|  

Facebook
Twitter
Syndiquer tout le site

Accueil > français > Archives du site > Mondialisation et résistances > Les paysans sont en marche

INDE

Les paysans sont en marche

Vendredi 29 septembre 2006, par PEUPLES SOLIDAIRES

L’accès à la terre est l’une des questions vitales posées par les organisations paysannes et notamment les mouvements des sans-terre. En Inde, Ekta Parishad un mouvement populaire coutumier des actions de terrain dans la tradition non-violente gandhienne, a programmé une mobilisation sans précédent pour octobre 2007. La préparation a déjà commencé et rentre dans sa phase publique. Une marche, comme celles qu’Ekta Parishad a l’habitude d’organiser, se prépare pour octobre 2006 en prélude à celle d’octobre 2007. Une sorte de répétition générale pour les militants et les responsables et surtout un avertissement solennel adressé aux autorités indiennes pour qu’elles prennent, enfin, au sérieux les revendications des paysans sans-terre.

Depuis 15 ans, sous l’impulsion de son responsable Rajagopal P.V. (voir pour en savoir plus, page 2), le mouvement d’inspiration gandhienne Ekta Parishad, travaille dans 8 Etats indiens. Son action couvre 4.000 villages et on estime à plus de 10 millions le nombre de personnes concernées par son activité. Le mouvement travaille plus particulièrement avec les petits paysans, les dalits et les communautés tribales autour d’une double activité. D’une part, il appuie des projets de développement communautaire et local qui visent à l’autosuffisance et cherchent à compenser les lacunes des programmes gouvernementaux. D’autre part, il organise des mobilisations pour réclamer l’accès aux droits et tout particulièrement l’accès à la terre et aux ressources de base.

En Orissa, par exemple, les militants d’Ekta Parishad travaillent particulièrement à Banpur, avec les populations tribales de la forêt de Barbara, harcelées par la police (Central Reserve Police Force) et l’administration. Plus loin, à Kalahandi, ils soutiennent les populations qui ont été expulsées pour laisser la place aux sociétés minières. Ailleurs, dans ce nouveau pays émergent qu’est l’Inde, des paysans sont chassés de leurs terres par la construction de barrages hydro-électriques, l’installation de nouvelles zones d’irrigation pour l’agro-industrie ou l’implantation de parc touristiques, sans recevoir de compensation matérielle ou financière. Il faut veiller avec eux à la conservation des eaux et des sols et à l’amélioration des cultures.

Dans tous les projets qu’il anime, le mouvement non-violent prône un développement par la base, qui comporte des dimensions économiques, le soutien à l’artisanat, la promotion de l’agriculture paysanne. Mais en Inde, les petits propriétaires, les paysans sans terre, les dalits et les adivasis (premiers habitants de l’Inde) n’ont pas les revenus suffisants pour faire vivre leurs familles. La loi ne leur donne aucun droit et ils doivent faire face à des difficultés financières insupportables qui conduisent certains au suicide.Alors, quand le dialogue ne suffit plus et que tous les recours à la négociation ont été épuisés, Ekta Parishad montre sa force non-violente pour obtenir gain de cause.

Droit de vivre et de travailler

Voilà maintenant de nombreux mois que le nouveau gouvernement indien a promis de redistribuer les terres dans le cadre d’une réforme agraire. Or les mouvements paysans attendent et ne voient toujours rien venir. En 2006, une loi sur la reconnaissance des droits indigènes devait être présentée au Parlement, mais son examen n’est toujours pas à l’ordre du jour. Aussi, Ekta Parishad a décidé d’une initiative sans précédent : la mobilisation “Janadesh 2007”. Au mois d’octobre 2007, une marche, rassemblant 20 à 25.000 personnes couvrira les 300 kilomètres qui séparent Gwalior, lieu emblématique de l’action non-violente gandhienne [1], de Delhi la capitale de l’Etat Fédéral. A l’arrivée, le mouvement compte rassembler 100.000 personnes face au Parlement. Ekta Parishad est bien décidé à rester devant ce haut lieu de débat et de décision politique tant que des engagements formels n’auront pas été pris par les responsables en termes de réforme agraire et de redistribution des terres.

Ekta Parishad n’en est pas à son coup d’essai et a déjà montré sa capacité autant logistique que politique à organiser ce genre d’initiative. Depuis 1991, quasiment tous les ans, Rajagopal P.V. et son mouvement coordonnent de telles marches en prenant soin de les ancrer dans une forte mobilisation locale, et en s’appuyant sur des campagnes de solidarité menées au niveau international [2]. A chaque reprise, des résultats concrets ont été obtenus et Ekta Parishad n’a pas hésité à s’impliquer dans leur application [3].

L’enjeu de la marche qui s’annonce en 2007 est tel que la préparation de la manifestation a déjà commencé depuis un an. Nous en sommes arrivés à la phase visible de la mobilisation et c’est maintenant que la solidarité internationale rentre en jeu, à l’occasion d’une première marche qui constitue une sorte d’échauffement, de tour de piste des forces en présence.

Chetawni Yatra : une première étape importante

La marche qui s’organise du 2 au 22 octobre 2006 va sonner comme un avertissement aux autorités indiennes. La Chetawni Yatra empruntera le même parcours que la grande marche programmée pour l’année prochaine (Janadesh 2007). Tout au long du parcours, ceux-ci vont lancer la mobilisation populaire en organisant réunions publiques et rencontres. A leur arrivée à Dehli, un grand rassemblement symbolique marquera l’engagement des uns et des autres dans la démarche et un mémorandum sera présenté au Premier Ministre indien pour l’appeler à procéder à la réforme agraire.

Le mois d’octobre 2006 est donc, pour nos amis indiens comme pour nous-mêmes, le début d’une action qui prendra des formes diverses internationalement, nationalement et localement et trouvera son apogée en octobre 2007.