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FRANCE

Les enjeux internationaux de l’élection présidentielle

Jeudi 3 mai 2007, par Aurélie Trouvé et Jean-Marie Harribey, co-présidents d’Attac

N’est-il pas paradoxal, alors que la mondialisation est au centre de
toutes les conversations, que les enjeux internationaux et européens
aient été quasiment absents de la campagne électorale ?

Le (la) président(e) de la République participera, dès son élection, à
deux événements majeurs. Le prochain G8, en Allemagne, début juin. Et,
fin juin, à Bruxelles, le dernier Conseil européen sous la présidence
allemande. Le(a) président(e) avalisera-t-il(elle) la déclaration
commune, adoptée lors du cinquantenaire de l’Union, qui ignore les
peuples d’Europe ?

Pour relever les défis sociaux et écologiques, deux perspectives
d’avenir doivent être dessinées. La première est une rupture radicale
avec l’ordre néolibéral pour faire échec au processus de
marchandisation des activités humaines qui ne peut qu’aggraver le
délitement des sociétés et la mise en coupe réglée de la planète. Car
la libéralisation du mouvement des capitaux, qui a donné le coup
d’envoi de la mondialisation financière, a entraîné avec elle l’envol
des dividendes, l’aggravation des inégalités, la précarisation de
l’emploi, le démantèlement des services publics et de la protection
sociale, et l’accélération des dégradations écologiques. L’Accord
général sur le commerce des services (AGCS) et l’Accord sur les
aspects des droits de propriété intellectuelle liés au commerce
(ADPIC), négociés au sein de l’OMC, sont des machines de guerre contre
les services publics et la libre circulation des connaissances, et
tendent à interdire toute protection face au dumping social, au
dumping fiscal et aux risques sanitaires.

L’urgence commande que les pays pauvres préservent leur souveraineté
alimentaire, rendue de plus en plus difficile par les politiques de
subventions des pays riches à leurs propres exportations agricoles, et
qui serait irrémédiablement condamnée si les plantes génétiquement
modifiées se répandaient. Il devient vital également que soient
déclarées inaliénables l’eau, le vivant et toutes les ressources
épuisables, ainsi que les connaissances sur lesquelles ne doit peser
aucun brevet qui en rendrait l’utilisation impossible par les pays
pauvres, déjà accablés par une dette que personne ne se résout à
annuler véritablement.

La seconde perspective est d’esquisser une régulation mondiale
démocratique des grandes questions qui concernent l’ensemble de
l’humanité. Le contrôle des citoyens doit faire irruption dans la
reconstruction de la démocratie de bas en haut : en bas, en inventant
des structures de délibération et de décision où pouvoirs et
contre-pouvoirs s’affrontent et aussi se complètent ; en haut, en
ébauchant la régulation mondiale qui deviendra de plus en plus
nécessaire pour gérer la globalité du monde. Aux règles imposées par
les marchés financiers, nous opposons une régulation par les droits
humains qui doivent l’emporter sur le droit de la concurrence et le
profit. Sait-on par exemple que beaucoup de conventions de l’OIT ne
sont pas seulement bafouées dans les pays « à bas salaires », mais
aussi dans les pays riches, dont la France qui, avec son contrat
nouvel embauche, contrevient à la convention n° 158, et où un discours
convenu sur la « valeur travail » est tenu par les démolisseurs du
travail et des droits sociaux ?

Puisque la libéralisation du mouvement des capitaux a déterminé la
mondialisation actuelle, il faut instaurer, et cela dès l’échelon
européen, des taxes sur toutes les transactions financières et un
impôt unique sur les bénéfices des entreprises multinationales. Il n’y
aura en effet pas de protection des biens communs de l’humanité,
notamment le climat, sans fiscalité internationale.
Comme l’Union européenne s’est inscrite dans le modèle néolibéral
mondial, seize Attac d’Europe viennent de signer une déclaration
intitulée « Vers une refondation de l’Union européenne : Les 10
principes d’Attac pour un traité démocratique ». Celle-ci propose
qu’une assemblée soit élue par les citoyens afin d’élaborer un nouveau
traité démocratique pour l’UE, qui sera ensuite soumis à un référendum
dans tous les pays. L’Europe doit être rebâtie sur une double
légitimité, l’une conférée par les citoyens européens qui
construiraient, par leur intervention, l’espace de souveraineté qui
fait défaut aujourd’hui, l’autre provenant des peuples qui s’incarnent
dans des États-nations. Ces derniers ne disparaîtront pas car ils
demeurent des lieux de régulation démocratique proches, alors que les
tenants de la mondialisation néolibérale ne les conçoivent que comme
des agents d’exécution des ordres du marché. Tel est le sens aussi du
Manifeste altermondialiste qu’Attac vient de publier : l’Europe doit
être au service du droit et de la paix et non se comporter en
puissance agressive gérant les intérêts occidentaux.