Faire payer les pauvres
Plusieurs accords récents prétendent alléger la dette des pays pauvres. Dernier en date, « l’effacement » de la dette de 18 pays accepté lors du sommet du G8 en Écosse l’été dernier. Mais dans la réalité qu’en est-il ? Au Niger, le service de la dette (le remboursement des intérêts seulement) a augmenté de 24% en 2003 et de 15% en 2005. Trois milliards de dollars envolés en fumée. Ou si on veut, 30% des dépenses de l’État. Pour atténuer en partie le vol, les pays riches ont « concédé » au Niger un allègement, mais au prix de « conditionnalités » exorbitantes en continuation des désastreux plans d’ajustement structurel des années précédentes. Ainsi, l’eau des villes a été privatisée au profit de Vivendi qui multiplie les hausses de tarifs et les débranchements. Dans un pays où l’élevage représente la principale activité économique, l’Office national vétérinaire a été privatisé. À l’aube de la famine, le président Mamadou Tanja a augmenté la TVA, en plus de l’imposer aux denrées alimentaires, à l’eau potable et autres produits de première nécessité. 75% du corps professoral a été envoyé en préretraite. Dans un pays où 92% des femmes et 77% des hommes sont analphabètes, les professeurs sont dorénavant remplacés par des « volontaires de l’éducation », des jeunes sans diplôme qui gagnent le quart du salaire des professeurs réguliers.
La misère persiste
Le Niger a enregistré un surplus céréalier de 21 000 tonnes en 2005. Mais même le gouvernement admet que le nombre d’affamés est de deux millions, notamment dans les zones agropastorales comme Agadez et Diffa, où les populations semi-nomadiques pratiquent l’élevage et ne parviennent pas à couvrir leurs besoins en céréales. Au plus fort de la crise, les paysans devaient acheter le sac de 100 kg de mil à 30 000 CFA, soit le triple du prix normal. Ce qui veut dire qu’il doit maintenant vendre trois sacs de mil pour s’acquitter de sa dette.