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NIGER

Les libertés d’expression menacées

L’État veut fermer radio Alternative-FM

Dimanche 6 mai 2007, par H B Tcherno

Alternative FM, radio associative émettant à Niamey sur la fréquence 99.4 MHZ, a été menacée de fermeture, le 3 mai 2007, par M. Daouda Diallo, président du Conseil Supérieur de la Communication (CSC).
Dans une correspondance adressée au directeur de ladite radio, le patron du CSC reproche à ce média d’animer des débats politiques, alors même que son statut lui en fait interdiction.

« La radio que vous animez est une radio associative -services non commerciaux- donc interdite d’insérer dans ses programmes des informations générales, politiques, sportives et de publicités commerciales. Or, malgré cette interdiction, vous continuez et de manière régulière, de programmer et d’animer des débats politiques sur les antennes de votre radio. Il n’est pas possible d’accepter une activité qui contrevient à la législation et la réglementation en vigueur. Je vous demande instamment de cesser d’organiser des débats politiques ». C’est la substance de la lettre, avec ampliation au Premier ministre Hama Amadou, envoyée au directeur de la radio Alternative Espaces Citoyens.

« Ceci constitue une mise en demeure conformément aux dispositions de l’article 17 de la loi no 2006-24 du 24 juillet 2006 » précise le patron du CSC. Intervenant le jour même de la célébration de la journée internationale de la liberté de presse, cette mise en demeure du CSC adressée à deux organes-le bimensuel Air Info édité à Agadez a reçu un avertissement similaire- indépendants a indignée les journalistes et défenseurs des droits humains.

Il faut avoir l’art de la provocation pour osez signer une mesure de restriction de la liberté d’expression pendant que dans le monde entier, on célébre la liberté de presse. Cela ressemble fort à une provocation délibérée envers les journalistes qui planchaient au même moment sur le thème de la dépénalisation des délits de presse.

En tous cas, M. Daouda Diallo a une façon tres cynique de souhaiter « bonne fête » du 3 mai aux professionnels des médias privés. Ce comportement digne d’un prédateur de la liberté de presse ne l’honore pas. Lui qui avait entamé son mandat en engrangeant quelques points positifs suite à l’annonce du déblocage imminent de 107 millions de F. CFA, au titre du fonds d’aide à la presse et la révision du décret portant modalités d’accès à cette aide.

L’injonction de cesser tout débat politique adressée à Alternative FM se fonde sur un arrêté du CSC qui interdit aux radios communautaires de diffuser des informations générales, politiques, sportives et des publicités commerciales. Nous sommes au Niger, pays des paradoxes, où la bêtise gouverne la raison. Autrement, on ne comprendrait pourquoi des radios à vocation commerciale soient autorisées à informer, tandis que des radios associatives et communautaires dont la raison d’être est d’éduquer les citoyens en soient interdits.

Les responsables du groupe Alternative considèrent qu’il s’agit d’un moyen détourné de taire la radio et d’entraver les activités d’éducation à la citoyenneté initiées depuis quelques semaines par l’association Espaces Citoyens à travers notamment les forums radiophoniques.

Ce n’est pas la première fois que Alternative FM à maille à partir avec les conseillers du CSC et les commanditaires de leurs actes. Déjà en mai 2005, l’ancienne présidente du CSC avait menacée de fermer ladite radio, arguant que « ses installations ne répondent pas aux normes techniques ». Cet obstacle levé, Mme Mariama Keita reviendra à la charge, quelques jours plus tard, avec cette fois-ci, une injonction d’arrêter le bulletin d’informations. A l’époque, nos princes n’appréciaient pas les émissions et débats diffusées sur les antennes de la radio qui pêchait par son penchant à donner trop la parole aux acteurs de la société civile engagés dans le mouvement social de mars et avril 2005.

Depuis sa création, Alternative FM est victime de harcèlement de la part de l’instance de régulation dont les présidents successifs sont des représentants du Président de la République. En réalité, ce sont les reportages critiques et émissions de sensibilisation diffusées sur les antennes de cette radio qui dérangent les dignitaires du régime qui se cachent derrière le CSC pour obtenir sa fermeture.

Exclue du marché publicitaire et du partage de l’aide à la presse privée, cette radio continue malgré tout son bonhomme de chemin. Alors, il faut trouver un autre moyen de couper ses câbles, en appelant le copain du CSC à la rescousse. Si cela arrivait, ce serait une négation de la liberté d’expression et un recul de la démocratie, la seule chose que nous avons à ...vendre (sic).