord. Les systèmes de compensation mis en place ont été démantelés ou privatisés. On observe de plus en plus l’expulsion des paysans au profit des multinationales et privilégiés de l’Etat.

Pendant que les agriculteurs du Nord sont subventionnés ceux du Sud en sont privés, mais pourtant se retrouvent tous sur les mêmes marchés avec les mêmes produits avec un renforcement des systèmes de quota. Tout cela s’est fait au détriment des cultures vivrières. C’est ainsi qu’est intervenue la crise alimentaire. Quelle place à l’agriculture africaine dans le contexte de la mondialisation ? Comment en effet ne pas s’insurger contre un système qui à travers des instruments tels que l’OMC, l’accord de Cotonou ou les accords de partenariats économiques régionaux (APER), préconise l’ouverture des marchés agricoles et la mise en concurrence des paysans du monde entier ? Comment les agriculteurs africains pourront-ils aujourd’hui rivaliser avec les fermiers américains ou européens lorsque ces derniers bénéficient de subventions considérables aux exportations ?

Au-delà de l’indignation et de la contestation des politiques agricoles actuelles, la nécessité de rompre avec la pratique des monocultures de rente et de privilégier au contraire l’agriculture vivrière s’impose. Il faut penser à un modèle alternatif parce que les économies africaines sont des économies agricoles et un nouveau mode de gestion des terres. Il faut replacer les exploitations familiales au cœur des politiques agricoles. Pour permettre « l’invention d’une société rurale où les paysans vivront dignement de leur travail, participeront au niveau local à une vie démocratique, mais pas une démocratie de façade pour plaire à l’Occident. » (Bernard Founou, Kita 2004)

2.1.6 Les accords internationaux et l’Afrique

NEPAD : le groupe du G8 lors de leurs rencontres de 2001, 2002 et 2003 ont apporté leur soutien aux chefs d’Etats Africains initiateurs du NEPAD (Nouveau Partenariat pour l’Afrique). Proposer comme cadre pour « une nouvelle relation de partenariat entre l’Afrique et la communauté internationale afin de franchir l’abîme du développement qui s’est élargi au fil de siècles de relations inégales » à travers la dizaine de priorités dont : bonne gouvernance, l’accès aux marchés internationaux, la lutte contre la pauvreté, le développement des infrastructures. L’une des lacunes essentielles reprochées au NEPAD est sa conception par le sommet des décideurs africains sans association des populations africaines. Aussi, la base de financement du NEPAD reste principalement les capitaux privés, généralement coordonnés par la Banque mondiale et le FMI. Nous devrons craindre que le NEPAD ne soit pas une stratégie pour légitimer les programmes d’ajustement structurels qui appauvrissent les peuples africains durant des décennies.

AGOA : La loi sur la croissance économique et les opportunités en Afrique (AGOA for African Growth and Opportunity Act) a été signé le 18 mai 2000 pour « aider » les pays de l’Afrique subsaharienne. Le Pacte prévoit des incitations réelles en direction des USA pour que les pays africains continuent leurs efforts d’ouvrir leurs économies et d’établir les marchés libres. L’AGOA est présenté comme une opportunité de développement de l’industrie textile du Mali, des exportations de tissus et des produits confectionnés à base de coton. Entrant dans le cadre de la nouvelle politique africaine des Etats Unis, l’AGOA est présenté par ses concepteurs américains comme un outil de facilitation des échanges commerciaux avec les pays africains et de promotion des investissements selon le concept « trade no aid » (l’échange et non l’aide). Le Président Bush a approuvé en 2004, la réélection de Madagascar comme l’un des 38 pays africains subsahariens ayant droit aux tarifs préférentiels dans le cadre de l’AGOA. L’AGOA est-elle réellement une opportunité de développement pour les peuples du Mali et des 38 pays de l’Afrique subsaharienne élus ? Les pays africains sélectionnés peuvent-ils réellement tirer profit des avantages qu’offre AGOA ?

L’AGOA concerne essentiellement les produits de faible valeur ajoutée pour nos pays, il s’agit entre autres des produits de textiles, les produits agricoles et dérivés répondant à des conditions phytosanitaires bien précises et les produits de l’artisanat. Or, les conditions phytosanitaires et réglementaires imposées par les USA sont quasiment impossibles à remplir pour nos Etats.

En plus les Etats africains doivent remplir d’autres conditionnalités entre autres :

  • suivre la politique étrangère des Etats Unis,
  • liquidation de tout ce qui est propriété publique,
  • soumission aux diktats des compagnies étrangères,
  • élimination des contrôles des prix,
  • abaissement des barèmes de salaires et des conditions de travail etc.

L’accord de Cotonou ou accord de partenariat ACP-UE fut signé le 23 juin 2000 entre les 15 états de l’Union Européenne et les 77 pays ACP (Afrique - Caraïbes- Pacifique) pour une durée de 20 ans.

Même si l’accord de Cotonou soutient les règles mortelles de l’OMC, s’oppose à l’annulation de la dette et assure la promotion de PPTE/CSLP ; il reconnaît désormais la société civile comme acteur de partenariat Cotonou pouvant accéder aux fonds. Cependant comment s’est opérée l’implication de la société civile des pays ACP dans l’élaboration des PIN (Programmes Indicatifs Nationaux) et dans le processus de négociation des APE (Accords de Partenariat Economique) et APER (Accord de Partenariat Economique Régionale) ?

Nous devons nous interroger sur les impacts de ces accords et décisions prises par les agents économiques du Nord sur les peuples du Sud ? Nous devons aussi les analyser en tenant compte de nos réalités et des réalités de notre environnement afin d’y proposer des alternatives crédibles défendant les intérêts de nos populations.

2.2 Actions de résistances, de mobilisations et propositions des alternatives

Un autre monde est possible ! Construisons-le !

Ceux qui estiment que la mondialisation est incontournable devraient réaliser qu’ils peuvent être contournés ou renversés.

Les luttes ne faiblissent pas, elles ont même tendance à se multiplier proportionnellement aux attaques du système néo-libéral.

L’année 2002 a été ponctuée de très grandes manifestations d’opposition à la guerre : 250.000 personnes à Barcelone le 16 mars, 60.000 à Washington le 16 avril, 250.000 à Londres le 26 septembre, près d’un million à Florence le 9 novembre 2002. A souligner également : les mobilisations internationales contre la guerre en Irak du 15 février 2003 (plusieurs millions de manifestants) et du 22 mars (plus de douze millions), et contre le G8 à Genève-Evian. En mai - juin 2003, il y eut aussi d’imposantes mobilisations sociales contre les plans néo-libéraux de réforme du système des retraites (France, Autriche, Brésil). La grande mobilisation des mouvements sociaux africains à travers les fora nationaux et sous régionaux (Bénin, Guinée Conakry) ainsi qu’au Forum Social Africain à Lusaka, pour dire qu’une autre Afrique est possible. Au delà du continent, il faut noter celle des mouvements sociaux européens au Forum Social Européen. Les résistances aux privatisations se sont amplifiées en différents points de la planète : Pérou (victoire contre la privatisation de l’électricité à Aréquipa), Mexique, France, ... En 2002, on a connu également une puissante mobilisation populaire qui a réussi à mettre en échec une tentative de renversement du président Hugo Chavez au Venezuela. A quoi s’ajoutent les victoires électorales de Inacio Lula da Silva au Brésil et de Lucio Guttiérez en Equateur.

Succès impressionnant du rassemblement du Larzac en France à la mi-août 2003 : plus de 200.000 participants pendant trois jours. Thèmes rassembleurs au Larzac : l’opposition à l’agenda de Doha soumis à l’agenda de la rencontre interministérielle de Cancun (Mexique) septembre 2003, soutien au recours à la désobéissance civile pour lutter contre l’expérimentation des OGM ; solidarité avec la Palestine ; convergence entre différentes luttes sociales (défense du système des retraites par répartition, luttes des enseignants, des travailleurs intermittents du spectacle...). En octobre 2003, le peuple bolivien a mené une lutte admirable pour le maintien du contrôle public et national sur les richesses naturelles (guerre du gaz) (Eric Toussaint, 2003).

Le quatrième Forum Social Mondial tenu à Mumbai en janvier 2004 a réuni plus de 100.000 participants venus des quatre coins de la planète pour élaborer des alternatives.

Le séminaire International sur la participation de la société civile des pays ACP à la mise en œuvre de l’accord de Cotonou et atelier sous régional ouest africain sur les DSRP en décembre 2003.

La deuxième édition dénommée le Forum des peuples « Consensus des Peuples face au consensus du G8 » du 31 mai au 03 juin 2003 en contrepoint au sommet de G8 à Evian, (France) a mobilisé près de 600 personnes déléguées (dont près de 400 paysans et paysannes). La consolidation et la pérennisation du forum des peuples et la construction des alternatives crédibles au système néo-libéral deviennent désormais une exigence et un défi pour les mouvements sociaux africains.

En juillet 2004, des multiples actions ont mobilisées partout dans le monde à l’occasion du soixantième anniversaire (l’âge de la retraite) de la Banque Mondiale et du FMI pour demander la retraite de ces institutions. Des pétitions de 60 parlementaires de 60 pays furent également mobilisé. La troisième édition du social africain la marche en 2004.

Les résistances à cette vaste offensive sont innombrables et se prolongent depuis plus de vingt ans. Ces dernières années, des propositions d’alternatives se construisent davantage.

La semaine internationale du commerce équitable, la 5ème édition du forum social mondial, les mobilisations contre le sommet de G8 en Ecosse, Royaume Unie se préparent intensément. La quatrième édition du forum des peuples en contre point au sommet de G8 en Ecosse s’inscrit dans cette de mobilisation locale et internationale.

La 4ème édition du Forum des Peuples consolide les initiatives africaines et augure de bons espoirs que cette tribune de la force des « sans voix » marginalisée et exclue grandisse en s’imposant localement et globalement !

Cette édition se tiendra à Fana, chef lieu d’une des 23 communes du cercle de Dioïla, Région de Koulikoro. Fana est situé à environnant 120 Km de Bamako etde la région de Ségou, à 160 Km deSikasso, à 40 Km de Dioïla et à 80 cm de Koulikoro.Fana forme avec 7 villages la commune de Guegneka, avec une population de 25 631 habitants dont 19 988 habitants pour la ville de Fana.

Deuxième grand producteur de coton après Koutiala, Fana demeure une zone très pauvre. La privatisation de la filière coton (Compagnie Malienne de Développement du Textile) et l’introduction des Organismes Génétiquement Modifiés sont des enjeux de mobilisation importants pour la 4ème édition du forum des peuples. Les syndicats des producteurs de coton ont une très forte expérience de mobilisation, ils ont été l’acteur principal de la boycotte de la campagne 1999 - 2000 pour protester contre les prix misérabilistes d’achats du coton aux producteurs. En plus, la région de Fana compte 1026 associations villages qui seront mobilisés tout au long de cette édition du forum des peuples. Au delà, Fana est une ville cosmopolite et carrefour des grands axes routiers du Mali.

III. Nature du projet :

Le forum des peuples est un espace populaire d’éducation, de communication, d’information et d’actions citoyennes contre la misère des peuples du monde, il est ouvert à tous quelque soit leur idéologie sans aucune distinction. Les principes du Forum des Peuples sont : libre accès et libre expression. Notre volonté est de rechercher et faciliter les échanges entre les peuples d’horizons différents afin d’approfondir les réflexions et les argumentaires pour la construction d’un autre monde plus inclusif, plus solidaire et plus juste que celui que nous impose le néo-libéralisme.

Le Forum des Peuples regroupe tous les acteurs impliqués dans le développement local, national, africain et international tels que les organisations paysannes, les syndicats, les ONG, les collectifs d’ONG, les médias, les fonctionnaires, les chercheurs, les universitaires, les organisations de jeunes et de femmes, les confessions religieuses, les parlementaires, les élus locaux...