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MAROC

Attaques tout azimut contre les libertés publiques

Dimanche 12 août 2007

Rappel des faits : une compilation réalisée à partir des sites d’Amnesty International, de la CIS et de l’AMDH (http://www.insad-1mai.blogspot.com/).

Les manifestations du 1er mai au Maroc ont été dispersées avec une grande violence par les forces de l’ordre et de très nombreuses arrestations de militants ont été opérées dans plusieurs villes du Maroc. A Rabat, Casablanca, Marrakech, Agadir, Oujda, Bouarfa, Khénifra, Béni Mellal, Ouarzazate, Ksar El Kébir. Des journalistes et des photographes de presse ont également été violemment réprimés alors qu’ils couvraient les manifestations [1].

Sept militants de l’Association marocaine des droits humains (AMDH) ont été arrêtés après avoir participé le 1er mai à des manifestations pacifiques dans différentes villes du Maroc. Cinq d’entre eux, arrêtés à Ksar el Kebir – Thami Khyati (36 ans), président de l’association nationale des diplômés chômeurs, Youssef Reggab (23 ans), Oussama Ben Messaoud (26 ans), Ahmed Al Kaateb (25 ans), membres des associations locales des diplômés chômeurs, et Mohamed Rabii Raïssouni (26 ans), employé, syndicaliste à l’UMT et secrétaire local de la jeunesse de Nahj Democrati)–, ont été condamnés en première instance le 22 mai à trois ans de prison ferme et à 10.000 dirhams d’amende chacun, augmentés en appel le 24 juillet à quatre années de prison pour « atteinte aux valeurs sacrées du royaume » (i.e irrespect pour la monarchie). Convoqués par la police judiciaire entre les 2 et 5 mai, Thami Khyati, Ahmed Al Kaateb, Oussama Ben Messaoud, Youssef Reggab et Mohamed Rabie Raïssouni ont été interrogés sur les slogans qu’eux mêmes ou d’autres personnes avaient scandé.

Les militants ont affirmé n’avoir scandé que les slogans revendicatifs de leur organisation et n’avoir entendu aucun slogan illégal. Ils ont néanmoins été arrêtés, sur les dépositions de policiers Mohamed El Garage, Abdelaziz Alazaoui et Amine El Bouhani, qui ont affirmé qu’ils faisaient partie des 20 jeunes qui scandaient des slogans illégaux en fin de cortège. Dans les faits, ce sont des militants syndicaux, de l’association des diplômés chômeurs et de l’AMDH qui ont été touchés.

La procédure a fait l’objet de multiples irrégularités Le procureur a incarcéré les prévenus selon la procédure de flagrant délit malgré l’absence du flagrant délit (les procès verbaux datent du 5 mai), sous prétexte qu’ils représentaient un danger public. Un (faux) constat a été ajouté le 5 mai, sans avertir la défense, alors qu’en préambule, le procureur demandait à l’officier rédacteur du procès, d’ordonner aux officiers présents à la manifestation de rédiger un constat. Le parquet a refusé toutes les requêtes de la défense sur l’invalidité des procès verbaux, sa demande de report du procès pour récuser le constat. Informé par la défense que le chef d’arrondissement influençait les témoins avant leur entrée au tribunal, le parquet a seulement levé la séance. Les constats (à posteriori) des policiers divergeaient sur la description du groupe de contrevenants, mais s’accordaient sur les slogans et le fait que tous les prévenus appartenaient au Nahj Democrati, ce qui fut démenti au cours du procès.

Deux autres militants, El Mehdi El Berbouchi (AMDH, étudiant, dix-neuf ans), et Abderrahim Karrad (ouvrier membre du bureau du syndicat agricole affilié à l’UMT [2], vingt-cinq ans), arrêtés le 1er mai après la fin de la manifestation au siège de l’UMT d’Agadir avec trois autres militants. El Berbouchi et Karrad ont été inculpés pour « atteinte aux valeurs sacrées » en vertu des articles 179 du code pénal et 38 et 41 du code de la presse [3]. Le procureur du Roi les a accusés d’avoir scandé le premier mai 2007 « Jet ski et fêtes où est passé l’argent du peuple », « On a assez du sacré, plus de liberté », « Le roi va t’en, le Maroc n’est pas ta propriété », « Monarchie fasciste, république démocratique » [4]. El Berbouchi et Karrad ont également été condamnés à deux ans de prison ferme le 10 mai et à dix mille dirham d’amende chacun par un tribunal d’Agadir. Leurs condamnations ont été confirmées en appel le 26 juin [5]. El Berbouchi et Karrad ont été torturés et menacés de viol pendant les interrogatoires pour leur extorquer des aveux qu’ils ont récusés par la suite [6] ; les marques visibles sur le corps de El Mehdi El Berbouchi, ont été déclarées par le médecin désigné par le tribunal sans rapport avec son interrogatoire. Le militant Kerrad avait du mal à marcher lors de son entrée au tribunal le 3 mai. Les avocats de la défense ont demandé en vain leur mise en liberté, alors que El Berbouchi devait passer ses examens. Ils n’ont pas pu appeler des témoins du procès verbal à la barre pendant les procès.

L’INSAD appelle à des sit-in de solidarité avec les détenus politiques dans plusieurs villes du Maroc.

Les 5 et 6 juin, 10 militants de l’AMDH, de la CDT et d’Attac Maroc sont arrêtés à Beni Mellal après avoir participé au sit-in de solidarité avec les sept militants de Ksar el Kébir. Le 8 juin l’AMDH de Khouribga, le 13 juin celle de Casablanca,

A Paris, plusieurs organisations marocaines [7] organisent le vendredi 8 juin un rassemblement et une délégation à l’ambassade du Maroc à Paris [8] 1/ qui demande la libération des détenus du 1er mai et des autres détenus politiques ainsi que des mesures de démocratisation et d’établissement d’un état de droit [9]. Le 10 juin, le réseau arabe des droits de l’homme publie un appel à la solidarité avec les détenus du 1er mai [10]. Le 11 juin, Amnesty international demande la libération des détenus dans une lettre aux autorités marocaines. Le 15 juin, la GCT espagnole organise des manifestations devant les consulats marocains en Espagne. Les organisations des comités de soutien organisent le 15 juin une journée nationale de solidarité et à une grève de la faim au siège du Syndicat National de la Presse Marocaine. Devant le Parlement à Rabat, les forces auxiliaires (police) chargent sans sommation, matraquent, piétinent, traînent par les pieds et poursuivent les militants pendant plus d’une heure et demie. 30 manifestants sont blessés, dont Omar KAJI, président de la section AMDH de Tiflet, qui a son poignet brisé. Un autre militant a le tympan percé. Khadija Ryadi, la présidente de l’AMDH, Amine Abdelhamid et Abdelilah Benabdesalam vice-présidents, reçoivent également des coups. Parmi les slogans dénonçant la répression et la violation des libertés, les manifestants scandent « Assez de valeurs sacrées, nous voulons des libertés » [11]. Après un sit-in devant le ministère de la justice le 16 mai, les formations syndicales, politiques et associatives des comités de soutien constituent une Instance nationale pour la solidarité avec les détenus du 1er mai 2007 (INSAD). Le 26 juin, 4 des 10 militants [12] arrêtés à Beni Mellal ont été condamnés, pour « atteinte aux valeurs sacrées » à : un an de prison et 1000 dirham d’amende pour Mohamed Boughrine, (soixante-douze ans), qui a déjà passé 18 ans comme détenu politique dans les geôles de Mohamed V et Hassan II ; deux mois de prison avec sursis et à une amende de 500 dirhams chacun pour Abdelkbir Rabaaoui (membre des l’association des diplômés chômeurs et de l’AMDH), Brahim Ahansal et Mohamed Yousfi (Attac Maroc). Mohamed Boughrine a refusé de faire appel de sa condamnation, déclarant qu’il avait le droit d’exprimer ses opinions.

Le 10 juillet, les forces auxiliaires et la police ont empêché des personnes de rejoindre des sit-in organisés par les familles des détenus à Rabat. Les forces de sécurité ont bloqué l’accès à un premier sit-in vers 11 heures du matin devant le Parlement, et ordonné aux participants de se disperser. Les forces de sécurité ont également empêché l’accès à un second sit-in le même jour, à 3 heures de l’après-midi, devant le Comité consultatif marocain des droits de l’homme, mais certains participants ont pu par la suite présenter leurs requêtes à un représentant du Comité.

Le procès en appel du 24 juillet avait réuni des syndicalistes, militants politiques et associatifs, les parents et amis des accusés, qui attendaient la diminution des peines ou l’acquittement, au vu des faiblesses de l’accusation. A l’annonce du durcissement de la peine (4 ans de prison au lieu de 3) l’assistance a manifesté sa colère et l’association des diplômés chômeurs a appelé à manifester devant le tribunal et la prison. Les forces de police, en nombre exceptionnel, ont expulsé brutalement l’assistance du tribunal,mais n’ont pas pu empêcher l’assistance de manifester sa solidarité aux militants condamnés. Un observateur reporte que l’assistance était moins nombreuse le 24 juillet qu’au cours des procès précédents. Il en conclut que la répression a porté ses fruits et que la démobilisation a commencé.

Le 26 juillet, Elmahdi Elbarbouchi et Abderahim Karrad entament une grève de la faim pour protester contre leurs conditions de détention et les condamnations injustes contre les détenus de Kasr Elkbir. L’AMDH de Achtouk Aït Baha et le siège l’AMDH est intervenu deux fois auprès du ministre de la justice pour qu’il satisfasse les revendications des détenus politiques pour améliorer leurs conditions de détention :

1) Les transférer de la prison civile de Banzkan au bateau prison de Aït Melloul.
2) Fournir à Abderahman Karad les soins nécessaires à son asthme.
3) Donner à Elmahdi Elbarchouchi les moyens de poursuivre ses études.
4) Rassembler les deux militants (Elbarbouchi et Karrad) dans une même cellule et les isoler des prisonniers de droit commun.
5) Leur assurer leur droit aux visites.

Elbarbouchi et Karrad ont obtenu d’être transférés au bateau prison de Aït Melloul et de recevoir des visites. Mais leurs conditions de détention restent insupportables, car ils sont dans la même cellule que les droits communs. L’un d’entre eux a été agressé sexuellement par un des détenus de droit commun dimanche 22 juillet [13].


FAX DES AUTORITÉS MAROCAINES

M. Driss Jettou, premier ministre, bureau du premier ministre,
courrier@pm.gov.ma
fax : 00212 037761010 // 00212 37 73 10 10

M. Mohamed Bouzoubaa, ministre de la Justice,Rabat :
courrier@mj.gov.ma
fax 00212 037723710
Son secretaire général 00212 37 73 47 25

M. Chakib Benmoussa, ministre de l’Intérieur, quartier administratif, Rabat :
courrier@mi.gov.ma
fax 00212 037766861 / 00212 037767404 //

Conseil consultatif des Droits de l’Homme (CCDH)
fax : + 21237.72.68.56.

WALI (préfet) d’Agadir : fax 00212 28840249 // 00212 28840414
Wali Beni Mellal : fax 00212 23489262
Wali Ksar Kebir : fax 0212 39985206


Mineurs de Jbel Aouam

Aujourd’hui 6 août à 6 H du matin les grévistes de Jbel Aouam ont été victimes d’une intervention musclée de la part des forces de répression. 5 ouvriers sont hospitalisés 3 d’entres eux sont blessés grièvement. 7 autres ouvriers sont arrêtés. les forces de répression ont démantelé les tentes placées par les piquets de grève.

Cette répression n’a pas découragé les ouvriers qui sont toujours en sit-in devant la mine, leurs familles : femmes et enfants ont rejoint le piquet de grève. [Note Attac Maroc]

Collectif
Notes
[1] Communiqué de l’AMDH Belgique du 6 juin 2007. Selon l’AMBDH, la repression des manifestations du 1er mai et des étudiants sahraouis également arrêtés et condamnés « témoignent d’un nouvel accès de fièvre repressive ».

[2] Deux autres syndicalistes enseignants Elhoussine Oulhouss, et Fathi Moustafa, FNE/UMT (Elhoussine Oulhouss est aussi président de l’AMDH de Bougria), et deux étudiants, Hichem Elkarkouh et Mustafa ElGarouaz, arrêtés en même temps que Karrad et Berbouchi, auraient été relâchés après avoir été battus et torturés par la police. Voir Confédération Syndicale Internationale http://www.ituc-csi.org/spip.php ?article1110&lang=fr et AMDH

[3] La législation marocaine punit toute humiliation de la personne du roi, de l’un des princes ou de ses apparentés par l’injure et l’outrage. Les accusés ont nié avoir scandé les slogans qui leur étaient reprochés durant toutes les étapes de la procédure, devant le procureur et devant le parquet ; ces slogans ne constituaient pas une injure ou un outrage à l’égard de la personne du roi et des princes, mais une opinion sur le régime politique

[4] D’après le compte-rendu envoyé au site allemand « LabourNet » et mis en ligne le 30 mai. http://www.labournet.de/internationales/ma/maisoli.html

[5] Amnesty International, qui considère les huit personnes condamnées pour « atteinte à la monarchie » comme des prisonniers d’opinion, détenus pour leur seule participation à des manifestations pacifiques, au cours desquelles ils ont pacifiquement exprimé leur opinion, demande aux autorités marocaines d’annuler les peines d’amende et d’emprisonnement Amnesty International constate aussi avec inquiétude que les sit-in organisés en solidarité avec des détenus ne sont pas autorisés, en violation du droit fondamental et universellement reconnu à la liberté d’expression et de réunion. Amnesty International demande instamment aux autorités marocaines d’ouvrir une enquête approfondie, indépendante et impartiale sur le comportement des forces auxiliaires lors de la dispersion du sit-in du 15 juin, afin d’établir s’il a été fait un usage excessif de la force, et de rendre les conclusions de cette enquête publiques. Cette enquête doit aussi émettre des recommandations sur des mesures disciplinaires ou autres appropriées à l’encontre de tout représentant de l’État convaincu d’avoir eu un recours excessif à la force ou commis des violences ; il faut également octroyer des réparations aux personnes blessées et prendre des mesures pour empêcher le recours excessif à la force par les forces auxiliaires. Amnesty International demande en outre aux autorités marocaines d’autoriser les manifestations pacifiques exprimant leur solidarité avec les huit prisonniers d’opinion, car il s’agit d’un exercice légitime du droit fondamental à la liberté d’expression et de réunion. Ces dernières années, plusieurs personnes, dont des journalistes et des militants politiques, ont été poursuivis et dans certains cas condamnés à des peines de prison, après avoir pacifiquement exprimé leur opinion sur la monarchie, qui reste un sujet « tabou » dans de nombreux débats. Index AI : MDE 29/009/2007 (Public) Bulletin n° : 134 ÉFAI 16 juillet 2007 ; Index AI : MDE 29/008/2007 (Public) Bulletin n° : 106 ÉFAI 11 juin 2007 et http://web.amnesty.org/pages/mar-180707-action-fra

[6] AMDH 10 mai 2007. http://www.amdh.org.ma/arabe/indexarb.htm

[7] AMF, ATMF, ASDHOM, APADM, FMVJ-France, Institut MEHDI BEN BARKA, MRAP et d’organisations démocratiques tunisiennes, Amnesty International-France (Observateur).

[8] Composée de Mme Annie DELAY (Amnesty International), M. Rachid EL MANOUZI (APADM), M. Abdelhak KASS (FMVJ-France) et M. Larbi MAANINOU (ASDHOM) et reçue par le Conseiller politique de la Chancellerie M. Abdelkader ABIDINE

[9] La suppression des dispositions entravant l’évolution démocratique comme l’accusation « d’atteinte aux valeurs sacrées du royaume », la vérité sur toutes les disparitions, la fermeture des centres de torture, l’arrêt des condamnations à des peines de prison pour opinion, des tracasseries à l’encontre des anciens exilés politiques et leur indemnisation

[10] http://www.hrinfo.net/press/2007/pr0610.shtml

[11] Le Syndicat National de l’Environnement, l’ Union Syndicale des Fonctionnaires et l’Union Marocaine du Travail dénoncent les brutalités du 15 juin dans un communiqué. AMDH 16 juin 2007

[12] Mohamed Fadel (retraité de l’enseignement, ancien secrétaire régional du SNE-CDT, memebre du FMVJ, membre du PADS), Abbas Abbassi (enseignant, secrétaire régional du Syndicat National de l’Enseignement CDT, Beni Mellal, ancien secrétaire régional du PADS, membre de l’AMDH du FMVJ) , Abderahman Elagi, Nabil Elcharqi, Abdelaziz Taymour ont été relaxés au procès en première instance

[13] AMDH Biougra www.amdhbiogracanalblog. com