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Crise, mouvements, forums sociaux

Vendredi 24 juillet 2009, par FESTIGNY Agnès

10 juillet 2009

Les Forums Sociaux, et en premier lieu le Forum Social Mondial, apparaissent à la suite de la rébellion Zapatiste en Amérique Latine (1994), du retour de la question sociale en Europe (mobilisations de 95 en France, etc.), de la mobilisation de Seattle, et avec le surgissement de nouvelles générations qui expriment leur révolte contre les effets brutaux des politiques néo-libérales. Ils ouvrent une nouvelle scène dans le panorama des mouvements sociaux à l’échelle planétaire.

Le Forum Social Mondial et le FSE, sont apparus dans la chaleur de la mobilisation sociale et à partir d’un positionnement antilibéral « radical » (voir Charte des principes). Ils se fixent trois objectifs : 1) être l’espace de rencontre des mouvements sociaux pour la confrontation, la réflexion ; 2) être un lieu pour l’échange d’expériences de résistance et des luttes ; et 3) faciliter l’articulation et la coordination des mouvements et impulser ( être un incubateur ) d’initiatives de mobilisation.

L’évolution du forum mondial ou européen a été et est très attaché à l’évolution du mouvement, son ampleur, sa radicalité... et, aussi, aux rapports de forces à l’intérieur du mouvement entre les secteurs plus radicaux et les modérés. Le Forum intègre, en effet, un vaste spectre de mouvements qui vont depuis ONGs très modérées jusqu’à des mouvements autonomes très radicaux.

Les Forums sont une réponse à la nécessité des mouvements sociaux de trouver des niveaux de rencontre et de coordination au niveau international pour se confronter au capitalisme globalisé. Le fait que de 12.000 participants au premier Forum Social Mondial à Porto Alegre, on soit passé à 130.000 dans la 9e édition de Belem de Pará en janvier 2009, révèle l’importance des Forums pour les mouvements sociaux.

Ajoutons à cela que c’est dans le cadre des Forums que ce sont développées des initiatives comme la mobilisation de Gênes 2001, des missions de soutien en Palestine - contre le blocus d’Arafat dans la Mukata imposé par l’Israël- ou, plus imassive, la mobilisation contre l’intervention en Irak le 15 février 2003 (qui a constitué une véritable mobilisation internationale, jamais connue dans l’histoire moderne). Les Forums ont aussi permis de construire, avec une réalité qui est diverse selon les pays, des cadres de travail stables, des collectifs : le CIFS en France, des réseaux thématiques, le réseau de l’Assemblée des mouvements sociaux etc.)

Les Forums en temps de crise

L’évolution des Forums ( au niveau mondial comme au niveau européen) dépend évidemment du contexte social . Après la mobilisation anti-guerre de 2003, qui n’a pas empêché l’invasion d’Irak, et alors que que des organisations- politiques- qui ont joué un rôle central dans la construction du Forum comme le PT au Brésil ou Rifundazione Communiste au niveau européen, font -ou ont fait- partie de gouvernements respectueux de l’ordre néo-libéral ; et, aussi parce que des mouvements sociaux « piliers » dans les premiers forums comme Via Campesina, Attac international et d’autres ont cessé de jouer ce rôle, le mouvement a connu une période d’affaiblissement. Cela a ouvert un débat sérieux sur l’utilité et le futur des Forums.

La dernière édition du FSE à Malmô ( en septembre 2008) a laissé beaucoup de militants interrogatifs. Les mouvements sociaux de tout le continent prennent de plein fouet les politiques libérales et autoritaires. Malgré les résistances opiniâtres, dont ce FSE a permis de mesurer l’ampleur, les alternatives qui se dessinent ont du mal à se construire, à se fédérer pour forger une alternative cohérente. Partout, la dérive de la social-démocratie et des forces qu’elle entraîne dans son sillage, pèse sur les rapports de forces.

Pourtant le succès de la 9e édition à Belèm a donné un nouvel espoir. Après des années le FSM - comme mouvement massif et populaire - avait connu une certaine atonie et baisse de participation, cette 9e édition a marqué un pas en avant tant au niveau de la participation - quelle réelle jubilation de voir à nouveau se mêler des militants de générations, de langues, de cultures différentes- que dans la qualité de l’engagement et de la combattivité .Il a été comme un point d’impulsion des luttes sur le thème : faire payer la crise à ceux qui l’ont provoquée. Partout s’exprimait la conscience que nous sommes face à une crise globale, de civilisation, qu’un changement de paradigme ( un autre monde ) est nécessaire. Le débat sur la société du futur a acquis une actualité très forte. Si les débats sur les alternatives / l’alternative ont écarté des entrées trop « doctrinaires » au profit de questions concrètes : comment faire face dans l’immédiat à ce système qui a généré la crise, (quelles mesures proposer…), cependant la question de l’alternative à construire/offrir à la société était très présente : les propositions comme expression de ce qui devrait être le « Socialisme du Siècle XXI » ( avec l’émergence de la question écologique, respect de la nature et la contribution des peuples indigènes au modèle de vie, ) tentaient , de manière plus ou moins convergente d’avancer sur ce chemin.

En Europe, la prochaine édition du Forum aura lieu en juin 2010 à Istanbul et bien que la réalité des mouvements sociaux du continent européen diffère substantiellement de celles d’Amérique Latine (le poids des organisations traditionnelles du mouvement ouvrier est plus fort en Europe ; les difficultés pour articuler des campagnes de mobilisation européennes) cet espace reste pour le moment comme le seul de rencontre pour les mouvements sociaux européens.

D’abord, pour en faire une caisse de résonance des luttes en cours (comme cela avait été le cas à Athènes avec le mouvement contre la CPE ) en étant un lieu de rencontres des protagonistes de ces luttes, pour approfondir le débat sur les sorties à la crise, (règlement financier ou alternatif au capitalisme ? capitalisme vert ou ecosocialisme ?...) et enfin pour en faire un espace de débat sur es stratégies du mouvement (comment bâtir des alliances et prendre des initiatives, construire le rapport de forces contre le capitalisme et les politiques en cours). Il s’agit de donner suite aux débats entamés à Belem et qui ont continué à travers divers réseaux apparus depuis. Plus important, promouvoir des mobilisations (de solidarité luttes ou campagnes européennes) pour faire face à la crise et aux politiques européennes et, aussi, pour avancer dans l’articulation des mouvements.

Le caractère global et structurel de la crise, son impact social, la colère sociale et l’émergence de luttes dans tous les continents rendent plus nécessaire que jamais la coordination, la convergence des mouvements au niveau européen et international. Même si les luttes se développent dans le cadre national, la confrontation avec le capitalisme mondialisé et la sortie de crise acquièrent une dimension supranationale. Et dans ce contexte, le Forum Social Mondial —et Européen-, constitue un espace inedit de rencontre des mouvements sociaux, comme caisse de résonance des luttes et comme cadre pour définir des alternatives, construire des stratégies et promouvoir des initiatives. Un espace important, indispensable, privilegie pour les militant-es, les mouvements anticapitalistes.

Au-delà des Forums : construire un réseau de mouvements sociaux

Les forums constituent donc un lieu privilégié pour les mouvements, mais ce n’est pas un outil sufisant , notamment entre les évènements/Forum. Depuis le début se pose la nécessité de construire un Réseau des Mouvements Sociaux qui permette de consolider un espace d’information, de débat et coordination entre les mouvements sociaux. C’est une tâche qui, pour diverses raisons, n’a pas encore pris corps, mais qui s’avère plus urgente que jamais. les Forums offrent des moments importants pour leur consolidation.

Un réseau qui est nécessaire, d’abord, pour donner visibilité aux luttes en cours ; deuxièmement, pour essayer de lancer des initiatives international contre les mutinationales qui s’attaquent aux droits sociaux et du travail dans tous les pays ; et, finalement, pour partager les analyses comme les formes de lutte et les alternatives.

La gravité de la crise capitaliste mais, surtout, la politique complaisante des grandes organisations traditionnelles du mouvement ouvrier (la CSI et la CES) met à l’ordre du jour de construire un outil qui permette de répondre à la nécessité de coordonner toutes les initiatives (au niveau local mais, aussi, national et international) qui donnent une expression à la colère sociale . ET pour cela il est indispensable d’avancer pas à pas dans la construction du réseau de mouvements sociaux.


Voir en ligne : http://www.europe-solidaire.org/spi...