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La victoire des CPE en France

Mardi 2 mai 2006, par Gilles LEMAIRE

Avant d’en venir à l’analyse du mouvement anti-CPE, faisons le détour par les dysfonctionnements institutionnels profonds qu’il a révélés : un Président de la République qui promulgue une loi en demandant au mépris du droit qu’elle ne soit pas appliquée, un Premier Ministre mis sur la touche pour que le président d’un parti soit chargé avec les présidents des groupes parlementaires de rédiger une proposition de loi abrogeant l’un des articles de la loi promulguée et contestée… On nage là en plein délire, à cause de l’orgueil et de l’autisme d’un Premier Ministre et de l’impuissance d’un Président de la République ne disposant pas de solution de rechange ! Nous sommes là au cœur de la crise des institutions françaises : celles-ci, fruit du jacobinisme et du centralisme français, bloquent le dialogue social et concentrent le pouvoir au sommet de l’Etat.

Par Gilles Lemaire

Revenons au fond. Depuis 2002, la droite travaille activement à réformer la société française pour l’adapter à la mondialisation libérale, et à flexibiliser la société en s’appuyant sur les classes sociales les plus favorisées, tout en tentant de trouver des compromis avec les classes intermédiaires. Cela s’est traduit par la réforme des retraites, par la réforme de la sécurité sociale, par l’étouffement du monde associatif, par le démantèlement du Code du travail : CNE, puis projet du CPE, avec la volonté affirmée en janvier-février 2006 de réunifier le contrat de travail sur ces principes de flexibilité accrue. Enfin, par la diminution de l’imposition directe, surtout sur les couches supérieures du barème.

Mais personne n’est dupe ! Flexibilité pour la droite, c’est précarité pour les classes populaires. Les richesses produites augmentent sans cesse, mais le chômage également et les inégalités s’accroissent !

Et ce, dans un contexte où la planète va mal, réchauffement avec toutes ses conséquences en terme de dérèglements climatiques pour les populations des pays du sud en premier lieu, crises énergétiques, diversité biologique réduite, pollutions multiples avec leurs conséquences sanitaires…
Un mouvement social victorieux ! Quels en seront les conséquences ?

Les mobilisations populaires n’ont pas manqué depuis 2002, les crises également, ainsi celle des banlieues à l’automne dernier. L’élément nouveau, c’est que ce mouvement a fait reculer le gouvernement pour la première fois. Depuis les débuts de la crise en 1973, il n’y a plus eu de mouvements sociaux des salariés du privé ayant l’ampleur nécessaire pour faire reculer un gouvernement sur ses projets de loi ; en 1995 on avait parlé de mouvements par procuration, les employés des entreprises publics se battant avec la sympathie des salariés du privé. Cette fois, ce sont les étudiants et les lycéens qui ont permis aux salariés d’emporter une victoire d’importance.

Le climat politique a changé ; la défaite de la droite aux échéances de 2007 est possible mais pourquoi faire ? Et nous sommes toujours dans ce manque d’une force politique réformiste radicale offrant une perspective politique à la hauteur des enjeux sociaux et écologiques et s’appuyant sur une utopie et des valeurs aujourd’hui existantes mais dispersées. Dans ce contexte, le PS risque de tirer les marrons du feu pour de nouveau une gestion fade et décevante.

D’ici 2007, que va-t-il se passer ? Immigration et sécurité reviennent au premier plan ?

A un journaliste d’Europe 1 à la mi-avril qui lui disait « d’ici 2007, vous n’allez plus faire de réformes après ce retrait du CPE », Sarkozy a répondu « mais si, début mai je présente à l’Assemblée nationale ma loi sur l’immigration et courant mai celle sur la détection et le traitement des jeunes enfants à risque. »

Les vieilles recettes pourraient-elles resservir ? La peur de l’étranger, la peur des jeunes délinquants, voici les boucs émissaires que nous ressort Sarkozy. « Votez Le Pen » ont affiché Act up et le 9ème collectif de sans papiers avec le visage de Sarkozy ! Bien vu !

Mais ce n’est pas joué ; les Eglises ont réagi très vigoureusement, le collectif « Uni(e)s contre l’immigration jetable » réussit ses mobilisations. Le Parti socialiste, après maintes hésitations, s’est rallié au collectif.
Le refus du projet de loi relatif à l’immigration et à l’intégration peut, en mobilisant la jeunesse, la gauche, tous les humanistes bloquer le dessein de Sarkozy de constituer un bloc de la peur majoritaire. C’est possible ! GM